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Iran : Rumeurs d’une panne atomique déjà évoquée en 2009
25.11.2010

L’agence de presse américaine AP a fait état cette semaine d’une interruption dans les activités de l’enrichissement nucléaire en Iran. La république islamique a nié en faisant état d’un renforcement de ces activités. Les médias pro-américains ont dénoncé le mensonge des mollahs. Cela ne nous surprend pas : Washington qui a longtemps sanctionné les mollahs pour les forcer à devenir ses alliés ne peut plus les sanctionner car cela pourrait les renverser. Il cherche des moyens pour retarder les nouvelles sanctions à un moment où les mollahs refusent tout apaisement avec les Etats-Unis. C’est une diversion médiatique américaine destinée à l’opinion publique américaine (ou occidentale). C’est une occasion pour nous de dresser un petit historique des relations entre Téhéran et Washington en passant en revue plusieurs exemples d’une désinformation permanente dont on ne parle jamais.



Washington a besoin d’un allié islamique pour prendre le contrôle de l’Asie Centrale aux Russes et aux Chinois. Cet allié doit être écouté des musulmans intégristes : il ne peut s’agir que de la république islamique d’Iran qui se dit le porte-parole de l’islam djihadiste et prête à financer tous les mouvements islamistes au nom de la lutte anti-impérialiste. Cela est inscrit dans la constitution du régime.

Cette union paraît inconcevable à beaucoup. Mais il serait bon de rappeler que les Etats-Unis ont été le premier Etat à reconnaître ce régime à son avènement en 1979. Washington n’était pas animé par une nécessité géopolitique irréaliste : en fait, les membres du gouvernement provisoire de la république islamique naissante faisaient partie de deux formations islamistes qu’ils finançaient depuis 1961, après la création de l’OPEP par le Chah car cet organisme a passé la part gérée par les compagnies pétrolières américaines et Britanniques de 85% à seulement 15%.

En fait, Washington venait de s’offrir un allié interventionniste pour faire éclater la région afin de démanteler l’OPEP, mais aussi pour créer une multitude d’Etats faibles qui auraient besoin de son soutien technico-économique pour extraire leur pétrole.

Mais ces projets géopolitiques ont été contrecarrés par le clergé qui avait aidé cette révolution sans être autorisé à exercer le pouvoir. Les mollahs ont envoyé leurs partisans prendre d’assaut l’ambassade américaine pour extraire les dossiers de financement des ministres au pouvoir contraignant ces faux anti-impérialistes à démissionner. Depuis, Washington sanctionne les mollahs pour les forcer à restituer le pouvoir via une ouverture de son espace politique à ses pions aujourd’hui exilés en Occident. L’objectif étant de récupérer la direction du régime islamiste interventionniste, Washington doit éviter d’accuser irrémédiablement les mollahs et leur interventionnisme, mais aussi d’éviter les sanctions susceptibles de les déstabiliser face à un peuple qui aujourd’hui ne veut plus de l’Islam, ni au pouvoir ni dans sa vie. De fait, Washington doit sans cesse ajuster ses pressions depuis 1980. C’est ce que l’on peut appeler la gestion des sanctions et des accusations. La définition de l’urgence du dossier nucléaire iranien est depuis toujours au centre de cette gestion. La panne annoncée par Washington et niée par les mollahs est un exemple de cette gestion. Mais ce n’est pas la première fois que Washington agit ainsi. La crise nucléaire iranienne est une suite de réajustement de ce genre. Voici quelques exemples .

Il y a 6 ans, l’Etat américain a annoncé que selon les conclusions de l’ensemble de ses services secrets, la bombe nucléaire iranienne était prévue pour l’année suivante alors que les mollahs n’avaient même pas démarré l’exploitation du centre d’enrichissement de Natanz ! Il a alors demandé une mobilisation internationale pour sanctionner les mollahs. Il voulait que tous les pays respectent ses sanctions. En l’absence de mobilisation pour une activité nucléaire inexistante, l’Etat américain alors dirigé par l’administration Bush a dit que l’urgence du dossier iranien était telle qu’il se réservait le droit d’intervenir militairement contre ce pays. Les grandes puissances qui sont les partenaires stratégiques des mollahs ou leurs partenaires commerciaux privilégiés ont alors accepté l’examen du dossier par le Conseil de Sécurité pour mettre un frein à la volonté américaine à peine camouflée d’étendre son hégémonie sur l’Iran. Sur la base de cette caution internationale à ses accusations, Washington a adopté une dizaine de nouvelles sanctions financières contre les mollahs avant de publier en novembre 2007 les nouvelles conclusions de ses services secrets américains, le National Intelligence Estimation ou NIE, qui renvoyaient la naissance de la bombe à une date entre 2010 et 2015. Il a alors formulé via Condoleezza Rice ses premières propositions de dialogue où il était ouvertement question de la possibilité d’une entente.

