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Iran : Les habits neufs de l’Empereur Jafar !
20.04.2010

© IRAN-RESIST.ORG – 4 Mars 2010 | L’Iran a annoncé l’arrestation de Jafar Panahi et sa famille à l’issue d’une descente de la milice chez lui pour son soutien à l’opposant Moussavi. On imagine une rafle comme l’Europe en a connu à ses heures les plus sombres sous le nazisme puis sous le communisme, c’est pourquoi la société (française) des réalisateurs de Films (SRF) a apporté son soutien à Panahi. C’est tout à l’honneur de cet organisme, mais il se fourvoie car Moussavi est loin d’être un opposant.



le parcours de Moussavi | Il y a 31 ans, en 1979, il y a une révolution sanglante en Iran. Un an et demi après cet événement, un certain Moussavi a été nommé Premier ministre par l’auteur du bain de sang, Khomeiny. L’Iran était alors en guerre. Moussavi a rendu un immense service à l’équipe dirigeante (le Conseil de guerre présidé par Rafsandjani) en imaginant le Bassidj ou la troupe des volontaires, traduisez : des enfants raflés partout pour être envoyés au front comme chairs à canons ou plus exactement nettoyeurs de champ de mines. La guerre, qui pouvait être finie en peu de temps, a pu ainsi être continuée grâce à cette ingénieuse trouvaille, permettant à l’équipe du Conseil de guerre de s’en mettre plein les poches avec des commissions occultes d’achats d’armements. Quant au peuple, le bon Moussavi leur a offert l’économie à base de rationnement pour réduire au maximum les frais de ses amis révolutionnaires.

En récompense à cette loyauté, en 1989, Moussavi a été intégré par Rafsandjani au Conseil de Discernement, organe plénipotentiaire qui depuis cette date décide toutes les orientations politiques iraniennes mises en œuvre par les divers gouvernements. Par exemple, c’est à eux que l’on doit les choix en matière nucléaire comme l’absence de transparence des infrastructures et des objectifs. Dernièrement en plein tourment de la crise nucléaire, les 23 membres à vie de ce Conseil ont choisi dans leur rang Moussavi et un certain Karroubi, responsable du partage du butin révolutionnaire de 1979, pour incarner l’opposition.

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le nouveau Moussavi | Moussavi et Karroubi ont alors participé aux élections avec des étiquettes de modérés, mais pour exposer des programmes en tout point identique à celui d’Ahmadinejad notamment sur le nucléaire. Il s’agissait en fait de donner un parfum de plébiscite populaire au refus de transparence du programme nucléaire.

On ne peut pas se dire un démocrate comme Panahi et d’autres artistes iraniens et soutenir officiellement ces deux personnages avec un passé noir et des objectifs aussi discutables (en raison des sanctions). Les Iraniens ont été plus vigilants : ils ne sont pas descendus dans la rue en faveur de Moussavi, Karroubi et leur Mouvement Vert. Mais il le fallait pour légitimer l’orientation de la politique nucléaire du régime, c’est pourquoi ces pions du régime ont alors laissé courir la rumeur qu’il y avait de la révolution dans l’air.

Le peuple est alors descendu dans la rue, mais avec des slogans hostiles au régime. Le régime s’est retrouvé avec un soulèvement national, il a tiré.

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Qu’a fait Moussavi ? Ce membre du véritable centre du pouvoir du régime ne pouvait pas cautionner un soulèvement susceptible de renverser son régime. C’est pourquoi au lieu d’écrire aux instances internationales pour dénoncer le sang versé, Moussavi a écrit une lettre ouverte au Guide, chef spirituel du régime, pour l’appeler à faire preuve de plus de fermeté pour casser cette contre-révolution.

Ce plan B pour un dérapage imprévu était néanmoins une grosse gaffe. Moussavi était grillé. Le régime l’a alors retiré du jeu pour mettre Karroubi plus en avant. Mais ce dernier n’a pas pu relever le défi car il n’avait pas condamné les propos gênants de Moussavi. Depuis, l’un et l’autre courent après les Iraniens pour les mobiliser pour légitimer la politique nucléaire du régime.

