Iran : La semaine en images n°102 31.01.2010 C’est une semaine avec des morts, des victimes vites oubliées par les médias officiels et officiellement dissidents car les uns étaient la preuve d’un manque de compétence du régime et les autres, la preuve de son cynisme. Les Iraniens observent ce spectacle avec désolation et prennent chaque jour leur distance avec ce régime notamment en boycottant des évènements qu’il organise pour montrer sa vitalité, dans une totale indifférence pour ce rejet. On peut comparer la scène à un chariot lancé sans frein sur ses montagnes russes qui passe avec indifférence et fureur devant des spectateurs qui attendent le déraillement avec impatience et crainte. (vous pouvez cliquer puis zoomer sur les images pour les agrandir une ou deux fois) L’erreur humaine | Le premier événement de la semaine qui a justement été le déraillement d’un train, survenu samedi (premier jour de la semaine iranienne), est un bon exemple de l’indifférence du pouvoir. Le chemin de fer iranien est dans un état critique. Les voies créées il y a 72 ans n’ont pas été entretenues dans les trente dernières années et les portions créées de toutes pièces dans les années récentes sont de très pauvre qualité. L’exemple qui revient le plus souvent est la voie reliant Chiraz à Ispahan qui a rendu l’âme après le passage du premier train lors de son inauguration (traverses arrachées, rails déformés, boulons éparpillés). Les trains iraniens sont à l’image du réseaux : vieux et mal entretenus. Ils datent généralement d’avant la révolution à l’image du modèle accidenté de samedi dernier : un turbo train à gaz d’origine française. Acheté dans les années 70, cet ancêtre du TGV était alors à la pointe de la technologie, mais il est aujourd’hui une épave roulante. Il y a même des trains encore plus vieux sur le réseau… De fait, ce moyen de transport très vétuste est souvent en panne et réservé aux plus démunis.
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Les photos étaient pourtant explicites : l’avion avait perdu sa dérive et un feu avait détruit la soute arrière du côté gauche, entre l’aile et la dérive…
On est ainsi entré dans une zone de flou total sur les raisons du crash. Par chance, en fin de semaine, le voile a été levé sur le mystère de ce crash : le mollah Al-malhoda, chargé de la prière de vendredi à Machad (ville du crash) a déclaré qu’il était dû au fait que « le pilote a empêché les voyageurs de faire leur prière du matin avant le vol au motif non acceptable de respecter les horaires ». Al-malhoda a été formel, selon ses infos, « s’ils avaient prié, ils seraient actuellement en vie ». © WWW.IRAN-RESIST.ORG
Il y a trois semaines, le régime des mollahs a réalisé qu’il allait manquer très rapidement de devises pour approvisionner le marché intérieur. Craignant des pénuries susceptibles de dégénérer en émeutes, il a annoncé l’entrée en vigueur très rapide de la loi de suppression des subventions qui gardaient les produits de base à des prix très abordables. Il espérait ainsi réduire le pouvoir d’achat des Iraniens pour limiter leur consommation afin d’empêcher les pénuries et d’éventuelles émeutes. Dans notre précédent numéro de la semaine en images consacrée aux évènements d’il y a deux semaines, nous avons évoqué les efforts entrepris par le régime pour justifier cette loi sous prétexte de la lutte contre la surconsommation non écologique des ménages iraniens. On avait par exemple assisté à une semaine d’info axée sur la pollution de l’air à Téhéran pour justifier une importante hausse des prix du carburant. Pendant cette semaine écologique, le régime avait gonflé les chiffres d’infarctus provoqués par la pollution par 2, selon les sources officielles ou encore par 10, selon des sources officieuses. Mais la semaine dernière, tout a changé : le régime a annoncé que l’air de Téhéran était devenu à 100% pur ! En fait, ce n’est pas l’air de Téhéran qui est devenu pur grâce à une journée de pluie, mais l’état des finances des mollahs qui est devenu clair, puisque Washington qui espère une entente stratégique avec eux a pris peur qu’ils ne s’effondrent et leur a accordé un cadeau de 600,000 millions de dollars via un contrat pétrolier irakien. Du coup, le régime a annoncé une possible pause dans l’application de la loi en affirmant que le projet de budget soumis par Ahmadinejad au Parlement (ci-dessous) était « non réaliste et parfois contraire à la loi ! » Du coup, on est passé du débat sur les modalités des critères de libération des prix à des débats sur leur légalité. Ces débats souriants continueront le temps que durera le pactole de 600 millions envoyé par Tonton Barack.