Les grandes puissances partenaires privilégiées de Téhéran ont alors beaucoup râlé car elles avaient été trompées par Washington qui avait cherché et obtenu leur adhésion officielle à sa guerre d’usure économique pour amener les mollahs à devenir ses alliés. Ces Etats avaient de quoi être inquiets car ils avaient entre leurs mains les résultats alarmants de l’économie iranienne depuis avril 2007. Ces Etats avertis par la faiblesse de l’économie iranienne pensaient que les mollahs plieraient en peu de temps devant le risque de pénurie et de soulèvement populaire fatal à leur régime.

Mais il n’y eut aucune capitulation puisque la moindre réconciliation avec Washington obligerait les mollahs à autoriser le retour en Iran des islamistes proches de Washington qui pourraient en participant à la vie politique prendre le pouvoir de l’intérieur. Les mollahs ont refusé les offres de dialogue malgré les pressions grandissantes en multipliant les provocations pour se rendre impropres au dialogue et aussi pour entraîner Washington dans une escalade afin que le risque d’une guerre susceptible de nuire à l’approvisionnement pétrolier pousse les Américains à reculer ou leurs alliés à intercéder en sa faveur.

En juillet 2008, l’économie iranienne était dans le coma, les mollahs ont augmenté le nombre de leurs provocations. Ce comportement a mis Washington dans un grand embarras car sur la base des informations qu’il avait distribuées, l’Américain moyen avait peur des mollahs et demandait plus de pressions voire la guerre préventive comme actuellement. Mais plus de sanctions étant susceptibles de renverser le régime et une frappe étant plébiscitée à ce moment par le peuple iranien pour neutraliser les milices du régime, Washington devait éviter ces deux options. Washington a alors commencé à nier des progrès balistiques revendiqués par Téhéran comme aujourd’hui avec l’insistance sur la panne des centrifugeuses. Puis, il a annoncé une nouvelle sanction qui était une sanction déjà appliquée : autrement dit, il a rusé avec sa propre opinion. Mais il maintenait la pression générale sur les mollahs. De plus en plus affaiblis par ces sanctions, les mollahs ont donné plus d’ampleur à leurs provocations. Washington a laissé diffuser des opinions évoquant une possible remise en cause des conclusions du rapport NIE 2007 pour intimider les mollahs, mais cela n’est pas arrivé sous Bush. Ce dernier a continué à annoncer des fausses sanctions et jusqu’aux derniers jours avant l’élection présidentielle de novembre 2008 il a envoyé des émissaires à Téhéran pour négocier une entente.

Son successeur, Obama, avait annoncé une nouvelle politique basée sur le dialogue pour calmer le jeu. Peu avant l’installation effective de ce dernier à la Maison Blanche pour mener sa politique de dialogue, Dennis Blair, le nouveau chef du Renseignement américain, a affirmé que l’Iran était en train de mettre au point toutes les composantes d’un programme d’arme nucléaire pour fabriquer une bombe, mais que ses services étaient certains que les mollahs ne cherchaient pas à lancer le processus. Dans le même temps, un rapport semi-officiel a précisé que le régime n’avait pas la quantité nécessaire d’uranium enrichi à 3,5% qui pourrait servir à une bombe une fois enrichi à 90%. Sur la base de ces conclusions qui ne remettaient pas en cause celles de NIE 2007, Obama a décrété une année de pause dans l’application de nouvelles sanctions à un moment où les mollahs étaient à l’agonie. Il a alors commencé à leur faire de nouvelles propositions de dialogue et d’ouverture. Ces propositions ont été rejetées et Téhéran a encore amplifié ses provocations notamment en affirmant qu’il avait amélioré la production de matière nucléaire enrichie. Washington a alors nié cela avant de proposer un échange des stocks iraniens d’uranium faiblement enrichi contre du combustible français pour le réacteur de recherche de l’université de Téhéran qui est justement construit par la France. Il a alors concentré les débats sur cet échange pour faire oublier la poursuite de l’enrichissement par les mollahs qui l’oblige à prendre des mesures susceptibles de les renverser.

