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Iran : Les bidonvilles fleurissent !

19.07.2022

Selon un ministre du régime, 41 % des Iraniens vivent dans des bidonvilles. Elles sont construites par des responsables du régime criminel des mollahs qui préfère garder les revenus du pays pour eux-mêmes et des proches au lieu de le consacrer au peuple. Le site Hrana et son jounal Peace-Mark, tous deux chargés de la promotion de faux opposants du régime [1], ont fait appel à la journaliste économique connue et politiquement correcte Mariam Shokrani pour évoquer le sujet. Mais elle a omis voire déformé certains détails ce qui in fine minimise le rôle du régime et aussi les risques de soulèvement contre lui. Son article n’est d’ailleurs illustré par aucune photo sinon une femme dans une boucherie alors que une majorité écrasante d’Iraniens ne consomme plus de viande rouge depuis les années 90 ! [2]

Ces omissions sont donc faites délibérément : pour atténuer la gravité de la vie dans les bidonvilles iranienne afin de rassurer ses proches à l’heure où il y a des centaines de manifestations anti-régime chaque jour en Iran [3], que le régime ne pas peut trouver un deal ou encore des alliés stratégiques pour se maintenir. Voici des extraits avec nos commentaires et nos photos d’un texte de désinformation qui révèle surtout l’état d’esprit des dirigeants du régime et de leurs craintes.



Comment vivent les plus pauvres d’Iran ? .
Par Mariam Shokrani

© IRAN-RESIST.ORG
Extrait 1.Fatemeh (Fatima) et six autres personnes vivent dans deux pièces de chacune six mètres carrés avec une courette de quatre mètres carrés. Les chambres sont faites de blocs de ciment couverts d’une fine et grossière couche de plâtre. Le toit est une tôle d’aluminium instable. La petite famille craint qu’un coup de vent la fasse tomber et provoque leur mort.

Note 1. En axant l’article sur la femme, la journaliste efface l’homme (qui est légalement le seul à avoir un travail) et tente de donner une couleur sociétale au problème des bidonvilles et faire oublier l’origine économique de la situation.

Elle évacue l’analyse des chiffres de ce phénomène : 31 % de la population de la capitale vit dans les bidonvilles qui l’entourent (dans le cas présent à Mortezagard, une zone industrielle dédiée à la fabrication de meubles).

Selon le régime, 41 % de la population du pays tout entier vit dans des bidonvilles. Le pourcentage des laissés pour compte est moins élevé à Téhéran que dans le reste du pays. La capitale n’attire plus les déshérités engendrés par le régime. Il est connu qu’on n’y trouve pas de travail. Le chômage réel [4] y est de l’ordre de 85 % des gens en âge de travailler. Les Iraniens des régions ne viennent plus y chercher un job, ils préfèrent rester chez eux où ils ont encore de la famille.

Par ailleurs, la courette est une invention pour laisser supposer une certaine normalité urbaine pour les habitants alors qu’il s’agit de baraques mitoyennes construites sommairement qui n’ont ni eau ni électricité !

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L’absence d’eau courante, d’égout et d’électricité est évoquée avec des détails fictifs pour gommer la gravité des conditions de vie des déshérités et donc leur colère légitime.

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Extrait 2. Chaque matin, sous le soleil, de Qobad, le mari de Fatemeh, attache des bouteilles en plastique à sa moto Honda 125 et se rend à l’usine de pâte de tomate pour y chercher de l’eau. Le propriétaire de l’usine a autorisé Qobad et ses voisins à se rendre à l’usine pour chercher de l’eau.

Note 2. En Iran, seuls les miliciens ont le droit d’avoir des motos en Iran, ce qui signifie que Qobad est certainement membre de la milice. Comme nous l’avons si souvent répété, ce sont les miliciens de base qui ont rompu avec le régime et le mettent en danger en manifestant avec des slogans très hostiles. La journaliste aurait pu ne pas évoquer la moto de Qobad, mais elle l’a fait aussi pour minimiser sa pauvreté, en sous entendant qu’il s’agit d’un milicien. Les habitants des bidonvilles ne lisent pas de journaux. De plus, les articles de la fausse opposition ne sont pas lus par les gens du régime.