Il y a plusieurs mois, Téhéran a inventé le Mouvement Vert, un courant soi-disant spontané et populaire qui veut le retour aux principes fondateurs de la révolution islamique dont le principal est le rejet des Etats-Unis et des valeurs de l’Occident. Le but de cette création du régime était d’affirmer l’attachement du peuple au refus de tout compromis nucléaire avec les Américains. Mais en raison de ses slogans et surtout de l’identité de ses chefs (Moussavi et Karroubi, deux membres très élevés du régime), ce Mouvement Vert n’a jamais pu mobiliser les Iraniens, malgré les efforts du régime pour réduire l’impact de ses chefs malfamés. On peut à ce titre rappeler la mise à l’écart de ces deux derniers en décembre dernier au profit de Montazéri qui venait de disparaître. Mais à l’occasion des funérailles de ce dernier, la mobilisation annoncée n’a pas été au rendez-vous notamment à Ispahan, ville natale de Montazéri. Il n’y eut également aucune manifestation à Téhéran. Le régime a seulement pu mobiliser les 5000 étudiants en théologie de la ville de Qom, ce qui l’a forcé à avoir recours à des artifices de prise d’images ou des trucages pour gonfler ce nombre dans des documents destinés à Internet. Dans les jours qui avaient suivi, le régime avaient annoncé des rassemblements en faveur de Montazéri pour provoquer des manifestations, mais en l’absence de résultat, il avait abandonné le recours à la figure de Montazéri pour mettre en scène le 27 décembre une mini révolution à Téhéran. Alors que le régime peut à tout moment restreindre l’accès à l’Internet, il laissa les partisans du Mouvement Vert diffuser vers l’extérieur des dizaines de vidéos soi-disant amateurs avant de reconnaître avoir tiré sur le peuple. Le régime espérait susciter la haine comme en juin dernier pour faire bouger les Iraniens. Ces derniers sont restés chez eux, mais les Occidentaux ont condamné le régime pour ces violences. Le régime et son pion Vert (chargé de le valoriser et non le dévaloriser) ont alors mis de côté toute référence à ces morts encombrants et ont orienté leur communication sur la prévision de dizaines de « condamnations à mort des manifestants du 27 décembre pour Moharebeh (lutte contre Dieu) ». Nous avons rappelé cette série d’échecs pour expliquer ce qui donne toute sa valeur à la certitude de pouvoir mobiliser pour la journée emblématique du 11 février, une date symbolique en liaison avec les objectifs du Mouvement Vert . Etant cette fois certain de réussir, au lendemain du contrat irakien de 600 millions de dollars, dans un premier temps, Karroubi a donné de la voix pour rappeler les objectifs du Mouvement Vert. Dans un second temps, le régime a exécuté deux vrais opposants (ci-dessous) arrêtés plusieurs mois avant l’apparition du Mouvement Vert au titre de « manifestants du 27 décembre condamnés à mort pour Moharebeh ».
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Téhéran a beau avoir eu l’idée de dissimuler le manque de participation en délocalisant le centre des activités, le Festival donne lieu chaque année à des projections de films étrangers dans plusieurs salles de cinéma à Téhéran, mais aussi les autres villes du pays. Il est par ailleurs, le moment fort des journées de Fajr, c’est pourquoi le régime a dû y consacrer de nombreux reportages photographiques montrant aussi bien l’intérieur du centre des congrès que les façades de cinéma. Ces reportages sont affligeants : d’une part, des cinéastes en train de répondre à des salles de conférence vides ou encore des couloirs déserts dans la section marché du film et d’autre part des façades de cinéma avec très peu de monde et de rares figurants qui cherchent à dissimuler l’absence de foule en déployant grand ouvert leur programme de films.
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