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Iran : Les chiens de garde veillent !
(de nouveaux éléments historiques inédits ont été ajoutés le 03.01.2011 dans l’analyse axée sur Israël. Voir notamment la 3e note.)

25.12.2010

Face aux sanctions qui le privent de ses revenus en devises pour le menacer de pénuries et d’éventuels soulèvements, le régime des mollahs avaient planifié de supprimer les prix subventionnés afin d’étrangler le pouvoir d’achat et ainsi habituer de force les Iraniens à vivre en état de pénuries. Après moult hésitations, ce samedi, le régime a lancé ce programme qualifié de Grande Chirurgie de l’économie iranienne. On signale de nombreuses protestations dans de nombreux secteurs chez les malades soignés de force par les mollahs, mais les faits ne sont pas signalés dans les médias Européens. Dans le même temps, le FMI (organe contrôlé par les Etats-Unis) parle d’une réforme nécessaire et bénéfique au peuple qui va accroître la popularité du régime ! Encore une fois, l’Europe et les Etats-Unis tournent, chacun à leur manière, le dos au peuple iranien comme lors de son soulèvement en juin 2009. Ils ne veulent pas d’un changement de régime, mais d’un arrangement avec le régime des mollahs.

Tout sauf un changement de régime ! Dans cette optique on pleure à chaudes larmes Jafar Panahi, cinéaste emprisonné car il voulait une république islamiste modérée !



Récemment un de nos lecteurs privilégiés nous a reprochés d’être devenus des auteurs ennuyeux en répétant sans cesse que les islamistes étaient arrivés au pouvoir avec l’aide des Etats-Unis, la Grande-Bretagne et la France. Selon ce lecteur, il est inutile de répéter que la situation a échappé aux Américains car les mollahs, alliés de la Grande-Bretagne, ont chassé les pions islamistes de Washington et qu’en conséquence, ce dernier les sanctionne pour les forcer à restituer le pouvoir à ses pions via une révolution de couleur. Ces critiques sont en fait le résultat d’une sensibilité pro-américaine et pro israélienne et ce lecteur imagine que le monde sera meilleur si Washington contrôlait ces islamistes pour en faire des islamistes modérés. Notre lecteur n’imagine pas que cela puisse nuire à Israël.

Nous pensons le contraire. C’est pourquoi nous avons décidé de reprendre notre analyse sous un angle plus israélien. Le résultat est surprenant et confirme avec plus de précision nos précédentes analyses sur l’utilité de l’islamisme pour Washington et la marginalité de l’intérêt d’un allié comme Israël. Nous dédions ce texte à notre lecteur pro-américain lassé par nos propos répétitifs et à d’autres qui penseraient comme lui.

Ceux qui adhèrent à notre vision peuvent consulter cette analyse plus tard et lire directement les conclusions axées sur l’actualité : la Grande Chirurgie de l’économie iranienne, l’affaire Panahi et les traitements médiatiques inégaux qui leur ont été réservés en Europe et aux Etats-Unis.

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Les Etats-Unis, les islamistes et Israël

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Le point de départ de cette analyse pour nos lecteurs pro israéliens pro-américains est que les Etats-Unis n’ont pas été à l’origine de la création d’Israël. Ce pays a vu le jour sous mandat Britannique dans des territoires musulmans gérés par les Britanniques à un moment où ces derniers contrôlaient le Moyen-Orient, l’Iran et l’Asie en se reposant sur les responsables religieux de ces pays et étaient sur le point de les unir au sein d’une même famille, l’organisation d’inspiration maçonnique des Frères Musulmans qui prône l’Unité islamique [1] contre les non musulmans.

En fait, la Grande-Bretagne était sur le point de créer un bloc homogène pour empêcher ses alliés, d’autres musulmans (comme les Saoud) ou encore les laïques de ces pays d’aller voir la concurrence à savoir les Européens, les Russes (éternels adversaires des Britanniques en Iran et en Asie) ou encore les Américains qui commençaient à monter en puissance après la première guerre mondiale et étaient déjà présents en Iran pour la prospection pétrolière.

