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Iran-sanctions : Nouvelle tentative ratée de Washington
05.03.2010

La journée d’hier a été marquée par une forte agitation autour du thème des sanctions contre Téhéran au Conseil de Sécurité. Des dizaines de dépêches des agences occidentales ont rapporté d’heure en heure l’évolution des efforts entrepris par Washington et l’opposition affichée par d’autres pays comme la Chine ou le Brésil. Vu sous cet angle, cela donnait l’impression d’une cause perdue, mais la vue était différente depuis Téhéran car les sections persanes de ces mêmes agences diffusaient des rumeurs anxiogènes sur le contenu exact d’une résolution en préparation...



Tout au long de l’année 2009, Washington a sanctionné les mollahs et promis d’alourdir les sanctions unilatérales de sa guerre d’usure économique à leur encontre si ces derniers refusaient son offre d’entente bilatérale. Il a agi ainsi car il a besoin des mollahs pour soulever les Ouïgours, musulmans chinois de la très riche région chinoise du Xinjiang, afin de priver la Chine de ses ressources énergétiques et minières, mais aussi la fâcher avec les pays musulmans de l’Asie Centrale qui lui fournissent du gaz. En face, malgré les morsures de la guerre d’usure de Washington, les mollahs ont toujours refusé cette proposition car une entente les obligerait à autoriser le retour en Iran des opposants proches de Washington, intrus qui pourraient prendre le pouvoir au sein de leur régime.

En octobre dernier, Washington a réalisé que cette nouvelle année de sanctions avait définitivement affaibli ses futurs alliés utiles et qu’il ne pouvait plus envisager un renforcement de sa guerre d’usure car cela provoquerait un fort mécontentement populaire entraînant la chute du régime qui au vu de son impopularité céderait sa place à un état laïque bien inutile pour les projets américains chez les Ouïgours. Washington ne pouvait qu’envisager le maintien de ses actuelles sanctions qui privent Téhéran de devises, un point c’est tout.

Washington a alors oublié ses menaces de nouvelles et très fortes sanctions unilatérales pour exiger des sanctions onusiennes adoptées à l’unanimité. C’est alors que l’on a pour la première fois entendu parler d’une opposition du Brésil à toute nouvelle sanction « en raison de bonnes relations commerciales avec l’Iran », un argument bien fallacieux car le partenariat avec l’Iran ne figure dans aucun tableau d’honneur brésilien, en revanche, chacun sait que le principal client, mais aussi le principal fournisseur du Brésil sont les Etats-Unis [1].

Avec ce scénario Brésilien [2], Washington a évité ce qu’il ne voulait pas (faire chuter le régime), mais il s’est retrouvé avec un autre scénario indésirable de zéro nouvelle pression. Il s’est alors engagé dans une politique d’intimidations très réalistes laissant supposer un revirement de sa position globale vis-à-vis de ce régime. Cela s’est matérialisé par des rumeurs évoquant la révision de son rapport de l’année 2007 sur l’état des progrès nucléaires iraniens, une révision qui l’obligerait à adopter des sanctions très dures annonciatrices de la fin des projets d’entente avec les mollahs. Téhéran n’a pas cédé à la panique car cette révision en elle-même est loin et ils pourraient reculer ponctuellement face aux Etats-Unis si cela se présentait.

La rumeur est revenue trois mois plus tard vers le 19 janvier 2010. Les mollahs l’ont ignoré. Washington a retenté le même coup le 19 février, mais cette fois dans une version plus officielle via l’AIEA qui a accusé Téhéran de développer d’ogives nucléaires. Les mollahs n’ont pas cédé car ils ne le peuvent pas et pour contrer le guerre d’usure latente, ils ont même commencé à aligner les provocations nucléaires pour engager Washington dans une escalade susceptible de déboucher rapidement sur une guerre afin que par peur d’une menace sur leur approvisionnement pétrolier, les Européens paniquent et demandent à Washington de cesser ses pressions.

Washington s’est retrouvé en porte-à-faux car il ne pouvait pas aller au-delà de l’intimidation du moins pas pour l’instant. Il a donc réactivé son scénario brésilien. Pour ne pas avoir l’air trop ridicule devant des mollahs désormais très sûrs d’eux, il a tenté un bluff avec des rumeurs très réalistes sur des sanctions très précises d’une résolution en préparation. C’est la raison du ramdam de cette semaine.

Les rumeurs diffusées par la section iranienne de la radio allemande (Deutsche Welle) faisaient état d’un « consensus sur une résolution à minima comportant des sérieuses pénalités comme des restrictions en matière de transport maritime ou encore des sanctions contre les Pasdaran, les banques, les compagnies d’assurance ». Pour fignoler le côté réaliste, il y était prétendu que la France avait proposé « des sanctions sur les revenus pétroliers car ils servent selon elle à financer le programme nucléaire, mais la proposition avait été repoussée par la Grande-Bretagne, les Etats-Unis et l’Allemagne pour obtenir l’adhésion des Chinois et des Russes ! » Et enfin, on laissait entendre que les sanctions pouvaient « s’étendre à un gel des avoirs personnels des mollahs », un sujet très sensible… C’est peut-être le défaut de ces rumeurs car un tel gel pousserait les mollahs à basculer dans le giron sino-russe. C’est pourquoi, toujours au rayon réalisme ou pour éviter que Téhéran mène son enquête, les rumeurs parlaient d’une « absence de réaction de la Chine, attitude présentée comme le signe d’un oui chinois ».

Téhéran n’a pas cédé à la panique peut-être parce que le piler central de la rumeur, la France, a d’importants intérêts pétroliers en Iran et qu’elle s’est toujours opposée jusque-là à toute sanction dans ce domaine.

Le soufflet est tombé en fin de soirée avec l’annonce de Vitali Tchourkine, délégué permanent russe auprès des Nations unies : « l’Onu n’a pas encore décidé d’entamer la mise au point d’une nouvelle résolution du Conseil de sécurité sur des sanctions contre l’Iran ».

Washington devra trouver autre chose pour avoir l’air plus réaliste.

© WWW.IRAN-RESIST.ORG
Pour en savoir + :
-  Iran : Un nouveau format de sanctions
- (3 mars 2010)

Pour en savoir + :
- Obama - Iran : Apaisement et embarras
- (18 JANVIER 2010)

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En savoir + sur l’entente avec les mollahs :
- Iran : Obama va atteindre le seuil de l’absurdité
- (22 SEPTEMBRE 2009)

| Mots Clefs | Décideurs : OBAMA |
| Mots Clefs | Enjeux : Sanctions (du Conseil de Sécurité) |

| Mots Clefs | Décideurs : Brésil (Lula ou Amorim) |

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[2Le scénario Brésilien : Le procédé de faire appel à un allié pour empêcher une escalade susceptible de renverser les mollahs n’est pas nouveau. Sous Bush, ce rôle du frein à main de Washington était joué par les Européens en particulier la France qui exigeait des « sanctions au Conseil de Sécurité adoptées à l’unanimité ». Cette exigence avait rassuré les Chinois et permis le transfert du dossier nucléaire iranien au Conseil de Sécurité, ce qui a permis à Washington de légitimer le principe de sanctions contre Téhéran. En récompense à ce rôle caché, en 2007, Washington a fermé les yeux sur la signature d’un important contrat gazier entre EDF et les mollahs via Edison la filiale italienne d’EDF.