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Iran : Le juge Mortazavi n’est pas parti !
01.09.2009

Le bureau iranien de l’AFP continue de nous abreuver de fausses nouvelles et de fausses analyses. Ce dimanche, il a annoncé la destitution du sinistre juge Mortazavi, procureur général de Téhéran, sans préciser que ce fidèle tueur du régime avait en fait bénéficié d’une promotion et qu’il occupe désormais le poste clef du 1er adjoint du procureur général de la république islamique d’Iran ! La raison est qu’il ne s’agissait pas d’une vraie info, mais d’une annonce médiatique avec beaucoup d’arrière-pensées. | Décodages |



Tous les médias occidentaux ont consacré depuis hier des pages à la destitution de Mortazavi, le procureur de Téhéran, en précisant qu’il s’agissait de celui « qui avait joué un rôle clé dans les procès de dirigeants et militants réformistes arrêtés après l’élection présidentielle controversée du 12 juin ».
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Or, quand on parle de Saïd Mortazavi, le premier fait marquant qui vient à l’esprit est le viol de Zahra Kazemi, une journaliste irano-canadienne, décédée pendant un interrogatoire très musclé mené par Mortazavi et deux complices. Bizarrement, aucun des médias ou journalistes européens n’a commencé son article par cette affaire sordide, mais en évoquant son « rôle clé dans les procès de dirigeants et militants réformistes arrêtés après l’élection présidentielle controversée du 12 juin ».

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Cette unanimité résulte du fait qu’en octobre 2007, le régime a envoyé le directeur de l’agence iranienne de presse IRNA en Europe pour rencontrer ses homologues européens afin de signer des accords de fourniture d’informations pour la fabrication de leurs dépêches. Depuis, toutes les dépêches européennes sur l’Iran sont des copies conformes de la version officielle du régime.

Cette fois aussi, c’est en conformité avec les attentes de Téhéran que les médias occidentaux ont rédigé leur papier. Le régime souhaite que l’on parle du « procès des dirigeants et militants réformistes arrêtés après l’élection présidentielle controversée du 12 juin ». Il n’y a rien de suicidaire dans cette démarche : l’énoncé oublie de citer les opposants aux mollahs qui se sont soulevés contre le régime du 15 au 25 juin.

En juin dernier, le régime voulait organiser sa propre révolution de couleur en faveur du candidat islamiste modéré Moussavi pour pousser Obama et les Européens à plébisciter sans le vouloir une seconde révolution islamique. Au passage, cela lui aurait permis de faire contester par les Occidentaux la légitimité du président élu Ahmadinejad, ce qui aurait de facto bloqué les négociations avec l’Iran. Les mollahs espéraient ainsi provoquer une crise plus grave afin que par la peur d’une guerre touchant le couloir pétrolier du Golfe Persique, Obama capitule et abandonne ses exigences et ses sanctions.

La révolution de couleur verte a duré 2 jours, les 13 et 14 juin. En l’absence d’une réaction d’Obama, le 15 juin, le régime a appelé à une manifestation géante et contre ses attentes, le peuple sous pression depuis 30 ans est descendu dans la rue mais en mode de soulèvement. Par sa présence pacifique, le peuple a provoqué ce que l’on n’attendait plus : une fissure dans le commandement du corps des Pasdaran, milice créée pour protéger le régime.

Négation et inventions en chaîne | La première réaction du régime a été de nier l’existence de ce soulèvement en interdisant l’accès des journalistes étrangers aux rues iraniennes. Après avoir maté ce soulèvement, cette démarche a changé car le régime a réalisé que le soulèvement n’avait pas été seulement une menace physique, mais aussi la négation de l’existence en Iran d’une démocratie islamique parlementaire avec des islamistes conservateurs et des islamistes modérés soutenus par un peuple islamiste. De fait, la négation du soulèvement s’est vue doublée d’une promotion des « islamistes modérés » du Mouvement Vert.

Exemples | Dans ce cadre au lieu de nier les victimes, Téhéran a commandé des articles à des journalistes lobbyistes comme Delphine Minoui pour resituer les morts du soulèvement à des dates de manifestations du Mouvement Vert (avant le 15 juin ou après le 25 juin). Nous aurons aussi droit bientôt à la version cinématographique de cette supercherie. Téhéran a aussi organisé un procès spectacle pour attribuer les évènements aux Verts… Avec ce procès, on est entré dans une phase d’invention de ses propres « martyrs » célèbres pour faire oublier les images fortes de personnes tuées du 15 au 25 juin comme Neda Agha-Soltan.