Mais la Grande-Bretagne connaissait la fougue de l’islam et son appétit d’expansion. C’est pourquoi après avoir inventé les Frères musulmans pour être ses chiens de garde dans les régions riches en ressources naturelles, il a aussi pensé à leur donner un os à ronger : Israël.

La stratégie pragmatique de l’os à ronger | La Grande-Bretagne avait la certitude que la guerre entre les deux, envenimée par les attentats par des groupes comme le Hamas, lui serait doublement bénéfique car elle donnerait une occupation à la masse musulmane tout en jetant la discorde en Europe qui aurait alors dû prendre le parti des juifs se privant de facto des contrats pétroliers des terres musulmanes. Dans le système britannique, Israël était l’os à ronger. L’Europe était destinée à être un autre os à ronger…

Un chien de plus | Mais ce système n’a jamais vu le jour par la faute des adversaires de la Grande-Bretagne : très rapidement, les Américains se sont emparés de l’Arabie Saoudite qui est devenue l’adversaire de l’organisation des Frères Musulmans alors qu’elles sont toutes les deux partisanes du Wahhabisme, et les Russes ont mis la main sur plusieurs pays de la région dont l’Egypte, le centre névralgique du système islamiste britannique.

Les Britanniques se sont retrouvés avec la minuscule Jordanie comme seule base dans la région, quelques minuscules alliés sur la péninsule arabique, et surtout avec l’Iran comme principal fournisseur de pétrole, mais aussi un accès de choix vers le Caucase et l’Asie Centrale, deux terres riches en hydrocarbures.

Dans sa quête pour devenir le patron du marché pétrolier, la prochaine étape était l’Iran. Les Américains ont soutenu la nationalisation du pétrole iranien pour faire disparaitre l’Anglo-Iranian Oil company. Le projet était défendu par le Shah, alors jeune souverain très populaire, mais les Américains ont préféré soutenir Mossadegh, un politicien issu des Qadjar, hostile aux Pahlavi, entouré d’anti-monarchistes et d’islamistes, car ils espéraient profiter de la crise pour renverser la monarchie par une république islamisante.

Les Américains et le projet Mossadegh | Un des premiers gestes de Mossadegh a été d’annuler la reconnaissance d’Israël par le Chah. Mossadegh a aussi envoyé des émissaires pour nouer des relations avec les Frères Musulmans dans la lutte contre l’existence d’Israël. Washington était ainsi connecté sur le projet initialement britannique. Aujourd’hui encore il continue à espérer une alliance avec les frères Musulmans via le soutien de Human Rights Watch à ses véritables terroristes. Mais ce n’est pas tout. Washington était sur un projet bien plus ambitieux.

Il a également laissé Mossadegh s’allier aux officiers communistes iraniens (eux aussi anti israéliens) pour renforcer la coalition, mais aussi pour impliquer les Russes qui avaient amassé des troupes derrière la frontière irano-russe. Il se donnait ainsi une raison d’intervenir en Iran pour aider la nouvelle république islamisante contre une intervention attendue de l’URSS. Il aurait alors pu disposer d’un allié islamiste qui avait le droit de riposter contre l’URSS en devenant un foyer d’agitation islamique en Asie Centrale.

Grâce aux liens noués avec les Frères Musulmans qui plaident pour l’unité islamique, la république islamique d’Iran pouvait demander l’aide des Frères musulmans et prendre le contrôle de cette organisation pour faire affluer des combattants vers l’Asie Centrale et le Caucase dans le but de déstabiliser l’URSS et créer un chapelet de petits Etats islamiques, chiens de garde des intérêts américains dans des régions pétrolières. Dans ce système, Israël ne pouvait pas demeurer un os à ronger.

Mais les Américains ignoraient alors que les dirigeants du parti communiste iranien étaient des Qadjar hautement liés à la Grande-Bretagne. Seuls, les officiers membres du parti étaient pro Russes. Ce détail a été un facteur d’échec.

En fait, dans ce jeu trouble, les Américains ont réussi à déstabiliser le pays, mais sans obtenir les résultats recherchés.

