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Iran : La Russie envisagerait la livraison des S-300
01.02.2010

Depuis des années, la république islamique demande à la Russie de lui livrer le système défensif de missiles anti-missiles S-300 qui la rendrait invulnérable face à une frappe aérienne de ses installations militaires et nucléaires. Malgré l’absence de sanctions applicables à des équipements défensifs, les dirigeants politiques russes ainsi que les responsables de l’agence russe d’exportation d’armements « RosOboronExport » avaient toujours refusé ses demandes et ce refus a toujours été salué par Washington. Or, jeudi dernier, le directeur de RosOboronExport a annoncé qu’il n’y avait « aucun obstacle à la coopération militaire et technique dans les domaines qui intéressent Moscou et Téhéran » sans que ces propos ne déclenchent une réaction négative de Washington. | Décodages |



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En mars 2009, Moscou qui avait toujours refusé la livraison des S-300 (ci-dessus) à l’Iran a annoncé une possible livraison « si la situation internationale évoluait ». C’est le cas aujourd’hui.

C’est en 1998 que dans le cadre de ses achats d’armes russes, Khatami a réclamé à Boris Eltsine le système de missiles anti-missiles S-300. A l’époque la vente était impossible en raison du protocole Gore-Tchernomyrdine signé le 30 juin 1995 sur l’interdiction de vente de missiles à l’Iran. Au début de l’année 2000, la Russie a rompu cet accord au prétexte que Washington avait dans la période des 6 précédentes années autorisé ses alliés à vendre des missiles à l’Iran et que de ce fait, le protocole Gore-Tchernomyrdine ne cherchait pas à limiter les capacités balistiques des mollahs, mais aussi à nuire aux exportations russes.

En 2000, la voie s’est alors ouverte à une large coopération avec les mollahs dans le but évident de créer un pôle anti-américain. Mais Washington a immédiatement promulgué l’Iran Non-proliferation Act (loi au nom prémonitoire sur les futurs projets américains) qui prévoyait des sanctions contre la Russie. Cette loi visait à interdire la vente aux mollahs de pièces importantes comme le S-300 car ce système rendrait l’Iran invulnérable à des frappes ce qui rendrait sans effet toute politique de pression basée sur l’intimidation militaire.

Dans la foulée, Washington et Moscou se sont retrouvés face à face en désaccord sur l’existence des armes de destructions massives en Irak, prétexte à une invasion car les Russes avaient d’importants intérêts pétroliers dans ce pays. Quand par la suite, Washington a parlé d’une menace nucléaire iranienne, Moscou a cru revivre l’épisode irakien et a décidé de renforcer ses liens avec les mollahs notamment parce que ces derniers l’aident à bloquer l’adoption d’un statut juridique pour la mer Caspienne empêchant ainsi l’Asie Centrale de se procurer un accès direct vers l’Europe via la Turquie. C’est alors qu’il a décidé de passer outre les pressions de Washington en signant en 2005 un contrat de vente de S-300 à l’Iran. Washington a alors sanctionné plusieurs compagnies russes dont Sukhoï, le constructeur d’avions militaires, avant de revenir sur cette décision pour rendre possible l’achat à la Russie du titane destiné à ses propres avions. Moscou a alors pu signer fin 2007, c’est-à-dire 9 ans après la demande formulée par Khatami, le contrat de livraison à l’Iran des S-300. Accessoirement, en 2007, la Russie a été consacrée championne du monde de vente d’armes 2007.

Mais peu de temps après cette vente historique, Moscou a réalisé que les mollahs étaient en négociations secrètes avec Washington et cherchaient en fait à obtenir les S-300 pour avoir les coudées franches dans leur bras de fer afin d’obtenir des clauses d’entente plus intéressantes ! Afin que ce marchandage ne puisse aboutir et les priver de facto de ses alliés anti-américains, dès 2008, les Russes ont adopté une position ambiguë de refus de livraison des S-300 sous divers prétextes plus ou moins crédibles (comme des retards de paiements).

