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Iran – Etats-Unis : Préliminaires ratés à la conférence sur l’Afghanistan
03.04.2009

Avant le début de la conférence de La Haye, Washington avait évoqué la possibilité d’une coopération iranienne sous la forme d’une surveillance renforcée de la frontière irano-afghane par les responsables iraniens, une tâche spécifique qui aurait contraint ses responsables à dialoguer avec leurs homologues américains. L’objectif était d’engager les mollahs dans un processus de coopération bilatérale propice à un dialogue et des compromis. Pour éviter de se laisser entraîner, Téhéran a clairement refusé une coopération bilatérale et la limitation de son intervention en Afghanistan : un geste essentiel dans ses relations avec les Etats-Unis. | Décodages |



La limitation du domaine de la coopération à la surveillance de la frontière est un point essentiel du plan proposé par les Etats-Unis. Cette délimitation est à la fois tactique et très pragmatique, les deux aspects sont d’ailleurs entremêlés.

piège tactique | Si le motif invoqué est de combattre le trafic de drogue [1], chacun sait qu’il y a une autre motivation derrière cette fixation sur les frontières. Le ministre hollandais des affaires étrangères, Maxime Verhagen, dont le pays organisait la conférence, l’a d’ailleurs évoqué dans une émission télévisée sur cette conférence : les Talibans reçoivent des armes via l’Iran. En vérité, Téhéran fournit des bombes artisanales iraniennes et des armes russes aux Talibans afin que l’Afghanistan reste instable et impropre à servir de couloir d’accès à l’Asie centrale.

Ainsi Téhéran satisfait son allié russe et met la pression aux Américains pour les inciter à lui accorder des concessions en échange de sa coopération.

Il est donc essentiel pour les Etats-Unis d’obtenir cette coopération (pragmatique) sans rien céder en échange (tactique). Cela leur permet d’avoir également un droit de regard sur la frontière irano-afghane et donc sur le territoire iranien (pragmatique). Pour finir, cette mission commune de surveillance (politiquement correcte car anti-drogue) impose des échanges entre les responsables iraniens et leurs homologues américains (tactique) et elle engage les responsables iraniens dans un processus de dialogue et de compromis, tout en leur refusant un rôle en Afghanistan qui soit au-delà du territoire iranien !

Aucun pays ne peut refuser une initiative anti-narco trafique. Téhéran a donc dit oui, tout en cherchant des moyens pour sortir de ce piège tactique politiquement correct conçu pour l’engager dans le processus de dialogue et de compromis.

réponse iranienne | Pour y parvenir, Téhéran a choisi l’offensive en critiquant le rôle central des Etats présents avec leurs soldats, pour proposer en échange une coopération régionale sous l’égide des Nations Unies. Au passage, il a affirmé qu’il souhaitait être un des piliers de cette coopération régionale en prenant part à la rénovation des infrastructures en Afghanistan à ses propres frais. Téhéran a proposé de construire des routes, des écoles ou des barrages. Cela revient à une présence physique des entreprises iraniennes de construction en Afghanistan, entreprises qui comme par hasard sont dirigées par les Pasdaran.

Pour faire venir les mollahs à cette conférence et les engager dans un processus de coopération bilatérale très limitée, Washington a dû demander à ses alliés régionaux, le Pakistan, le Qatar, la Turquie, et l’Afghanistan de saluer la justesse des politiques régionales des mollahs. Ces derniers en ont profité pour exiger un rôle régional au-delà des limites fixées par les Américains, un rôle qui est en plus conforme aux discours tenus par les Américains, les Européens et l’ONU.

Décodages | Cependant, il convient de préciser que l’objectif n’était pas expressément d’installer les Pasdaran en Afghanistan pour y développer des partis sur le modèle du Hezbollah ou du Hamas car la constitution afghane interdit les partis idéologiques. Les mollahs ont agi ainsi pour contredire les Américains et les provoquer. Cela a d’ailleurs fonctionné puisque Washington n’a pas osé relever la fronde, pour ne pas ruiner ses efforts de dialogue et il a même fait le premier pas en direction des mollahs.

En fait, en refusant les limites américaines à La Haye, les mollahs ont tout simplement délimité les véritables ambitions américaines à leur encontre (dialogue, compromis et capitulation) et repris la main dans ces approches préliminaires dont l’enjeu est de trouver le consensus de base pour faire démarrer les négociations officielles en vue d’un accord officiel.

Les médias occidentaux ont tort de parler de dégel qui pourrait déboucher sur un dialogue. Les deux Etats se parlent indirectement via ces approches : les négociations ont déjà commencé, elles sont en cours, elles piétinent et peuvent échouer faute d’un consensus de base, sans avoir quitté le stade de ces papillonnements préliminaires qui passent pour anodins aux yeux des journalistes occidentaux.

© WWW.IRAN-RESIST.ORG
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Les dernières évolutions des préliminaires | A la Haye, après leur discours de refus, les mollahs s’attendaient à un pas en avant des Américains, pas apparenté à une défaite sur le terrain afghan. Mais, pour éviter toute friction, les Américains ont évité ce sujet et ont axé la rencontre sur un sujet anodin et apolitique (non lié à l’Afghanistan), ils ont ainsi involontairement frôlé le concept du dialogue élargi, synonyme de la disponibilité de l’Iran pour des compromis.
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Au revoir ! | De ce fait, la poignée de main entre le représentant des mollahs et celui des Etats-Unis devenait un pas en avant de Téhéran ! Ce qui a déclenché les démentis en rafale des mollahs qui ont nié tout rencontre ou discussion hors sujet (Afghanistan). Désireux de ne pas rompre ces préliminaires, dès le lendemain des démentis, le jeudi 2 avril, Washington s’est écrasé en faisant savoir qu’il n’y avait pas eu de dialogue, mais un simple « bonjour » ! La veille Téhéran avait fait part de son « au revoir » (disponibilité pour des rencontres sur invitation reconnaissant le rôle régional de l’Iran)…

Les préliminaires continuent.

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| Mots Clefs | Institutions : Diplomatie (selon les mollahs) |

| Mots Clefs | Décideurs : Hillary Clinton |
| Mots Clefs | Enjeux : Rétablir les rel. avec les USA & Négociations directes |
| Mots Clefs | Enjeux : Garanties Régionales de Sécurité : le DEAL US |

| Mots Clefs | Zone géopolitique / Sphère d’influence : Afghanistan |

[1Combattre le trafic de drogue | Le sujet de la coopération est doublement mal choisi car ce trafic est un commerce très lucratif pour les mollahs.