Cela a permis aux Américains de détruire l’AIOC (qui est devenue BP) et de provoquer une crise où ils sont intervenus comme médiateurs en 1953 pour proposer un contrat avec un consortium regroupant les Britanniques, les Hollandais, les Français et eux-mêmes, consortium où ils allaient avoir autant de part que les Britanniques.

Mais les Américains n’ont pas réussi le volet politique car les dirigeants communistes liés à Londres ont ordonné à leurs membres d’agir avec agressivité afin de faire craindre l’arrivée des Soviétiques. Ceci a fait peur aux mollahs alliés à Mossadegh [2] qui l’ont lâché en appelant leurs partisans populaires à se liguer contre les communistes.

Mais dans le même temps, alors que les troupes soviétiques étaient amassées derrière la frontière iranienne, ces dirigeants communistes liés aux Britanniques n’ont pas ordonné à leurs officiers qui étaient à des postes clefs comme la surveillance des QG à tuer les généraux pour préparer le terrain à l’intervention soviétique. En l’absence d’une action de ces officiers traîtres, le plan américain a échoué et les officiers fidèles ont pu sauver le pays et rétablir une monarchie qui ne convenait pas aux Américains.

Les Etats-Unis et les islamistes dans les années 60-70 | Après l’échec du projet de 1953, Washington a compris la nécessité d’avoir ses propres réseaux, ses propres islamistes.

Les Américains se sont alors intéressés aux islamistes de l’entourage de Mossadegh : Mehdi Bazargan, l’ayatollah Taleghani et Yadollah Sahabi qui avaient formé Nehzat Moghavemat Melli, le Parti de la Résistance Nationale.

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Diverses tentatives de révolution islamique via Bazargan

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En 1957, le Shah a signé un contrat pétrolier très avantageux avec l’Italien Enrico Mattei sur les gisements du sud du pays non alloués au Consortium [3]. Mattei devait aussi développer des gisements gaziers dans la région Caspienne. Le contrat brisait le monopole d’exploitation imposé par les Américains. La même année, alors que ces derniers n’avaient pas encore créé leur réseau de politiciens et d’élus islamistes, ils ont d’abord tenté de renverser la monarchie par un coup d’Etat mené par le général Mohammad-Vali Gharaney, le chef des renseignements de l’armée qui était proche du Nehzat Moghavemat Melli, le Parti de Bazargan.

Le complot a été dénoncé par les services russes et britanniques. Gharaney a été démis de ses fonctions et condamné à 3 ans de prison.

En 1960, le Chah a poussé les autres producteurs de pétrole à créer l’OPEP pour permettre aux pays producteurs de fixer le prix du baril et avoir le choix de leurs clients. Il est alors devenu l’homme à abattre.

En 1961, Washington a tenté un nouveau coup d’Etat par l’intermédiaire du général Teymour Bakhtiar, chef de la Savak, spécialisé dans la guérilla urbaine, qui pouvait compter sur les féodaux, alliés historiques du clergé [4], étant lui-même issu du plus important clan féodal d’Iran.

Ce nouveau complot qui ressemblait à une révolution islamique a été dénoncé par Houshang Ansari, le traducteur de Teymour Bakhtiar, lors de la rencontre de ce dernier à Washington avec John F. Kennedy, son secrétaire d’Etat Dean Rusk et Allen Dulles, le directeur de la CIA à cette époque. Bakhtiar s’est réfugié en Irak chez les Baasistes irakiens qui venaient de renverser les Hachémites, dynastie musulmane placée au pouvoir par les Britanniques.

Après ces deux échecs, Washington a abandonné l’option du coup d’Etat et s’est entièrement focalisé sur Bazargan et ses amis du Parti de la Résistance Nationale. Il les a pleinement pris en charge sous le nom de Nehzat Azadi (Parti de Libération) pour associer l’Islam à la démocratie dans une optique de reversement de la monarchie.

En 1962, le Chah a lancé un référendum populaire sur des réformes judiciaires et sociales : la Révolution Blanche qui devait diminuer l’emprise des religieux sur les lois et leur influence au sein du Parlement. Il est devenu l’homme à abattre en urgence.