Téhéran a participé à ces débats pour affirmer son droit à l’enrichissement à 3,5% puis à 20%. Il a même lancé l’enrichissement à 20% devant des témoins pour faire échouer le projet de réconciliation et son processus de retour de ses ex-alliés de 1979 en Iran. Washington avait contré cette offensive en mettant en doute les capacités de Téhéran de mener à bien ses activités d’enrichissement en raison de difficultés à faire fonctionner ces centrifugeuses ! Dans un rapport rédigé en novembre dernier par le nouveau directeur pro-américain de l’AIEA, on avait alors revu vraiment les conclusions du rapport NIE 2007 en situant la bombe iranienne après l’arrivée en 2011 des centrifugeuses de seconde génération qui auraient les problèmes de fonctionnement ! Puis, en mars 2010, Washington a remis en cause la capacité des mollahs à construire de nouveaux centres d’enrichissement.

Cette semaine, un an après le rapport de l’AIEA sur la panne des centrifugeuses iraniennes, en cette période de fin du mois de novembre (période de détentes propices à fêter le Thanks giving puis préparer Noël), Washington a relancé cette estimation avec une rumeur insistante sur la panne des centrifugeuses de Natanz. Téhéran a reconnu un arrêt d’un jour, mais il a nié la panne : le directeur pro-américain de l’AIEA est alors intervenu personnellement pour confirmer la panne sans aucune autre précision. Les médias occidentaux ont alors surenchéri et la panne est devenue une réalité ! Dans les prochains jours, l’AIEA confirmera les faits dans un nouveau rapport sans doute avec des précisions et des prévisions de retards dans les progrès nucléaires.

Washington élimine ainsi la principale source d’inquiétudes et aussi le principal moyen de provocation des mollahs pour écarter la nécessité de nouvelles sanctions alors que ces derniers ne montrent aucune ouverture, qu’ils s’apprêtent à envenimer l’ambiance avec le procès des deux randonneurs américains ; et surtout à un moment où il y a de fortes chances que le régime tombe en raison de la rupture de soutien des jeunes miliciens et du Bazar. On cherche à démotiver l’opinion occidentale à propos de la nécessité des sanctions.

Cette démobilisation de l’opinion va de pair avec la disparition de nouvelles sur la répression menée par le régime contre les jeunes ou les Bazaris. Par exemple, hier le régime a annoncé une nouvelle amputation pour les intimider, mais en Occident, les médias ont surtout parlé de la vente aux enchères de l’automobile d’Ahmadinejad. C’est un signal au régime qu’on le laisse faire la sale besogne de tuer ses contestataires.

Parallèlement, les Américains ont commencé à promouvoir davantage le Mouvement Vert, la fausse opposition inventée par les mollahs alors que cette opposition virtuelle est hostile à tout apaisement avec eux. C’est un signal que l’on préfère un régime islamique même hostile à un régime laïque qui ne peut être utile aux Etats-Unis. La France et bon nombre de pays qui souffrent de cet islamisme soutiennent néanmoins le maintien des mollahs car ces derniers leur vendent le pétrole à des prix beaucoup plus bas que le marché et achètent avec ces revenus le surplus des produits démodés en Occident. En soutenant le maintien du modèle islamique, ces Etats restent proches de Téhéran, mais aussi proches de Washington.

Au final, cela ne change rien car les mollahs ne cèderont jamais. Il va falloir un jour reparler de la bombe nucléaire iranienne. On entendra peut-être en novembre 2011 ou novembre 2012, 2013 ou 2015 des rumeurs sur le lancement du processus d’assemblage des composants que les mollahs sont studieusement en train de mettre au point !

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Pour en savoir + sur le même sujet :
- Iran : La méthode de contamination de Stuxnet est percée !
- (07.10.2010)

| Mots Clefs | Décideurs : OBAMA |
| Mots Clefs | Enjeux : Apaisement |
| Mots Clefs | Enjeux : Sanctions Ciblées en cours d’application |

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Notes complémentaires à lire impérativement

Il est cependant nécessaire de préciser qu’une bombe nucléaire n’est pas composée d’un fuselage, d’une charge et d’un moteur : une bombe nucléaire est un cocon complexe où doit se dérouler une fission nucléaire d’une durée précise à une altitude précise. Sans la technologie pour le faire, on peut se procurer les composants, on n‘est pas pour autant avancé.