Aujourd’hui on ne parle plus de Neda dans les médias du régime, mais d’un certain « Mohsen Ruholamini, jeune réformateur et compagnon du Hezbollah, fils d’un bassidji compagnon de route de la milice irakienne Badr, bon garçon modèle » tué non pas en juin mais en juillet 2009.
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La dépêche concernant Mohsen Ruholamini (ci-dessus) vient d’ailleurs d’être distribuée en Europe. On y parle d’une promesse du Guide Suprême de « châtier les responsables de ce genre de bavures » dans le discours qu’il a fait pour dénoncer une « absence de preuves » dans le procès et les arrestations à l’encontre des partisans du Mouvement Vert.

Destitution de Mortazavi | C’est dans ce cadre très précis de la revalorisation médiatique du Mouvement Vert que le régime a annoncé la destitution symbolique du procureur de Téhéran, le responsable des mauvaises interprétations qui selon le Guide ont provoqué les arrestations et donc les bavures. Téhéran voulait une mesure forte pour relancer les Verts et rien d’autre d’où l’insistance sur le « rôle clé (de Mortazavi) dans les procès de dirigeants et militants réformistes arrêtés après l’élection présidentielle controversée du 12 juin » et pas un mot sur le reste de ses méfaits.

Ce silence était aussi dû au fait que les principaux méfaits de Mortazavi dont le viol de Zahra Kazemi ont eu lieu sous le mandat du modéré Khatami et personne parmi ces soi-disant modérés n’avait protesté, même Shirin Ebadi ! Nobélisée quelques mois plus tard, elle a été contrainte d’accepter l’affaire, mais elle avait alors tout fait pour éliminer les éléments à charge pour nier le viol !

Effet secondaire | La volonté d’exploitation de cette destitution pour faire de la publicité pour le Mouvement Vert a aussi perturbé l’évocation de la promotion de Mortazavi au poste de l’adjoint n°1 du procureur général de la république islamique d’Iran.

En Iran, peu de publicité a été donnée à cette nomination. Des experts liés au régime sont même intervenus pour parler d’une promotion sans valeur, d’un poste sans réels pouvoirs. Chez les Etats partenaires du régime c’est la consternation et l’autocensure. La France a opté pour l’autocensure, mais la Grande-Bretagne (protectrice des mollahs) a préféré l’argument de la promotion sans valeur. En réalité, il n’en est rien.

Les pouvoirs du 1er adjoint | Au sein du régime des mollahs, selon la constitution remaniée en 1989, toutes les décisions politiques dans tous les domaines sont prises par le Conseil de Discernement de l’Intérêt du Régime. De fait, au sein de ce régime, il y a deux types de politiciens : des vrais décideurs réunis au sein du Conseil de Discernement et des figurants qui jouent aux modérés ou aux conservateurs dans les rôles de ministres, président ou députés pour simuler une démocratie islamique parlementaire. Dans ce système particulier, le Conseil de Discernement gère les ministères via les n°2 qui en sont les directeurs exécutifs.

Le régime a retiré le milicien Mortazavi d’un poste clef visible pour le mettre à un poste plus important mais invisible, ce qui veut dire que cet enfant de la région de Rafsandjan est promis à un avenir brillant au sein de ce régime, peut-être un siège au Conseil de Discernement si le peuple n’arrive pas à renverser les mollahs.

Conclusion(s) | En opérant cette destitution médiatique, le régime n’a en fait pas reculé comme le laissent entendre les médias occidentaux manipulés, il a au contraire renforcé ses positions. Il peut continuer à le faire tant que les médias occidentaux joueront le jeu en affirmant que la promotion de Mortazavi est sans valeur ou encore que son successeur Abbas Jaafari Dolat-Abadi (ci-dessous) est un modéré alors qu’il est l’auteur de nombreuses pendaisons de jeunes faussement accusés d’activités indépendantistes dans la région de Khouzestan.
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Cependant, cela ne change rien pour les Iraniens, ils restent gouvernés par des salauds qu’ils connaissent bien. En agissant ainsi, les médias occidentaux ne font que leurrer leurs peuples et leurs propres dirigeants.

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| Mots Clefs | Institutions : Démocratie (médiatico)-Islamique |

| Mots Clefs | Réformateurs & faux dissidents : Le Mouvement Vert |

| Mots Clefs | Institutions : Désinformation et fausses rumeurs |