En 1963, Les Britanniques ont agité le clergé par l’intermédiaire de Khomeiny qui a lancé une fatwa pour soulever les musulmans contre ces réformes impies. Les Américains ont fait appel à leurs islamistes ainsi qu’à Gharaney et Bakhtiar pour prendre la direction des combats de rue. La révolution a duré 48 heures car l’appel n’a guère été suivi. Le drame dans cet événement, c’est que l’histoire n’a pas retenu l’intervention des pions des Etats-Unis, mais uniquement le nom de Khomeiny.

En 1964, Washington a tenté un remake ou 2nd coup d’Etat avec Gharaney, après sa libération, et aussi avec Nehzat Azadi et l’Ayatollah Hadi Milani qui devait jouer le rôle de Khomeiny. Washington avait également contacté le prince Qadjar Ali Amini, le Premier ministre pro-américain de l’époque pour former rapidement un gouvernement d’union nationale avec les islamistes avant un nouvel échec par manque de participants. Les circonstances de l’échec de cette opération sont imprécises, mais Milani aurait manqué de courage...

Washington a alors changé de direction : en 1965, le parti Nehzat Azadi s’est doté d’une branche armée : les Moudjahiddines du peuple dont les membres se disaient des marxistes islamiques pour animer les combats de rue et aussi jouer un rôle plus ou moins similaire au rôle jadis joué par les officiers communistes.

A la même époque, Mostafa Tchamran, un membre élevé de Nehzat Azadi a aussi été envoyé au Liban pour créer un mouvement chiite de résistance à Israël nommé le Hezbollah pour empiéter sur le domaine des Frères Musulmans.

Pratiquement, au même moment est apparue l’OLP qui était financée par l’Arabie Saoudite (c’est-à-dire par les Etats-Unis) pour s’emparer du conflit israélo-palestinien qui avait été le dada des Frères musulmans. Washington était en train de créer les passerelles pour réussir son coup raté de 1953.

les retrouvailles en 1979 | Face à cette montée en puissance des Etats-Unis en vue d’une mainmise américaine sur l’Asie centrale qui aurait achevé BP, les Britanniques ont fait semblant d’être dupes. En 1973, au moment où le Chah a annoncé son refus de reconduire le contrat pétrolier de 1954 avec le Consortium, ils ont proposé à Washington le projet d’établir une république islamique en Iran comme s’ils ignoraient ses desseins.

Washington a accepté en se disant que les Britanniques voulaient sauver quelques meubles. Il allait les utiliser pour les anéantir.

La révolution a été un succès car les Britanniques ne jouaient plus contre les Américains. Ensemble [5], ils ont affaibli le Chah en l’accusant de crimes inexistants pour justifier le coup.

En coulisse à Paris, les gens de Nehzat Azadi collaboraient avec les gens de Khomeiny. A Téhéran, Shapour Bakhtiar (un ex-de l’AIOC) et cousin pro-britannique de Teymour Bakhtiar oeuvrait pour faire partir le Shah, commandant de l’armée, pour désorganiser la défense de la patrie contre l’agression. Dans le même temps, sur le terrain, les Moudjahiddines, les mollahs et les guérilleros de l’OLP menaient l’agitation pour déclencher les combats.

A l’arrivée, sous la protection des snipers de l’OLP, les pions de Washington qui étaient également présents dans les institutions existantes et avaient les connections, ont pris tous les postes du Gouvernement Provisoire dirigé par Mehdi Bazargan, le premier choix de Washington.

Dans ce contexte, l’autre premier choix de Washington, l’ex-général putschiste Gharaney est devenu le chef des armées de la révolution islamique.

Mais Washington se surestimait car 2 mois après la victoire de la révolution islamique et la prise du pouvoir par un gouvernement à 100% composés de leurs pions de Nehzat Azadi, Rafsandjani (demi-frère de Khomeiny) a formé un groupe terroriste nommé Forghan pour éliminer Gharaney, mais aussi des mollahs susceptibles de prendre la place de Khomeiny.