Or, Téhéran n’a pas cette technologie : la preuve est que ses ingénieurs ne peuvent même pas faire démarrer seuls et sans l’assistance du fabricant russe le réacteur civil de la centrale de Bouchehr. Par ailleurs, le régime des mollahs ne dispose pas de vecteurs pour véhiculer une éventuelle bombe nucléaire car d’une part, il ne dispose pas de missiles longue portée et s’il s’en procurait, il ne dispose pas de satellite militaire pour orienter l’engin afin de le soustraire à l’attaque des missiles anti-missiles guidés par des satellites militaires de l’OTAN. Son incapacité à fabriquer un système de DCA moderne fait état de grands retards en matière d’informatique.

Il faut par ailleurs préciser que toutes les grandes nations atomiques et balistiques ne sont pas parties du zéro, mais ont développé leurs activités sur la base de travaux accomplis par les savants allemands de l’ère nazie.
La bombe elle-même a vu le jour aux Etats-Unis avant de faire surface en URSS grâce à l’espionnage (selon la légende officielle). Il est aussi possible de supposer que les Américains l’aient transmise aux Soviétiques pour s"offrir un méchant officiel et ainsi justifier leur politique anti-soviétique. Ce qui est certain est que par la suite les Américains ont transmis leurs savoirs nucléaires aux Français, aux Britanniques et aux Israéliens et les Russes l’ont transmis aux Chinois, puis aux Indiens pour les redresser les uns contre les autres (bien qu’il n’existe pas de documentations précises sur ces transactions inavouables)…

A ce moment-là, personne n’a jamais rien transmis aux Iraniens qui étaient alors dans le camp occidental, mais en conflit avec les Britanniques et les Américains à propos de l’OPEP. Les Britanniques contraient alors le Chah via leurs alliés historiques les mollahs et les Américains en lui refusant des équipements et en finançant leurs propres pions islamo-fédéralistes de Nehzat Azadi et l’OMPI. Ces trois groupes islamistes téléguidés par ces deux pays ont finalement renversé le Chah en 1979.

Comme nous l’avons dit plus haut, les mollahs ont dérobé ce nouveau régime aux Américains qui ont immédiatement adopté un embargo doté de sanctions très dures pour empêcher l’accès des mollahs aux technologies de pointes. N’est-ce pas intéressant ?

La Chine ou la Russie auraient pu passer outre ces sanctions, mais ces sanctions ont mis les mollahs en demeure de parvenir à un accord avec Washington ce qui a empêché les Russes et plus récemment les Chinois de considérer les mollahs comme des alliés fiables. C’est pourquoi ils n’ont jamais transmis le moindre savoir nucléaire ou balistique aux mollahs. D’une part pour ne pas donner à ces derniers la capacité de mieux négocier avec Washington et d’autre part, parce qu’après l’accord, Washington aurait entre les mains des données précises sur leur niveau nucléaire et balistique.

De fait, on peut dire que l’Iran n’a jamais eu accès au savoir faire nucléaire et balistique. N’y ayant jamais eu accès et manquant aujourd’hui de technologies, il est faux de parler de ses capacités nucléaires. On nage en plein fantasme et très loin des rivages de la vérité dans le dossier nucléaire iranien selon les volontés de Washington pour le sanctionner ou pour marquer des pauses. Le régime des mollahs est en revanche un Etat totalitaire et abjecte qui a écrasé les femmes et dépénalisé la pédophilie. Mais Washington et ses larbins ne parlent pas de ces sujets susceptibles de nuire à une entente ou ils en parlent sur un ton de plaisanterie. Les mollahs sont également des terroristes islamiques, mais Washington n’en parle pas non plus car il ne peut pas fustiger un interventionnisme islamiste qui était défendus par ces pions en 1979 et qu’il compte utiliser après avoir repris le contrôle de cette abjection islamiste. La vraie menace est ailleurs qu’à Téhéran.


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article complémentaire (essentiel) :
- Iran : Le Chah et le programme nucléaire iranien
- (1er octobre 2009)

article complémentaire (essentiel) :
- Iran : Obama va atteindre le seuil de l’absurdité
- (22 SEPTEMBRE 2009)

| Mots Clefs | Histoire : Révolution Islamique
(ou coup d’Etat pétrolier américano-britannique)
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