On a donc un article qui évoque une population à risque, mais en minimisant le risque supposé (en évoquant la solidarité du chef de l’usine qui est aussi forcément un milicien d’un rang élevé, ou un milicien retraité d’un rang élevé ou un mollah ou encore des partants de ces derniers). Il est dit que le risque de mécontentement aboutissant à une explosion est écarté grâce à la bonté des semi-nantis du régime.

Par ailleurs, la solidarité évoquée par le patron de l’usine alimentaire est une pure fiction, car il serait impossible à cet homme d’assurer les besoins des milliers d’habitants de Mortezgard. Par ailleurs, quelques bouteilles d’eau ne peuvent assurer les besoins alimentaires et d’hygiène d’une famille de 7 personnes.

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Extrait 3. Qobad est homme de ménage chez un fabricant de meubles. Tous les autres membres de la famille travaillent pour aider. Ils hachent des haricots, fabriquent des boîtes-cadeaux, attachent des crochets à des rideaux ou nettoient des légumes et du poisson pour les restaurants à emporter. Leurs gains sont très peu, par exemple 0,1 dollar par kilogramme de fèves. Avec l’ensemble de leurs revenus (environ 2 dollars par jour), ils ne peuvent acheter qu’un pain par jour.

Note 3. Encore une fois de nombreux mensonges. Dans le meilleur des cas, Qobad a un salaire de 30 dollars par mois soit 1 dollar par jour. Les salaires [5] [6] ne sont pas précisés dans l’article (et d’une manière général dans la presse iranienne), car on supposerait que les gens vont bientôt se révolter et tout casser. Par ailleurs, les membres de cette famille qui travaillent durement ont besoin d’une dizaine de pains ce qui correspond à 1/3 de leur revenu.

Mais du fait qu’il n’y a pas de boulangerie dans les bidonvilles, il leur faut prendre les transports en commun qui sont hors de prix en Iran et in fine, ils manqueront d’argent pour ce pain quotidien. Dans le meilleur des cas, ils pourraient consommer un œuf (0,3 dollar l’unité) par personne un jour sur deux.

Mais en réalité, les habitants des bidonvilles et même des logements normaux sont souvent réduits à faire les poubelles des restaurants ou des quartiers riches pour vivre.

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Les mollahs cupides et impitoyables ont dernièrement posé des cadenas à codes sur les poubelles et émis des cartes payantes de 3,5 millions tomans soit 150 dollars par mois pour monnayer l’accès aux poubelles. L’objectif du régime a été de permettre à ses collaborateurs pistonnés, patrons d’usine de recyclage de déchets, d’avoir accès aux poubelles de Téhéran et leurs contenus globaux (2nde image ci-dessous). Selon les médias officiels, leur revenu quotidien est de 300,000 dollars.

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interview d’un intermédiaire des recycleurs du régime.


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Cette mesure prohibitive a évidemment rendu impossible la maraude vitale pour les déshérités. Une infime partie d’entre eux, généralement des enfants d’une dizaine d’années, ont accès aux poubelles en tant qu’ouvriers récolteurs, mais doivent vendre leur récolte aux recycleurs du régime à 25% de son prix (soit un revenu de 1 dollar par jour pour une récolte de 100 kilos) ! Il y a quelques mois, il y avait 14000 enfants travailleurs à Téhéran. En résumé, toujours plus de misère et très très peu à manger pour les déshérités vivant dans les bidonvilles.

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L’auteure qui est une "journaliste économique" du régime ne pouvait pas ignorer ces détails terribles synonymes d’une grosse colère des déshérités et d’une forte envie de changement de régime. Elle les a oubliés délibérément pour duper et rassurer ses lecteurs, affairistes issus du régime, ainsi que les investisseurs européens (notamment les Français) qui sont les derniers amis du régime...