Les Russes ont éliminé Taleghani, l’ayatollah américain. C’est un vrai roman. Puis deux mois plus tard, ils ont lancé leurs partisans à l’assaut de l’ambassade américaine pour extraire et publier dans une collection de 51 tomes les documents attestant le soutien financier américain au Nehzat Azadi, ridiculisant les islamistes au pouvoir.

L’un des points intéressants de ce retournement de situation est qu’au moment de l’assaut, le personnel diplomatique a détruit les documents, mais ils ont été publiés car selon une rumeur qui court à Téhéran, les traducteurs de l’ambassade américaine étaient trois frères iraniens travaillant pour les Britanniques. Ils leur transmettaient depuis des années les documents. L’assaut n’a été qu’un prétexte.

Washington a alors refusé de quitter l’Iran pour tenter quelque chose avec l’OMPI et d’autres religieux qui leur étaient proches comme Beheshti, le disciple de l’ayatollah Hadi Milani [6]. Les mollahs ont fait exploser le siège de leur parti tuant Beheshti et ils ont accusé l’OMPI pour en finir avec ce groupe armé.

Les mollahs ont aussi parachevé le Hezbollah qui a inauguré son existence en tuant les marines américains et les paras français (tout en épargnant évidemment les militaires Britanniques), avant de prendre systématiquement pour cible Israël avec le soutien des Frères Musulmans, frères britanniques des mollahs. Israël est redevenu l’os à ronger des musulmans partisans des mollahs. Dans le domaine pétrolier, après avoir signé des contrats à long terme (selon certaines rumeurs, un contrat secret attribuant 90% du pétrole iranien à BP), la Grande-Bretagne a laissé des miettes aux autres Européens pour blinder la situation et créer un front anti-américain. Par la suite, elle a accédé à l’Asie Centrale par ce pays...

Une revanche contre la nationalisation de 1953 et les autres coups portés au système islamique conçu par la Grande Bretagne...

Accessoirement, c’est ainsi qu’au cours des dernières décennies, Israël est redevenu l’os à ronger des islamistes comme le Hamas et le Hezbollah, échappant à un tsunami islamique sur la route de la conquête de l’Asie Centrale.

De fait, son salut est surtout dans la chute de ce régime ou au moins dans son maintien tel qu’il est (pour rester dans le rôle ingrat de l’os à ronger des terroristes financés par les mollahs). Il lui faut à tout prix éviter le passage des mollahs sous l’emprise des Etats-Unis comme le plaident les lobbies israéliens aux Etats-Unis qui sont en fait des lobbies animés par des juifs ou des non juifs américains au service des intérêts américains. [7]

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Les conclusions axées sur l’actualité


La Grande Chirurgie de l’économie iranienne & l’affaire Panahi

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Washington qui en février 1979 était sur le point de contrôler le Moyen-Orient, l’Iran, le golfe persique et l’Asie Centrale a presque tout perdu par la faute des mollahs qui ont chassé ses pions de la direction de la république islamique en novembre 1979.

Face à cet échec cuisant, Washington n’a jamais entrepris le moindre effort pour renverser les mollahs, mais il les sanctionne en proposant le dialogue et une normalisation des relations pour pouvoir revenir en Iran avec ses pions et prendre le pouvoir de l’intérieur avec une révolution de couleur afin de disposer de sa république islamiste interventionniste (et non pas modérée) dont il rêve depuis 1953 pour contrôler le monde avec des alliés islamistes. Nous laissons nos lecteurs pro-américains méditer ces faits...

En réponse à ses sanctions et surtout aux sourires de Washington, les mollahs alignent des gestes politiquement incorrects (annonces d’arrestation d’intellectuels, de lapidations) pour saboter le processus de normalisation des relations ou alors multiplient les provocations pour entraîner Washington dans une escalade afin qu’il recule par peur d’une guerre touchant l’artère pétrolière du détroit d’Ormuz car ils redoutent la vengeance américaine.

