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Iran : Les caractéristiques de l’ouverture proposée par Obama
30.03.2009

Après avoir réussi à engager les mollahs contre leur gré dans un processus de dialogue, les Etats-Unis annoncent les caractéristiques de ce dialogue via des déclarations émises par David Petraeus, le commandant de leurs forces dans la région, Richard Boucher, le secrétaire d’Etat assistant chargé d’Asie du Sud, Denis McDonough, conseiller adjoint sur les questions de sécurité nationale, et Robert Gates, le secrétaire à la Défense.



Dès son élection, Obama a tendu la main aux mollahs, en évoquant un changement dans la ligne diplomatique des Etats-Unis, un changement qui prenait la forme d’un dialogue direct et sans conditions préalables. Téhéran a refusé cette main tendue car Obama avait renoncé aux conditions préalables fixées par Bush (comme la suspension de l’enrichissement), sans renoncer aux diverses sanctions américaines contre l’Iran. S’il acceptait le dialogue, il lui faudrait faire des compromis unilatéraux puisque les Etats-Unis continueraient à disposer de moyens de pressions sur l’Iran. Téhéran a donc refusé les mains tendues et fuit toute rencontre, ce à quoi Washington a trouvé une parade en l’invitant à une conférence sur l’Afghanistan.

Toujours dans une logique de refus de compromis, les mollahs ont mis leur énergie à contribution pour exiger une invitation afin de marchander leur présence contre un adoucissement de la position américaine. L’Amérique n’a pas cédé et pour faire céder Téhéran, elle a encouragé les voisins de l’Iran à l’appeler à participer au nom de l’attachement affirmé des mollahs à la stabilité régionale.

Les mollahs ont cédé à ces pressions politiquement correctes avec l’arrière-pensée d’accepter le principe des rencontres bilatérales avec les Américains pour en faire un processus long et stérile qui ferait craquer sur le long terme les Américains car ils ont besoin d’une entente rapide avec l’Iran pour accéder à l’Asie Centrale, région clef dont la maîtrise leur permettrait d’affaiblir leurs deux principaux adversaires, la Chine et la Russie.

Ce changement de tactique a influé sur l’approche américaine : Washington a abandonné l’idée d’un dialogue immédiat. Dès l’annonce par l’Iran de sa participation, Obama a dévoilé sa nouvelle stratégie sur l’Afghanistan en annonçant la création d’un groupe de contact incluant l’Iran, la Chine, la Russie et l’Inde. Ainsi Avant le début de la conférence, Téhéran se retrouve par son engagement à y participer embrigadé dans un processus de coopération, de dialogue et de compromis. C’est-à-dire qu’en l’espace de 70 jours, l’administration Obama a réussi à enfermer les mollahs dans un processus de dialogue sans renoncer à ses sanctions dont Téhéran avait exigé la levée comme condition préalable à toute rencontre.

Après avoir piégé ainsi Téhéran, les Etats-Unis ont commencé à dévoiler à petites doses le programme des réjouissances via des déclarations complémentaires du général David Petraeus, le commandant des forces américaines dans la région, Richard Boucher, le secrétaire d’Etat assistant chargé des affaires d’Asie du sud, Denis McDonough, le conseiller adjoint d’Obama sur les questions de sécurité nationale, et Robert Gates, le secrétaire à la Défense américain. Ces déclarations portent sur la durée du dialogue, sa forme et l’attitude observée par les Etats-Unis. Tout indique des mécanismes pour empêcher toutes formes de marchandages par Téhéran.

La première de ces déclarations a été faite par Richard Boucher, le secrétaire d’Etat assistant américain chargé des affaires d’Asie du Sud après l’annonce d’Obama. Boucher a fait savoir que les Etats-Unis avaient demandé à l’Iran de jouer « un rôle constructif », mais qu’il n’y avait pas de « programme de dialogue », tout en précisant : « nous le déciderons, à un moment approprié ». Pas de dialogue équivaut à zéro marchandage. En fait, les Etats-Unis ont uniquement ouvert un canal de dialogue.

La seconde déclaration importante est celle du secrétaire à la Défense américain Robert Gates qui sur Fox News a précisé que la diplomatie ne saurait être efficace contre l’Iran sans des sanctions économiques. « La diplomatie peut-être, s’il y a suffisamment de pression économique contre l’Iran », a déclaré Gates en précisant que la diplomatie ouvrait « une porte dans laquelle (les Iraniens) peuvent s’engouffrer s’ils changent de politique ». Ce qui veut dire : on maintient les sanctions et on laisse une porte ouverte. C’est sensiblement la même chose que sous Bush, mais avec le canal de dialogue ouvert par la nouvelle administration.

La troisième déclaration importante est celle du général David Petraeus, le commandement régional en charge de la guerre en Irak, en Afghanistan mais aussi des opérations aux frontière de l’Iran dans le Golfe : « Nous pensons que de ce point de vue (de l’enrichissement) il leur faudra une paire d’années, cela pourrait être un peu plus ou un petit peu moins ». En d’autres termes, après avoir ouvert un canal de liaison et annoncé de possibles nouvelles sanctions, les Etats-unis annoncent le délai (plus ou moins deux ans).

Mais ce n’est pas tout : Washington se réserve le droit de siffler la fin de la partie à la place de l’arbitre qui est l’AIEA ou l’Iran qui peut avoir envie d’amplifier la crise pour obtenir une entente multilatérale avec les Six. Une fois encore, on reste dans la ligne tracée sous Bush où les Etats-Unis entendent avoir une maîtrise totale de la gestion de la crise avec l’Iran : gestion des délais, gestion des sanctions et à présent celle des initiatives du dialogue.

Cependant, il y a une ombre à ce tableau : le premier pas doit être fait par les mollahs qui ont du mal à franchir la porte. La dernière déclaration importante, celle de Denis McDonough, conseiller adjoint d’Obama sur les questions de sécurité nationale, suggère une piste pour permettre aux mollahs d’esquisser un pas vers les Etats-Unis. Ce sera officiellement une coopération pour endiguer le trafic de drogue : « Notre constat, et nous pensons que c’est le leur, est qu’il y a des terrains, comme par exemple celui de la drogue, sur lesquels les Iraniens peuvent s’engager en Afghanistan de manière à répondre à une préoccupation que nous partageons aussi »…

La porte est donc ouverte. Mais comme a dit Petraeus, « il y a beaucoup de choses qui se passent en Iran sur lesquelles nous ne savons rien » ! Cela veut dire que les Etats-Unis pourraient découvrir de bien vilaines choses sur les intentions des mollahs si ces derniers ne montraient aucune bonne volonté pour franchir cette porte.


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article complémentaire :
-  Iran-Obama : Opérations de charme et sanctions très sévères
- (5 MARS 2009)

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- Iran : La Russie attend le bon moment pour livrer les S-300
- (23 MARS 2009)

| Mots Clefs | Décideurs : OBAMA |
| Mots Clefs | Décideurs : Robert Gates |
| Mots Clefs | Enjeux : Rétablir les rel. avec les USA & Négociations directes |

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