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Extrait 4. Juste à côté de la maison de Fatemeh se trouve la tour à haute tension. Des étiquettes noires et l’image d’un crâne humain sont visibles sur le corps du mât. Qobad a tiré des fils électriques du mât géant jusqu’à sa baraque. Les fils électriques sont maintenus avec des clous et des attaches près du plafond (en taule). L’un a cédé il y a 2 ans et a tué un enfant en bas âge de la famille.

Note 4. Cet accès gratuit à l’électricité est une invention idiote du fait de la d’impossibilité technique de se connecter à un mât à haute tension. Même si cela était aisé, il ne pourrait passer inaperçu en raison de la dimension des bidonvilles. Enfin, l’auteur n’a pas cité l’effet cancérigène de ligne de haute tension sur la population vivant à sa proximité et par la même occasion les problèmes médicaux de ces malheureux. Encore une fois, l’accès à l’électricité est une fiction pour laisser supposer que les déshérités engendrés par le régime ne sont pas dépourvus de tout et ne risquent pas de se révolter et contribuer à la chute du régime.

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Extrait 5. Fatemeh a planté des fleurs rouges et des légumes dans les pneus de voiture usés et pourris et les bidons d’huile rouillés collectés sur le site de recyclage des déchets ; les petits pots alignés devant la maison en disant : C’est bon pour notre humeur. Elle rit et cache rapidement ses gencives édentées sous un foulard noir.

Note 5. La bonne blague des fleurs. Comment les arrose-t-elle ? L’article gomme encore la colère des laissés pour compte pour rassurer les riches du régime afin qu’ils ne laissent pas tomber et ne fuient pas avec leurs magots par peur d’un soulèvement et la chute du régime.

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Extrait 6. La famille de Fatemeh et leurs voisins ne vivent pas gratuitement dans ces baraquements... Ils doivent payer chaque mois un loyer entre un million deux cents et un million six cent mille tomans par mois soit 40 et 55 dollars à un propriétaire profiteur qu’ils n’ont jamais vu. L’ensemble des revenus de la famille ne suffira pas pour payer le loyer et le propriétaire pourrait les expulser à tout moment !

Note 6. Là, il y a des problèmes de cohérence, car si les gens achètent un peu de pain, il ne leur reste rien et ils ne peuvent donc payer aucun loyer. Mais il y a une raison à cette incohérence. Elle n’est pas fortuite et elle se trouve dans la suite de l’article...

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Extrait 7. Selon la loi iranienne, le gouvernement ne fournit pas d’eau, d’électricité et de gaz aux logements informels, à moins que les habitants des cabanes ne vivent dans ces zones pendant longtemps. Le propriétaire en profite alors, expulse les gens pour construire des tours, etc.

Note 7. La loi évoquée est une pure fiction, car le régime ordonne régulièrement la démolition des bidonvilles en les désignant comme constructions sans permis. Ce que la journaliste a désigné comme logements informels. Une loi inexistante et ce fameux loyer sont de pures fictions pour attribuer le problème des bidonvilles à des personnes malveillantes et non au régime lui-même.

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Au passage, l’auteure évacue le rôle du régime dans l’effondrement d’une tour commerciale construite par l’un de ses membres qui a engendré une grosse révolte dans tout le pays.

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Extrait 8. La fille de Fatemeh n’aime pas parler à une journaliste qui a son âge. « Nous ne sommes pas pauvres ! Papa avait beaucoup de terres agricoles et à Aligoudarz, tout le monde le connaît, mais les puits agricoles étaient secs et notre terre a perdu leur prix et nous avons dû venir à Téhéran »

Note 8. Nous avions indiqué plus haut que ce monsieur était certainement de la milice. Dans cet extrait, la mercenaire médiatique du régime indique qu’il ne s’agit pas d’un milicien de base, mais d’un milicien qui avait des terres, donc quelqu’un d’un niveau plus élevé qui se voit supérieur à ses voisins.

Par ailleurs, la journaliste propagandiste attribue l’exode de ce propriétaire terrien à l’assèchement de « ses puits » et la conséquence au pas de chance climatique alors que de nombreux experts attribuent l’assèchement du pays aux prélèvements ultra intensifs de toutes les eaux souterraines par les mollahs et leurs complices haut placés de la milice.