Washington a toujours esquivé pour ne pas saboter ses chances de normalisation des relations. Il s’est seulement montré de plus en plus menaçant avec des sanctions privant lentement ce pays dépendant de l’étranger de ses revenus en devises afin que la peur des pénuries et de soulèvement pousse les mollahs à coopérer pour au moins échapper à un lynchage.

Mais, chaque fois que les mollahs étaient en difficulté, Washington a autorisé ses alliés à leur venir en aide ponctuellement. Il a ainsi maintenu une guerre d’usure économique à leur encontre sans dépasser les limites favorables à un changement de régime.

C’est pourquoi le patron politique du régime Rafsandjani, un des responsables de l’échec américain, a convaincu les autres mollahs qu’ils ne devaient pas céder car avec le désir d’émancipation anti-islamique des Iraniens, Washington ne pouvait pas prendre le risque de les affaiblir outrageusement. Il a alors consacré ces quatre dernières années à provoquer Washington sans parvenir à l’entraîner dans une escalade.

La Grande Chirurgie | Affaibli par la guerre d’usure économique, en 2008-2009, le régime mené par Rafsandjani a annoncé la Grande Chirurgie de l’économie iranienne. En fait sous les dehors d’une réforme pour répartir équitablement les subventions sous la forme d’allocations uniquement aux plus démunis, le régime allait supprimer les prix subventionnés et accorder des allocations insignifiantes à la population pour étouffer le pouvoir d’achat de tous les Iraniens afin de les habituer à vivre de peu et écarter ainsi le risque de soulèvement en cas d’une pénurie provoquée par Washington.

Mais devant les risques évidents du projet, le régime a seulement supprimé les privilèges de ses miliciens. Il a alors perdu leur soutien. Il a paniqué et a décidé de mettre en scène une fausse révolution de couleur en faveur d’une république islamique modérée, mais partisane de Khomeiny pour éliminer la menace finale de Washington.

En l’absence des miliciens, le peuple a profité de l’occasion pour se soulever. Washington n’a pas aidé ce soulèvement hostile au système islamique, il a laissé les mollahs l’écraser. Mais quand ces derniers ont tenté de relancer leur révolution de couleur, il est intervenu avec ses pions pour parler de la nécessité d’une élection ouverte à tous les Iraniens, c’est-à-dire à ses propres islamistes. Dans le contexte de rupture des miliciens, Rafsandjani ne pouvait plus appliquer son projet économique. Il a opté pour des augmentations graduelles pour une paupérisation graduelle.

Cette paupérisation qui ne touchait pas les dirigeants, mais uniquement la base a provoqué la rupture de tous les miliciens et aussi la rupture des Bazaris ruinés par la perte du pouvoir d’achat des Iraniens. Le Bazar a mené deux grèves très destructrices. Le régime s’est retrouvé sans allié et sans défense avec des ennemis qui le connaissent bien et ont les moyens pour le déstabiliser.

Rafsandjani a été écarté de la direction et son remplaçant, le « modéré » Ali Larijani, a pris ce samedi la décision audacieuse d’appliquer le projet de suppression des subventions en se disant que ça passe ou ça casse, et au final, qu’il pourrait même pousser Washington à craquer.

Seconde grande chirurgie | Parallèlement, avec l’aide de son frère qui tient le ministre de la justice du régime, Ali Larijani a annoncé des arrestations à l’encontre des islamistes modérés pour focaliser les médias sur ses faux opposants qui ne veulent aucun changement de régime, mais la victoire de la pensée Khomeyniste, des gens comme Jafar Panahi ou Nasrine Sotoudeh !

Ces arrestations de modérés ont aussi été un moyen pour faire oublier Sakineh dont la lapidation avait été mise en avant par le régime lui-même pour faire une diversion médiatique au moment de la grande grève du Bazar, puis plus tard pour se diaboliser afin de saboter tout l’apaisement recherché par Washington. Téhéran revient ainsi à un jeu plus classique.