En l’absence d’une adhésion populaire nécessaire pour l’opération, le régime organise des manifestations dont le nombre des participants n’excède jamais 3000 personnes, payées à la journée, et il diffuse régulièrement des annonces officielles de maltraitances à l’encontre de Moussavi, Karroubi, le Mouvement Vert et leurs partisans. Le régime et ses pions verts ont ainsi évoqué des viols en prison, mais ils ont abandonné cette affaire imaginaire quand l’ONU s’y est intéressée. Karroubi qui était à l’origine de l’annonce aurait perdu les preuves !

Pour prendre moins de risque, on a opté pour des histoires autour des deux leaders du Mouvement Vert. On a ainsi prétendu que 50 miliciens avaient retenu prisonnier Moussavi pendant des heures dans ses bureaux de l’université de Téhéran l’empêchant de quitter les lieux.

A la lecture de cette nouvelle, nous avions émis des doutes quant à son authenticité car selon la légende, 35 millions d’Iraniens ont voté pour Moussavi. Il aurait pu alerter les responsables de son site par téléphone portable pour mobiliser ses partisans, du moins les 80,000 étudiants de l’université de Téhéran, pour une démonstration de force. L’affaire s’est retournée contre ses concepteurs pour devenir la preuve que Moussavi n’avait aucun partisan en dehors des 3000 manifestants payés à la journée qui étaient indisponibles sur le coup.

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le cas de Panahi | Le régime a alors changé la présentation des récits de détentions abusives. Il y eut ainsi la détention de Karroubi à domicile de l’un de ses amis sur un emplacement très isolé et à une heure où il était impossible de mobiliser ses millions de partisans ou ceux de Moussavi.

Dans le cas de Panahi, on a fait encore plus fort car le réalisateur officiellement arrêté par le régime serait retenu dans un lieu inconnu. On croit rêver car le fait que le cinéaste soit détenu à un endroit inconnu n’empêche en rien les supposés millions de partisans de Moussavi de se mobiliser en sa faveur. C’est un phénomène d’Habits neufs de l’Empereur : s’il n’y a pas la moindre mobilisation, c’est tout simplement qu’il n’y a pas de sympathisants.

Un autre point est à signaler. A chaque fois que le régime a annoncé l’une de ces détentions, la personne visée allait avoir une actualité. Dans le cas de Panahi, ce sera « son prochain film destiné au marché occidental sur le soutien populaire à Moussavi ! »

Les réalisateurs français seront bien bêtes s’ils gobent ce très mauvais scénario de promotion d’un film par ailleurs de propagande pour un type qui n’a pas le soutien du peuple.

Il faut cesser de cautionner ces mises en scène du régime et des voyous comme Panahi, auteur d’un cinéma cosmétique très discutable dont nous avons déjà parlé sur ce site car à côté de ces fictions dictées par le régime, il y a un peuple réel avec des problèmes réels et une envie réelle de changement.


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l’actualité de Moussavi :
- Iran : L’AFP a encore sauvé la peau de Moussavi !
- (1er mars 2010)

le cinéma de propagande pro Moussavi (1) :
- Iran : 3 films officiels sur le soulèvement iranien
- (26 août 2009)

le cinéma de propagande pro Moussavi (2) :
- Iran : Les secrets des Chats Persans de Ghobadi
- (23 décembre 2009)

| Mots Clefs | Resistance : Lobby Cinématographique des mollahs |
| Mots Clefs | Institutions : Désinformation et fausses rumeurs |

| Mots Clefs | Réformateurs & faux dissidents : Le Mouvement Vert |
| Mots Clefs | Mollahs & co : Mir-Hossein Moussavi |

| Mots Clefs | Resistance : FAUSSE(s) OPPOSITION(s) |