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Iran : Révélations délibérées sur les viols en prison
11.08.2009

Alors que la France s’inquiète pour Clotilde Reiss et que le monde a les yeux braqués sur l’Iran, un haut dirigeant du régime des mollahs, membre du puissant Conseil de Discernement, le véritable centre de toutes les décisions dans le pays, a révélé des cas de viols sur les prisonniers du soulèvement de juin dernier. Il n’y a pas l’ombre d’un hasard : il s’agit d’une sensationnelle manœuvre médiatique à multiples objectifs.



Tous les médias occidentaux sont sous le choc après les révélations faites par le « réformateur Mehdi Karroubi » sur les viols systématiques contre les filles et les garçons arrêtés pendant les émeutes de juin dernier par des miliciens incontrôlables. Chacun salue l’initiative de ce « candidat modéré battu déloyalement par Ahmadinejad ». Mais on est très loin du compte : Karroubi n’est pas un modéré, chef du Parti de la confiance Nationale et co-leader occasionnel du mouvement vert. Karroubi est depuis 2 décennies, l’un des 22 membres à vie qui dirigent légalement le pays via le Conseil du Discernement de l’Intérêt du Régime, organisme qui définit toutes les politiques qui seront par la suite appliquées par les différents gouvernements. Cette révélation n’est donc pas l’œuvre d’un révolté modéré, mais une manœuvre délibérée qui est dans l’Intérêt du régime.

Intérêt(s) du régime | Actuellement, le régime des mollahs est sous la menace non pas de la rue mais de nouvelles sanctions qui peuvent l’affaiblir ce qui le rendrait très vulnérable face à une population maltraitée depuis 30 ans. La priorité pour le régime est de bloquer la possibilité de nouvelles sanctions. Etant donné qu’il ne souhaite aucune entente durable avec l’Occident, il a eu l’idée d’accepter un compromis nucléaire via Ahmadinejad pour désactiver les sanctions avant de tout remettre en cause par la contestation généralisée de sa légitimité en tant que signataire de l’accord. C’est ce qui a donné lieu au Mouvement Vert qui conteste uniquement la légitimité Ahmadinejad et rien d’autre des défauts ou crimes commis par ce régime. Téhéran voulait simuler une révolution de couleur pour donner un caractère démocratique et donc internationalement respectable à cette contestation. Les Occidentaux ont dans un premier temps été troublés par le Mouvement Vert, mais se sont repris après nos analyses : les Américains ont refusé tout soutien à Moussavi et plus récemment, au nom du respect du droit international, la France a refusé tout soutien à la contestation de la légitmité du gouvernement Ahmadinejad.

Pour casser ce front de refus, le régime a d’abord évoqué d’éventuelles poursuites contre Moussavi, cela n’a rien donné. Il a alors lancé un procès stalinien pour susciter le soutien aux personnes persécutées, mais cela aussi n’a rien donné, il va donc plus loin avec ces révélations glaçantes pour obtenir une implication des Occidentaux.

The French Paradox | Parmi tous les Occidentaux, la France qui a une otage en Iran a réagi aux propos de Karroubi selon les attentes de Téhéran : en oubliant son refus légaliste de légitimer la contestation : « Les autorités françaises ont déjà eu l’occasion à plusieurs reprises d’exprimer les vives préoccupations de la France au sujet des mesures brutales de répression visant une large partie de la population iranienne contestant pacifiquement la sincérité et les résultats du scrutin présidentiel du 12 juin », a déclaré Romain Nadal, le porte-parole estival du ministère français des Affaires étrangères.

Ce n’est pas un soutien franc et net, mais un recentrage des débats sur le Mouvement Vert, conforme à l’analyse que nous avions livrée à propos des attentes de Téhéran pour accélérer la libération de Clotilde Reiss.

L’importance du recentrage du débat sur la légitimité de la contestation des résultats du scrutin (et d’Ahmadinejad) est si élevée que Téhéran a accepté de prendre le risque de pâtir éventuellement de la mauvaise publicité générée par ces viols. Mais le régime pense avoir pris un risque limité et bien calculé car ces révélations par un soi-disant réformateur contribuent à entretenir le mythe de l’existence des modérés, mécanisme de base pour manipuler l’Occident pour lui faire espérer une entente durable avec l’Iran.

Via ces soi-disant révélations et des récits sordides de viol publiés sur des sites Verts [1], Téhéran a réussi un coup de maître car cela permet aussi d’intimider les Iraniens (les jeunes mais aussi leurs parents) afin qu’ils n’envisagent pas une reprise de leurs manifestations hostiles au régime (c’est-à-dire en dehors du Mouvement Vert). C’est un carton plein.

Tel a toujours été l’intérêt du régime : terroriser l’intérieur et manipuler l’Occident. L’intérieur résiste, mais l’Occident accourt.


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| Mots Clefs | Institutions : Désinformation et fausses rumeurs |
| Mots Clefs | Mollahs & co : Karroubi |
| Mots Clefs | Réformateurs & faux dissidents : Le Mouvement Vert |

| Mots Clefs | Institutions : Démocratie Islamique |

| Mots Clefs | Zone géopolitique / Sphère d’influence : France |

[1Parallèlement à la publication de ces révélations utiles pour le régime, la Vague Verte de la Liberté, un blog partisan de Moussavi et fan des membres du CDIR a publié un récit de viol par l’une des victimes. C’est un récit cru, obscène et sans aucun pathos ou pudeur où le violé affirme qu’il a raconté ses mésaventures aussitôt après sa libération inexplicable à un partisan d’Ahmadinejad qui a ainsi compris son erreur d’avoir voté pour le président sortant. Visiblement les manipulateurs du régime ne savent pas que les victimes de viol se referment sur elles-mêmes sans pouvoir décrire leur traumatisme.