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Iran : Les échecs du Mouvement Vert et leurs conséquences
14.06.2011

Le dimanche 12 juin, le Mouvement Vert, opposition officielle et dernier joker du régime devait célébrer son deuxième anniversaire. Il n’y avait personne dans les rues, pas même les derniers collaborateurs du régime. Le régime n’a même pas pu diffuser de vidéos bidonnées pour promouvoir cette opposition bidon et inefficace. Les Etats occidentaux comme la France ou la Grande-Bretagne, qui ont d’importants contrats avec les mollahs et sont de fait hostiles à un changement de régime, tentent d’aider les mollahs avec des dépêches falsifiées évoquant des manifestations et même des arrestations !



Selon l’AFP et RFI (directement financée par le Quai d’Orsay), « des milliers de bassidjis circulant par groupe de 20 ou 30 en moto, munis de matraques, soutenues par d’autres agents en civil, les forces de sécurité ont réussi à disperser les manifestants partisans de l’opposition (ie le Mouvement Vert) ». Les deux médias français vont même plus loin dans la propagande en gommant le caractère islamiste et pro-régime de cette formation politique tout comme par le passé elles ont censuré les propos ultra-islamistes de Moussavi, Premier ministre du régime quand ce dernier organisait des attentats à Paris pour forcer la France à lui vendre des armes ou rembourser le prêt Eurodif ! Les intérêts pétroliers de la France passent au-dessus de son honneur.

Mais si la France s’en fiche, les Iraniens se sont d’emblée montrés méfiants vis-à-vis de ce personnage très islamiste et très anti-occidental qui fut à l’origine de grands projets terrifiants comme l’enlèvement d’enfants pour les enrôler de force dans la guerre Iran-Irak, la création de cellules de délation dans les entreprises et les universités ou encore le massacre des prisonniers politiques qui attendaient leur relaxe après la fin de leur peine. De plus, il siégeait au Conseil de Discernement de l’intérêt du Régime (CDIR), organe qui décide tout dans tous les domaines en Iran, il avait été pointé du doigt pour des emplois fictifs hautement rémunérés et enfin il venait de présenter un programme en tout point identique à celui d’Ahmadinejad : pro-hezbollah, pro-nucléaire, anti-dialogue… Karroubi, l’autre chef du Mouvement Vert, avait aussi un passé lourd et siégeait au Conseil de Discernement comme le quatrième candidat de la série, Mohsen Rezayi (ex-chauffeur de Khomeiny nommé à la tête des forces armées). Il n’y avait aucun candidat intéressant. C’est pourquoi, contrairement à ce qui est prétendu, presque personne n’a participé aux élections en juin 2009.

Ces élections, comme les précédentes, ont été un échec en termes de participations. C’est pourquoi les Iraniens ont été surpris quand quelques milliers de manifestants ont défilé à Téhéran (et seulement dans cette ville) pour parler d’une fraude. Les Iraniens ne comprenaient pas que l’on puisse regretter Moussavi.

Mais le fait que le régime autorise ces manifestations et les montre dans ses médias les a convaincus qu’il était derrière cette révolution de couleur en faveur de l’un des siens. Les Iraniens ont compris qu’ils étaient manipulés : ils n’ont pas donné suite aux demandes de soutien des manifestants pro-Moussavi qui arboraient en plus la couleur verte de l’islam.

En fait, le régime entendait faire plébisciter un islamiste anti-occidental pour donner une légitimité démocratique absolue au système islamiste en place ainsi qu’à l’ensemble de ses programmes politiques pour rendre les sanctions anti-démocratiques et contraindre les Américains à cesser leurs pressions. Le régime n’a donc vraiment pas aimé le boycott des Iraniens. Il a alors changé de scénario : il a mis en scène des bastonnades pour apitoyer le peuple et le faire bouger.