Cette situation a évolué quand Obama a accédé au bureau Ovale en proposant un dialogue sans aucune condition préalable aux mollahs. Moscou a alors envisagé une livraison car cela allait rendre les mollahs très agaçants ce qui pouvait conduire les négociations secrètes à l’échec. Mais en l’absence d’un geste favorable du côté iranien à la proposition d’Obama, son inquiétude s’est évaporée et il a oublié les S-300. Téhéran s’est alors mis à la recherche d’un fournisseur remplaçant, mais Moscou est intervenu pour neutraliser les achats.

La situation a encore évalué en septembre 2009 quand Washington a obtenu l’adhésion des Russes à son camp contre l’abandon du projet ABM et aussi l’octroi à la Russie d’un droit d’occupation militaire de l’Abkhazie et l’Ossétie du Sud pour une durée extraordinaire de 49 ans. Dès lors, la Russie, dernière chance de salut des mollahs, est devenue une vraie marionnette jouant au besoin des attentes de Washington tantôt le rôle du fervent partisan des sanctions, ou celui du fervent opposant aux nouvelles sanctions. Le passage à l’ouest de la Russie devait être une mauvaise nouvelle pour les mollahs car ce pays était l’un des fournisseurs possibles en cas d’un embargo sur l’essence.

Washington espérait ainsi booster ses intimidations pour forcer les mollahs à accepter sa demande de devenir ses alliés pour l’aider à soulever les musulmans de l’Asie Centrale contre la Chine, mais les mollahs n’ont pas cédé à la panique car ils estiment depuis toujours que l’Amérique ne peut pas les renverser car sinon elle devrait dire adieu à ses rêves de déstabilisation révolutionnaire de la riche région chinoise de Xinjiang peuplée de musulmans. Ils ont donc tenu tête dans l’espoir que Washington reculerait forcément avant que la Chine ne consolide durablement son emprise sur l’Asie Centrale. Cela a été une erreur d’estimation car pour tenir face à Washington, les mollahs ont dû puiser dans leurs réserves, frôlant la semaine dernière une apoplexie économique au point que Washington a lui-même été obligé de leur accorder un contrat pétrolier en Irak pour leur faire parvenir un peu de devises afin d’éviter qu’ils ne s’écroulent.

Un peu plus tard, Washington qui devait faire adopter au Sénat le projet de loi sur un embargo adoptée par la Chambre, a fait adopter un autre texte par le Sénat pour lancer une nouvelle procédure de débats afin de laisser aux mollahs le temps de respirer.

Dans ce contexte où il faut donner du temps aux mollahs pour se restaurer, la livraison des S-300, qui rendent théoriquement toutes représailles militaires impossibles, semble parfaite pour expliquer l’inaction de Washington d’où les propos d’Anatoli Issaïkine directeur général de l’agence russe d’exportation d’armements sur l’absence de sanctions onusiennes interdisant la « poursuite de la coopération militaire et technique dans les domaines qui intéressent Moscou et Téhéran ». Moscou ayant précédemment évoqué des retards de paiements pour expliquer le refus de livraison des S-300, l’hilarant M. Issaïkine a précisé que le régime des mollahs avait « toujours acquitté ses engagements figurant dans les contrats militaires ».

Téhéran risque donc de recevoir le joujou qu’il réclame. Il n’est pas pour autant tiré d’affaire car si Washington renonce par le plus grand des hasards à son vieux projet de déstabilisation régionale par l’Islam, il donnerait des moyens accrus aux opposants pour soulever le peuple, une entité contre laquelle les S-300 sont impuissants.


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Pour en savoir + sur l’inaction diplomatique d’Obama :
- Iran : Vers une impasse
- (30 JANVIER 2010)

Pour en savoir + sur l’inaction militaire d’Obama :
- Iran : Petraeus, roue de secours d’Obama !
- (12 JANVIER 2010)

| Mots Clefs | Décideurs : OBAMA |
| Mots Clefs | Enjeux : Apaisement |
| Mots Clefs | Enjeux : Option militaire |

| Mots Clefs | Zone géopolitique / Sphère d’influence : RUSSIE |