Cette gestion mafieuse des eaux a d’ailleurs provoqué de nombreuses révoltes dans les régions agricoles au cours des derniers mois. La journaliste ne les évoque pas et en attribuant une identité de milicien précédemment anti à ces habitants modèles, elle espère convaincre ses lecteurs que son milicien des bidonvilles a lui-même appartenu à la classe des profiteurs et n’ira donc pas manifester contre les siens ! La propagande et la désinformation [7] deviennent difficiles quand il s’agit d’inventer des normes rassurantes invraisemblables dans un système qui n’en a aucune.

C’est encore des tentatives risibles pour évacuer le risque que représentent ces déshérités engendrés par le régime, principalement des miliciens de base qui ont un savoir-faire sécuritaire certain et peuvent agir en réseau en faveur d’un changement de régime.

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Conclusion. 90 % des Iraniens sont sous le seuil de pauvreté. Une majorité est issue de la milice dont les membres inférieurs ont toujours eu des salaires très bas. Initialement, ils recevaient des aides alimentaires en nature, mais elles ont été supprimées sous Ahmadinejad, car ils se montraient peu enthousiastes à applaudir le régime. Une autre raison est l’augmentation du nombre des profiteurs des familles des responsables du régime et en conséquence, la distribution des richesses du pays à ces derniers au détriment du peuple tout entier.

À l’époque, c’est-à-dire il y avait environ 10 ans, 80% des Iraniens sous le seuil de pauvreté [8] dont 20 % vivaient dans les bidonvilles. Aujourd’hui 95% des gens sont proches ou en dessous du seuil de pauvreté dont 41 % vivent dans les bidonvilles. Ils sont la vitrine désormais non escamotable de l’avenir pour les autres pauvres qui ont parfois des maisons reçues en héritage, mais n’ont pas les moyens de les préserver et aucune chance de trouver un emploie dans un système réservé à un petit nombre.

Le simple fait que le régime évoque l’existence de ces habitants fantômes du système est la preuve qu’il prend très au sérieux le menace qu’ils représentent du fait de leur colère, leur savoir-faire milicien, leur connaissance des points faibles du régime et leur capacité d’agir en bande. Enfin, le spectacle de leur misère aussi une menace pour le régime car il est un permanent appel à révolte à ceux qui sont susceptibles de finir aussi bas.

Le présent intérêt porté à ces déshérités, par de nombreux articles ou déclarations qui se veulent réalistes et concernés, nous signale que ces ombres de la ville, ces invisibles nuisibles au régime ont enfin rejoint la contestation et y jouent déjà un rôle important.

Les articles biaisés qu’ils suscitent sont révélateurs des craintes de la cleptocratie au pouvoir. Heureusement, ces papiers ne sont pas vraiment crédibles pour pouvoir rassurer les amis du régime, ils les troublent au lieu de les apaiser et en conséquence, nuisent au régime au lieu de le stabiliser.

Comment vivent les plus pauvres d’Iran ? Il faut plutôt se demander comment vivent les plus riches entourés d’un magma de pauvres en colère pour mille raisons car ils ne passent pas leur journée à fleurir leur pas de porte, mais manifestent massivement chaque jour dans tout le pays et parfois violemment.

La réponse à la question de la journaliste est évidente. Les riches artificiels du régime, parasites du système mafieux des mollahs et des chefs Pasdaran, vivent mal leur situation. Ils ne veulent pas risquer leur vie pour défendre le régime. Ce dernier n’aura pas de retour sur son investissement.

De fait, l’enfer des plus pauvres est devenu une source de risques et de craintes pour le régime et ses vrais responsables. Leur cocotier est à présent ébranlé, ils s’agitent, agacent et déstabilisent en conséquence davantage leur paradis artificiel.

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Comment vivent les plus pauvres d’Iran ?

La réponse est comment meurt le régime des mollahs.
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[2Notre article date de 2009, mais ces chiffres restent valables car malgré des salaires plus grands car du fait d’une inflation galopante qui dépasse les 100% et la dévaluation de la monnaie iranienne par rapport au dollar, le pouvoir d’achat n’a guère évolué dans le bon sens.

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