Le peuple qui avait déjà vu les mêmes shows lors de la révolte des étudiants (islamistes) en 1999 n’a pas bougé. Le régime a fait appel à ses pions en exil dans les médias pour encourager le peuple à aider « les jeunes (islamistes) en danger ». Le peuple n’a pas bougé. Le déclic est venu le 14 juin après une intervention nocturne du prince Reza Pahlavi appelant le peuple à saisir l’occasion pour se soulever. Le lendemain, le 15 juin 2009, plusieurs millions d’Iraniens sont descendus massivement dans les rues à Téhéran, mais aussi dans les autres grandes villes du pays. Le régime a sorti son champion Moussavi, mais les slogans étaient hostiles au régime : Moussavi a disparu, il a appelé le Guide à casser la contre-révolution. Le régime annoncé des répressions exemplaires…

La France qui aujourd’hui voit des manifestants là où il n’en y a guère avait alors ignoré des millions de manifestants. Les journalistes français ont été bien minables. Washington a également ignoré les manifestations anti-régime car il ne veut pas la fin du régime islamique, mais le départ des mollahs et leur remplacement par ses propres islamistes qui devaient en 1979 prendre le contrôle du pays pour le balkaniser et agiter la région. Tous ont détourné leur regard pour laisser les mollahs massacrer les Iraniens.

Pendant 10 jours, des millions d’Iraniens ont tenu la rue… Le régime parlait alors de la férocité de ses forces de l’ordre, notamment les Bassidjis, mais par la suite nous avons découvert que tous les bassidjis étaient alors en pleine rupture avec le régime. Ce dernier avait d’ailleurs mis en place sa « révolution de couleur » avant que cette rupture ne permette au peuple de faire une révolution. L’absence des Bassidjis dans les répressions est d’ailleurs confirmée par les vidéos de ces journées de soulèvement : on ne voit pas de jeunes miliciens, mais des gens mûrs qui ont été identifiés comme des agents des services de renseignement. Les dirigeants du régime (les membres du Conseil du Discernement dont Moussavi et Karroubi) ont rétabli l’ordre grâce à ceux qui n’ont aucune chance de salut dans un autre régime.

Après avoir sauvé sa peau, le régime a encore et encore tenté d’attirer les Iraniens dans les rues sous la bannière islamiste du Mouvement Vert pour réussir son coup en faisant plébisciter ses héros et ses programmes. Pour parvenir à ses fins, il a caché Moussavi pour tout miser sur Karroubi qui est moins vénéneux, il a utilisé des slogans différents, il a corsé le contenu des récits pour apitoyer les Iraniens. Mais étant donné qu’il agissait ainsi pour continuer à vivre en hors-la-loi sur la scène internationale, il n’a réussi qu’à convaincre ses partisans internes, les Pasdarans, l’armée, le clergé ou encore le Bazar qu’il était le problème. Tour à tour, ces groupes ont rompu avec le régime. Le dernier cataclysme du genre a été la passivité affichée par les Pasdaran le 15 mars dernier lors d’une manifestation nationale hostile au régime.

On peut dire que le régime a été alors de facto réduit à un noyau dur de 130 principaux dirigeants (membres du Conseil de discernement, membres du Conseil des Experts), les gens de leurs clans (fils, petits-fils, frères, neveux, gendres) qui tiennent les divers secteurs économiques, les proches collaborateurs de ces derniers, mais aussi des gens insolvables chargés des prisons, des services de renseignements et des médias. En évaluant, les membres de chaque clan à 50 personnes actives, ce noyau dur qui tient le pays serait au maximum fort de 25,000 membres (20,000 associés+5,000 collaborateurs insolvables).

Ce groupe détient les médias, il peut diffuser des rumeurs pour intimider le peuple ou tenter de relancer le Mouvement vert pour tenter d’orienter l’évolution de la situation vers des réformes, mais il n’a évidemment pas la force de résister à un soulèvement. C’est pourquoi le 15 mars dernier, une partie de ses membres ont paniqué : ils se sont mis à vendre leurs actions pour acheter de l’or et des dollars afin de préparer leur fuite en cas d’un effondrement soudain dû à de nouvelles ruptures.

