Iran : Vers une impasse 30.01.2010 Tout au long de l’année 2009, les Américains ont alterné les offres de réconciliation et la menace d’un embargo américain, mais sans adopter les lois nécessaires à la Chambre puis au Sénat car leur objectif n’a jamais été de renverser les mollahs, mais de les forcer à devenir leurs alliés régionaux. A l’annonce de l’adoption par le Sénat américain d’un projet de loi d’embargo, on pourrait croire que les Américains ont changé d’attitude vis-à-vis des mollahs. Ce n’est pas le cas car le Sénat vient d’adopter un texte différent de celui qui avait été adopté en octobre dernier par la Chambre : c’est le début d’une nouvelle procédure. Au début de l’année 2009, Obama a donné un an aux mollahs pour accepter une entente avec les Etats-Unis ou s’attendre à de plus fortes sanctions unilatérales, notamment un embargo sur l’essence, mesure qui peut paralyser tout le pays et provoquer un soulèvement social fatal à leur régime. Washington espérait intimider les mollahs afin que ces agitateurs régionaux acceptent de devenir ses complices en Asie Centrale pour l’aider à retourner les musulmans de cette région contre la Chine pour détacher la région musulmane de Xinjiang, réservoir de matières premières de la Chine. Cette intimidation aurait pu fonctionner si Washington cherchait une alliance (comme le pacte germano-soviétique), mais l’enjeu est trop important pour que Washington puisse accepter d’être à la merci du bon vouloir des mollahs. C’est pourquoi il exige une entente et non une alliance ou un arrangement. L’intérêt d’une entente est qu’elle passerait nécessairement par une normalisation des relations diplomatiques entre les deux Etats ce qui sous-entend la dissolution de l’aide des mollahs au Hamas et au Hezbollah, c’est-à-dire la dissolution des moyens de pression des mollahs sur les alliés régionaux de Washington, autrement dit l’impossibilité pour Téhéran de faire chanter Washington en cours de collaboration. La normalisation des relations diplomatiques contraindra également les mollahs à ouvrir l’accès de leurs élections à des candidats islamistes pro américains offrant ainsi à Washington l’opportunité de prendre une partie du pouvoir pour empêcher toute remise en cause de la collaboration en cours de route. Si le projet de recours à l’intimidation pour parvenir à une entente a été tactiquement bien conçu, il a un énorme défaut intrinsèque : Washington ne peut pas appliquer des sanctions trop dures car elles renverseraient ces mollahs qu’il veut contrôler et vu leur bilan, le prochain régime sera tout sauf islamique, ce qui remettra en cause tout le projet régional américain. C’est là le problème dans les bras de fer entre les deux pays : les sanctions fatales ont toujours été exclues au même titre que les frappes. Plus exactement, Washington a été dès le départ condamné à être dans une stratégie de guerre d’usure qu’il devait lui-même arrêter occasionnellement quand la situation économique des mollahs devenait trop désastreuse. Depuis un certain temps, il s’est même vu obligé de les secourir régulièrement car désormais leur situation économique est vraiment inquiétante : ils manquent de devises pour acheter des produits de première nécessité et craignent des pénuries susceptibles de provoquer des soulèvements en chaîne. On est passé au-delà de la menace des sanctions fatales, désormais toutes les sanctions sont fatales. Ainsi il y a deux mois, Washington a autorisé la Belgique à restituer aux mollahs leurs réserves européennes d’or ! Il y a un mois, il a oublié les sanctions unilatérales promises en janvier 2009 pour exiger des sanctions onusiennes qui n’ont aucune chance d’aboutir. Puis il a autorisé la vente à l’Iran du gaz Turkmène pour empêcher une pénurie hivernale susceptible de provoquer un soulèvement populaire. Et enfin, il y a une semaine, alors que les banques Iraniennes étaient au bord de la faillite, l’Irak qu’il contrôle a versé 600 millions de dollars aux mollahs via un étonnant contrat d’achat de 19,000 barils quotidiens de gazole à l’Iran ! Dans ces conditions, on comprend l’abandon de la procédure en cours et assez aboutie pour l’adoption d’un projet de loi relatif à des sanctions fatales pour une nouvelle procédure à l’état embryonnaire. En fait Washington est en train de désactiver des sanctions unilatérales qui ne sont plus d’actualité. La nouvelle procédure a été lancée au moment où des responsables économiques américains du secteur privé ont déconseillé ce genre de sanctions. Le nouveau texte pourrait donc être un moyen légal pour enliser cette sanction désormais impossible dans des débats stériles à la Chambre pour la geler durablement. Cela risque de donner des ailes aux mollahs qui ne manqueront pas de se montrer encore moins coopératifs dans l’espoir de marchander un arrangement à minima : c’est-à-dire la levée de toutes les sanctions à leur encontre en échange d’une alliance sans aucune condition (ni une normalisation des relations ni la demande de la dissolution de l’aide au Hamas ou au Hezbollah). Le projet américain d’une entente avec les mollahs est dans une impasse.
Pour en savoir + :
| Mots Clefs | Décideurs : OBAMA |
| Mots Clefs | Enjeux : Pétrole & Gaz | | Mots Clefs | Instituions : Politique Economique des mollahs |
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