Face à la plus grande crise que connaît le régime, la gestion d’Ali Larijani est assez hétéroclite : le nouveau patron du régime qui a jadis créé et géré les télévisions du Hezbollah a adopté des approches différentes selon ses publics : une politique dure, mais attentiste sur le nucléaire à l’adresse des Six, une approche doublement culottée pour contrer les problèmes socio- économiques iraniens posés par les sanctions américaines et enfin une approche classique de l’image politico-médiatique du régime en Occident.

Dans le cadre de ce dernier volet, Shirin Ebadi qui fait partie des faux opposants du régime et vit à Londres –chez le bienfaiteur du clergé iranien- a pris l’avion la semaine dernière pour être à Genève afin de protester devant l’ONU en faveur de ces victimes des frères Larijani dès que les annonces sont faites.

Le Parlement factice du régime qui est sous la direction de Larijani a appelé à la rupture avec la Grande-Bretagne afin de mettre à l’abri le bienfaiteur britannique…

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Les effets de ces mesures | Les Iraniens n’ont pas aimé la grande chirurgie et ils se sont rendus massivement dans les banques pour retirer leurs avoirs afin d’acheter des biens avant que les prix ne montent encore. Mais étant donné que le projet est d’étouffer le pouvoir d’achat alors que le régime n’a pas de quoi approvisionner le marché, les banques ont refusé de les payer. Elles parlent aussi d’un gel des avoirs bancaires. On évoque aussi le projet de remplacer les allocations par des actions invendables des sociétés qui sont en réalité en faillite.

Dans le centre à Yazd, les agriculteurs ont manifesté devant leur ministère et dans l’ouest à Hamedan, les taxis ont fait grève.

Dans trois grandes villes du sud du pays (Bandar Abbas, Abadan et l’île de Gheshm), la grande chirurgie a provoqué des émeutes pour le pain qui a doublé de prix et il y a eu également des grèves des routiers et des petits transporteurs maritimes.

Tous les Traitements médiatiques | Ces faits qui parlent des difficultés du régime ont été escamotés par les Européens, qui sont des partenaires économiques des mollahs et n’ont aucun intérêt à un changement de régime. Ils se sont focalisés sur Panahi et ont laissé le traitement du sujet économique aux lobbyistes du régime comme l’économiste iranien Fereydoun Khavand et le journaliste Armin Arefi.

Fereydoun Khavand est intervenu sur le blog d’Armin Arefi pour louer le caractère bénéfique de la Grande Chirurgie économique des mollahs. Arefi lui-même a consacré un élogieux article sur cette Grande Chirurgie et a aussi évoqué avec émotion l’arrestation de plusieurs islamistes modérés !

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La réponse américaine | Washington a salué le projet économique du régime comme un projet bénéfique pour les Iraniens. Ses experts du FMI ont dit que le projet était capable d’améliorer le quotidien des Iraniens et assurer la popularité d’Ahmadinejad ! Washington peut ainsi nier l’existence d’un mécontentement qui est une menace certaine pour la survie du régime qu’il veut contrôler. Parallèlement, il continuera sa guerre d’usure économique en espérant un arrangement pour revenir en Iran avec ses pions.

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Au final, sur un plan médiatique, c’est un point positif pour le nouveau patron du régime Ali Larijani. Mais dans la réalité, il est face à l’inconnu avec les Iraniens et nous sommes face à l’inconnu avec les Européens et les Américains qui jouent aux chiens de garde avec un régime qui devait initialement être le chien de garde de leurs intérêts.

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article très complémentaire :
- Iran : Kapuscinski ou l’amnésie internationale
- (8 MAI 2010)

| Mots Clefs | Histoire : Mohammad-Reza Shah (le shah) |

| Mots Clefs | Histoire : Révolution Islamique |
| Mots Clefs | Enjeux : Pétrole & Gaz |
| Mots Clefs | Mots Clefs | Zone géopolitique / Sphère d’influence : Grande-Bretagne |
| Mots Clefs | Histoire : Brzezinski et Carter |

| Mots Clefs | Instituions : Politique Economique des mollahs |
| Mots Clefs | Enjeux : Sanctions Ciblées en cours d’application |

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[1L’idée de l’Unité Islamique a été lancée en 1884 par le franc-maçon islamiste égyptien Muhammad Abduh et son homologue afghan évoluant en Iran et en Turquie : Seyed Jamal-eddin Assad-Abadi, membre de 15 loges maçonniques dont le Grande Orient de France !