Le régime a tenté de les calmer avec des menaces, en arrêtant de jouer avec le feu en utilisant le Mouvement Vert ou en inventant un scénario de « coup d’Etat des Pasdaran déviants » en faveur d’Ahmadinejad pour décrédibiliser les Pasdaran dissidents et ainsi empêcher l’union sacrée entre le peuple et les forces armées dissidentes. Mais il n’y est pas parvenu en raison des boycotts successifs des manifestations à caractère islamiste par les Pasdaran, le clergé et les Bazaris et aussi la récente rupture des commandos de la brigade Qods des Pasdaran [1] qui laisse le régime sans défense. Il a finalement renoncé à son scénario de coup d’Etat des Pasdaran en faveur d’Ahmadinejad pour affirmer qu’il avait le soutien des Pasdaran pour mater un soulèvement. Ces hésitations n’ont guère rassuré les membres des fratries au pouvoir : chaque manifestation boycottée a provoqué une forte demande du dollar et la hausse immédiatement de cette devise au point que cette agitation est devenue l’indicateur de la nervosité des derniers partisans du régime.

Ainsi le ratage de la mobilisation pour la journée d’hommage à Khomeiny a provoqué une chute de 10% à la bourse de Téhéran suivie d’une hausse de 11% du dollar sur le marché. Le régime avait promis de punir les coupables. Mais il a aligné ses prix sur le marché libre pour nier toute raison de punir car il n’a pas les moyens de le faire. Par la suite, il a injecté des dollars sur le marché pour baisser le prix : une manière bien coûteuse de nier l’existence d’une crise.

Ce lundi, le dollar est à nouveau monté en flèche, encore de 10%, car la veille, au moment de l’anniversaire du Mouvement Vert, comme au début de cette année après le boycott de l’anniversaire de la révolution par les Pasdaran, personne n’a voulu s’afficher comme un partisan du régime ou du joker censé le sauver.

Le régime (ou ce qu’il en reste) a été forcé de montrer des vidéos de la rue en disant que les passants dont on ne voit pas les visages sont des manifestants et que des vieux policiers, quelques motards mêlés à la circulation sont ses terribles forces de l’ordre. En cumulant toutes les vidéos mises online, on ne dépasse pas 50 porteurs d’uniforme pour la ville de Téhéran qui compte 12 millions d’habitants. Cela se passe du commentaire.
© WWW.IRAN-RESIST.ORG



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Ce dimanche, le régime s’est affaissé encore un peu. Le régime peut encore s’affaisser car son programme de manifestations est très chargé en été. Il a aussi commis des erreurs tactiques. Ainsi dernièrement, il a eu une idée folle : il a tué un champion de foot qui était très populaire, puis il a prétendu qu’il était un partisan du Mouvement vert pour attirer le peuple dans la rue et obtenir le plébiscite qui est censé le sauver.

Cette ruse terrifiante n’a pas fonctionné. Il a compris sa défaite. Il a entrevu l’échec de ce dimanche. Pour faire vivre cette opposition qui reste son seul joker, il a alors franchi un pas dans l’horreur en tuant Haleh Sahabi, un des membres de cette opposition factice, pour qu’elle existe grâce à un martyr à défaut de pouvoir exister grâce à des manifestations.

Nous avions alors prédit qu’il recommencerait et tuerait d’autres gens de la même espèce : c’est ce qu’il a fait dimanche matin en éliminant Hoda Saber, un islamiste notoire qui l’a toujours bien servi et avait à ce titre intégré le projet de faire plébisciter le régime. La disparition de cet homme chargé de sauver le régime n’a pas fait pleurer les Iraniens. Il n’y a eu aucune manifestation en son honneur, même pas un rassemblement d’autres gens de son espèce sans doute désireux de prendre leur distance car personne ne veut être forcé de mourir en martyr pour que des dirigeants richissimes puissent préserver leur pouvoir.

