Depuis le début du Mouvement Vert et des manifestations de l’été dernier qui étaient toutes filmées, jamais personne n’a vu Mir Hossein Moussavi marchant à la tête d’une manifestation géante ou même d’un quelconque cortège. En revanche, ce membre permanent du Conseil de Discernement de l’intérêt du régime qui joue à l’opposant éploré est venu se greffer à deux reprises à des manifestations existantes (les 15 et 18 juin). Dans les deux cas, Moussavi est arrivé entouré de ses gardes du corps par un chemin magique pour faire de courts speech, avant de disparaître par le même chemin magique, téléporté au-delà de la foule. Si on le voit une dizaine de secondes sur 30 minutes de vidéo du 15 juin (qui est sa seule apparition en public, il n’y a rien de visible ou d’audible sur sa supposée prestation du 18). Cette absence de vidéos et de sons exploitables tient au fait que dès le 15 juin, la foule était hostile au régime. Elle n’était pas là pour le Mouvement Vert qui adore Khomeiny, mais pour changer le régime.

Les images du 15 juin ne sont pas vertes, les Verts y font de l’incruste chromatique pour s’approprier la Manifestation. Le grand rassemblement du 18 juin qui correspond à la dernière apparition publique de Moussavi où l’on ne le voit finalement pas a été marqué par la reprise en chœur par la foule de l’hymne national de l’époque impériale. Sur les seules images de ce rassemblement, les Verts font encore une fois de la résistance devant une foule sans couleur.

Il est important de préciser que la veille, le 17 juin, on avait crié « Mort à la république islamique » dans les rues de Téhéran. Le 17 juin au soir, pour récupérer le Mouvement, Moussavi avait donné « rendez-vous aux Iraniens le 18 dans les mosquées de la ville pour des manifestations pacifiques ou des cérémonies religieuses », mais la foule avait préféré de se réunir sur l’ancienne place d’armes de Téhéran, là où exactement 100 ans plus tôt, en août 1909, les constitutionnalistes avaient pendu l’ayatollah Fazlollah Nouri, le mollah qui fut l’inspirateur de Khomeiny. Le soir même de cette sortie dont il n’existe pas de traces vidéos, Moussavi avait publié une lettre ouverte adressée au Guide Suprême dans le journal, République Islamique, dont il avait été le directeur, pour demander que l’« on ne le compte pas parmi ces voyous contre-révolutionnaires qu’il fallait châtier de la plus dure manière ».

Ce soir-là le Mouvement Vert qui n’avait jamais pu mobiliser sur ses propres slogans est devenu de l’histoire ancienne pour nos compatriotes (c’est d’ailleurs ce qu’ils ne cessent de nous dire dans les messages qui nous parviennent). Le 20 juin, on a atteint l’apothéose de la résistance au régime puisque la ville a été ensanglantée, mais les Iraniens n’ont vu ni Moussavi, ni son Sancho Pansa Karroubi, également membre à vie du Conseil de Discernement. On les a alors entendus parler d’obstacles physiques posés sur leur chemin les empêchant de se joindre à leurs partisans ! Il aurait pourtant été simple de parler aux manifestants (qui n’étaient pas leurs partisans) via des enregistrements ou des téléphones portables. Cela a été évité pour la même raison que l’on ne retrouve pas de vidéo des deux discours en public de Moussavi au milieu des foules hostiles au régime. Les hués et les sifflets, voire ce que Moussavi et Karroubi appellent des slogans déviants qui les auraient obligés à tomber le masque.

En l’absence d’une possibilité d’être présents physiquement dans une foule sur des images pourvues de son de peur d’interférences contre-révolutionnaires, les deux hommes sont devenus les acteurs de mises en scène médiatiques pour exister dans l’actualité. L’une de ces mises en scène a été l’annonce le 8 décembre de la séquestration de Moussavi dans ses bureaux de l’université de Téhéran par 17 miliciens. La veille, tous les médias y compris ceux du régime avaient évoqué des rassemblements monstrueux à l’université de Téhéran en sa faveur. Où étaient donc passés ces partisans ou encore les 10 millions d’électeurs qui sont censés avoir voté pour Moussavi à Téhéran ? Cette fausse affaire de séquestration a montré clairement que le Mouvement Vert et Moussavi n’avaient pas les partisans que l’on leur prête. Ce que l’on peut d’ailleurs constater sur les images de leurs manifestations : il y a à chaque fois des rassemblements de 100 à 3000 personnes dans une université qui compte 180,000 étudiants et une ville qui compte 15 millions d’habitants.

Alors qu’il n’y a que des preuves de l’absence d’un soutien populaire et que cet été les Iraniens ont crié « Mort à la république islamique » ou chanté l’hymne national considéré comme contre-révolutionnaire par le régime des mollahs, les Etats occidentaux ne parlent que du Mouvement Vert ou encore de Moussavi et Karroubi comme des opposants. Les intérêts de ces Etats et le risque qu’ils passent à la trappe avec un changement de régime sont pour beaucoup dans ce déni occidental de la réalité. Mais en agissant ainsi ces Etats ont depuis juin dernier aidé le régime à promouvoir un machin créé pour donner une couleur démocratique au rejet de tout compromis avec l’Occident, ce qui rendra les relations très difficiles avec ce régime aux intonations terroristes.

Si le peuple iranien avait adhéré à ce Mouvement, si les jeunes n’avaient pas contraint ses leaders à devenir plus discrets par peur des sifflets, les Occidentaux auraient été mal. Mais malgré des slogans délibérément ambigus et très trompeurs du Mouvement Vert, les Iraniens ont fait preuve d’une maturité incroyable en boycottant ce machin, conscients qu’il allait renforcer le régime.

Face à ce boycott qui le privait d’une victoire sur les Occidentaux, le régime a fait ce qu’il avait fait face aux sifflets destinés à Moussavi : il a organisé une vie parallèle dans une dimension virtuelle pour Moussavi ou Karroubi, les deux héros interchangeable de son scénario de fausse révolution de couleur pro-islam. Dans cette vie parallèle, à des dates uniquement en rapport avec le triomphe des Islamistes en Iran, les deux hommes appellent à des manifestations, le régime annonce un dispositif anti-rassemblement et les deux hommes se désistent en évoquant des obstacles, afin d’expliquer leur absence dans la rue pendant ces journées vertes.

Cette fois, la date étant la plus emblématique du calendrier révolutionnaire, on a ajouté un discours politique virulent pour compenser l’appel qui ne donnera lieu à aucune manifestation ou présence physique des deux hommes parmi leurs soi-disant partisans. Ce discours a été évidemment contre le vrai ennemi du régime : le désir du peuple d’effacer cette révolution de malheur pour renouer avec une monarchie sociale et laïque qui le protégerait contre ce démon à turban qu’il ne connaissait pas, mais a appris à connaître durant ces 30 dernières années.

Si dans les 6 derniers mois, les Occidentaux ont toujours aidé ce Mouvement faux et sans succès, il serait plus réaliste pour leurs propres intérêts au Liban, en Palestine, en Irak ou en Afghanistan ou encore au Yémen de cesser d’aider ce faux-semblant créé pour légitimer les mollahs terroristes.

© WWW.IRAN-RESIST.ORG
Pour en savoir + :
 Iran : L’histoire secrète du Mouvement Vert
 (30 DÉCEMBRE 2009)