[2Cet article annule et remplace plusieurs de nos précédents articles sur les alliances de Mossadegh.

[3L’affaire Mattei | Selon le contrat d’inspiration américaine avec le Consortium, l’Iran avait droit à 50% des bénéfices. Mais cette part était peu élevée car l’Iranian Oil Exploration and Producing Consortium fixait un prix d’achat proche du coût de production ! En définitive, l’Iran percevait peu de revenus et était incapable de développer d’autres gisements de manière indépendante et restait une proie facile pour les grandes compagnies qui formaient le « Consortium » en particulier les Américains qui comptaient sur la haine anti-britannique.

Un an après la signature de cet accord qui était au détriment des intérêts iraniens et très bénéfique aux grandes compagnies américaines, l’italien Enrico Mattei, le créateur de l’ENI, est parti en guerre contre le système établi par ces grandes puissances financières en proposant aux pays producteurs d’extraire leur pétrole à ses frais en leur offrant 50% des bénéfices via une co-entreprise commune.

Ce contrat 50-50 était par avance intéressant car il permettait à tout pays la capacité de développer son propre savoir faire pétrolier pour s’inviter dans le jeu et bénéficier des prix élevés des produits raffinés.

De son côté, la compagnie Eni était loin d’être perdante car elle pouvait ainsi créer un front uni de co-entreprises : une sorte de coopérative internationale faisant d’elle un géant pétrolier. A cette époque, très rapidement, des contacts ont été noués avec le Shah.

Au printemps 1957, le Shah a conclu un accord exceptionnel avec Mattei en créant la société Irano-italienne des Pétroles (SIRIP) qui offrait 75% des bénéfices à l’Iran et 25% à l’Italie pour un contrat de 25 ans pour l’exploitation de quelques 23000 km2 des régions iraniennes non allouées au Consortium dont le le gisement offshore de Bahregan Sar d’une capacité de 90 millions de tonnes (ou 550 millions de barils). La co-entreprise irano-italienne s’intéressait aussi aux gisements gaziers dans le nord du pays.

Ce contrat mettait de facto fin à la dictature du Consortium imaginé par Washington et bousculait les projets américains de contrôle du pétrole iranien. Washington a tenté de renverser le Shah par un coup d’Etat avant la signature définitive du contrat en octobre 1957.

Le choix des Américains a été porté sur Gharaney, un général proche de leurs amis islamistes en Iran pour reprendre le cours du projet islamo-pétrolier de 1953.

Les adversaires Britanniques des Etats-Unis et leurs futures victimes russes ont fait échouer le coup.

Après l’échec du coup, la SIRIP a continué ses activités. Le gisement de Bahregan Sar devait démarrer en 1962 au moment de la création de l’OPEP. Mattei qui aurait pu être un allié de poids pour cette jeune organisation non alignée a été supprimé en cette même année 1962.

[4Dans la tentative via Teymour Bakhtiar, en utilisant les féodaux, alliés historiques des Britanniques, Washington a pris un plus le dessus sur la Grande-Bretagne. Mais cette dernière avait encore une longueur d’avance avec son vaste réseau de milliers de Francs-maçons à tous les niveaux du pouvoir.

[5Zbigniew Brzezinski, conseiller de Carter, siégeait au conseil des directeurs d’Amnesty International, l’ONG britannique qui accusait le Shah de crimes qui se sont avérés inexistants.

[6Hadi Milani est mort en 1974.

[7D’ailleurs, pour le maintien de ce régime (pro-Britannique), Israël soutient pleinement tous les faux modérés du régime ou encore les opposants impopulaires comme l’OMPI. Il ne faut pas confondre cette action avec les soutiens apportés à l’OMPI par les lobbyistes pro-américains comme Daniel Pipes qui n’a aucune compétence en géopolitique.