En résumé, ce dimanche 12 juin, anniversaire de l’opposition officielle (le Mouvement Vert), avec la peur de ses partisans de manifester à visage découvert en sa faveur, la panique de ses alliés et la peur de ses serviteurs de demeurer à ses côtés, le régime a cumulé les défaites. Le régime parle du soutien de Bassidjis pour intimider la rue, mais il est mieux placé que quiconque pour comprendre que c’est fini.

conséquences de cette défaite | Trois événements survenus ces dernières heures laissent entrevoir des plans de sortie pour les dirigeants en particulier les 22 membres du Conseil de Discernement de l’intérêt du Régime (CDIR) qui partagent le pouvoir tout en se haïssant et se battant entre eux pour se voler mutuellement des secteurs économiques ou des charges politiques. Le premier événement est l’annonce de la réactivation du dossier de dissidence de la fille de Rafsandjani (président du CDIR) par Sadegh Larijani (autre membre du CDIR, patron du judicaire) et rival de Rafsandjani. Le label de dissident pour la fille de Rafsandjani équivaut à la recycler en opposante pour lui permettre d’aller vers les opposants et sauver sa tête après la chute du régime. C’est un cadeau du clan Larijani au clan Rafsandjani, une preuve ostentatoire de la réconciliation entre les deux clans qui se disputent la direction du régime, une preuve d’unité des dirigeants rivaux dans le danger.

Le second événement a été l’annonce par le porte-parole du pouvoir judiciaire de l’arrestation des Pasdaran déviants partisans d’un coup d’état en faveur d’Ahmadinejad. Cette annonce fait état de possibles pendaisons des dissidents ou des candidats à la dissidence : l’annonce concerne donc les 20,000 associés et les 5,000 collaborateurs du régime qui sont soit fidèles mais inquiets, soit infidèles et sur le départ.

Le troisième événement a été le changement de la date d’anniversaire du Mouvement Vert du 12 au 15 juin en espérant une possible mobilisation du peuple ce jour pour un ultime essai pour faire plébisciter Moussavi et son programme copie conforme ! les sites du Mouvement Vert ont sorti toutes les photos des faux martyrs du 12 juin et les vraies victimes du 15 juin…

En résumé, le régime parle des troupes qu’il n’a pas pour intimider le peuple, il menace de tuer (on ne sait pas comment) les dissidents pour calmer la dissidence, il tente de rassurer la base en sauvant les dirigeants, le tout pour continuer dans la même voie !

Le dollar a immédiatement augmenté, signe que les 20,000 associés du régime désapprouvent le choix. Le montant de la hausse est resté secret, mais les médias du régime ont annoncé que l’on devrait s’attendre à une hausse de 28 à 50% dans les prochains jours, une manière de préparer l’opinion à ce qui peut être déjà arrivé ou à une plus forte hausse.

Ce dimanche, le régime est entré dans une nouvelle phase : échec de son joker, révolte de ses associés. Reza Pahlavi a été réduit au silence par l’Occident pour que le peuple constate l’absence de tout soutien occidental à un changement de régime et qu‘en se rappelant de son soulèvement avorté du 15 juin, il abandonne la partie.

En fait, ce dimanche, le régime est entré dans une phase critique et son avenir ne dépend que de ses erreurs et la patience de ses 20,000 associés et les 500,000 Pasdaran dissidents. Encore quelques boycotts des Pasdaran et la digue va lâcher. Nous sommes donc à quelques mois de la délivrance si l’Occident ne trouve pas un arrangement avec les bourreaux qu’il a mis en place en 1979 et maintient grâce à des mensonges qui nient notre révolte dans ses journaux, dans les télés et au cinéma.


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| Mots Clefs | Réformateurs & faux dissidents : Le Mouvement Vert |
| Mots Clefs | Resistance : FAUSSE(s) OPPOSITION(s) |

| Mots Clefs | Institutions : Désinformation et fausses rumeurs |
| Mots Clefs | Resistance : Lobby Cinématographique des mollahs |

| Mots Clefs | Resistance : Boycott (du régime ou du Mouvement Vert) |

| Mots Clefs | Résistance : Menace contre le régime |

[1Rupture des commandos de la Brigade Qods. Le régime a été contraint de recruter des mercenaires pour sa sécurité et tente de camoufler l’absence des membres de brigade Qods à ses côtés en diffusant des rumeurs de leur participation aux répressions syriennes ! Les Occidentaux qui ne souhaitent pas admettre l’affaiblissement du régime pour ne pas être obligé d’aider le peuple iranien reprennent les mêmes ragots qui au passage permettent de trouver un bouc émissaire à l’échec compréhensible des Frères Musulmans en Syrie.