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Iran : Autosuffisance en essence, une intox lourde
11.09.2010

Pendant des années, les Américains ont intimidé les mollahs en se disant prêts à les sanctionner pour l’importation d’essence car ces derniers ont des capacités limitées de raffinage. Téhéran avait toujours déclaré qu’il allait atteindre l’autosuffisance, mais on ne voyait rien venir. Alors qu’il est très affaibli et contesté à l’intérieur notamment par les commerçants du Bazar, le régime a annoncé hier qu’il avait « atteint l’autosuffisance en matière de production d’essence, de gazole et de fuel grâce à un projet innovant » [1]. Info ou intox ?



Pour Siavash Ghazi, le correspondant de la RFI en Iran, sans l’ombre d’un doute c’est une info : conformément à l’annonce du ministre iranien du pétrole, l’Iran a réussi à faire passer sa production d’essence de 44 millions de litres par jour à 66 millions de litres (qui est sa consommation quotidienne officielle depuis 2 ans). « C’est une réponse ferme aux pays qui voulaient faire pression sur l’Iran », affirme Ghazi.

Mais, Siavash Ghazi, le correspondant de la RFI, est un garçon proche du régime qui a été longtemps en charge de la diffusion de la désinformation des mollahs en France, dépêches évoquant les progrès du régime ou la popularité des soi-disant réformateurs. Cela a évidemment été fait avec l’accord de la France, partenaire économique des mollahs. Il ne faut pas se fier à Ghazi : le régime n’a pas atteint l’autosuffisance et la preuve visible en est (comme le sait Ghazi) qu’il y a actuellement des queues de 2 kilomètres devant les rares stations services qui fonctionnent encore en Iran (comme on peut le voir sur ces vidéos de ces dernières semaines signées par l’INA, une agence soi-disant d’opposition liée au régime).
© WWW.IRAN-RESIST.ORG


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L’annonce est de l’intox, mais du lourd. Tout d’abord parce que les raffineries iraniennes sont de notoriété publique en très mauvais état depuis des années et bien avant le début des sanctions. Par ailleurs, le régime n’a pas été capable de construire sa nouvelle raffinerie, la Persian Gulf Star. En conséquence, pour produire plus de produits raffinés, il faut plus de pétrole. Mais cela est impossible car depuis trente ans, les mollahs ne produisent plus de pétrole, ils vendent des concessions. La production est entre les mains des étrangers. Leurs contrats stipulent qu’ils rémunèrent les mollahs avec 20 à 30% de leur production. Depuis des années, Téhéran dispose d’une quantité fixe de pétrole par mois. Il ne peut pas envisager d’augmenter cette quantité car d’une part le pays a perdu les cadres nécessaires pour le faire et par ailleurs en raison des sanctions, il n’a pas les ressources nécessaires en devises pour le faire.

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Mais mise à part l’impossibilité d’une augmentation de la production en raison du manque de matière première, il y a un fait extraordinaire (énorme) qui fait de cette annonce une l’intox encore plus lourde et surtout d’un genre très particulier :
- avec ses quelques 4 à 5 millions d’automobiles, l’Iran n’a pas besoin de 66 millions de litres d’essence par jour, mais uniquement besoin de 8 à 10 millions de litres d’essence .

En revanche, le pays a besoin d’importante quantité de fuel (qui est également appelé pétrole lampant ou encore kérosène) pour la production nationale de l’électricité qui repose pour 90% [2] sur des centrales thermiques à base de fuel.

La preuve directe de cette affirmation est que depuis le début des sanctions américaines qui ont fait diminuer un peu plus les revenus en devises des mollahs et en conséquence leur capacité d’achat à l’étranger, l’Iran a connu une baisse importante et régulière de sa production d’électricité, mais aucune pénurie d’essence.

Aujourd’hui, le régime a perdu 50 à 60% de sa capacité de production d’électricité. Depuis des mois, les particuliers ont droit à 12 heures de courant par jour et la part réservée aux usines est de 8 heures. Il y a deux semaines, une coupure a paralysé le métro de Téhéran. Les usagers qui étaient restés bloqués pendant des heures dans la rame dans le noir par une chaleur de 45° ont pris à partis les responsables de la station ce qui a donné lieu à une violente bagarre (relatée dans la presse nationale). La même semaine, le régime a multiplié par 12 le prix de l’électricité pour forcer une baisse de consommation [3] afin de préserver la part réservée aux industries, aux services et les équipements (transports, télécommunications, chambres froides, assainissement de l’eau...) car il imagine bien l’explosion sociale qui pourrait le renverser…

En conséquence on peut dire que la focalisation sur l’approvisionnement en essence, qui n’a jamais été un problème en raison de la taille réduite du parc automobile iranien, est un faux problème inventé par le régime pour distraire et occuper les Iraniens (avec des queues ostentatoires puis le miracle de l’autosuffisance) afin de masquer l’épicentre de ses problèmes : la production d’électricité qui est une bombe à retardement.

Cette annonce d’autosuffisance intervient d’ailleurs quelques jours après un nouvel échec cuisant du régime à mobiliser ses alliés internes, comme les bassidjis ou les Bazaris, pendant la Journée de Qods.

Les Occidentaux qui ne cessent d’affirmer leur volonté de dialogue, car ils apprécient ce régime faible, dépendant des exportations, lui donnent un coup de main pour cacher sa détresse en donnant de la publicité à cette soi-disant autosuffisance. Elle leur permettra de décréter l’inefficacité de nouvelles sanctions afin d’alléger l’embargo sur le fuel pour ne pas précipiter la chute désormais inévitable de ce bon partenaire commercial.

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| Mots Clefs | Institutions : Désinformation et fausses rumeurs |
| Mots Clefs | Enjeux : Pétrole & Gaz |
| Mots Clefs | Instituions : Politique Economique des mollahs |

| Mots Clefs | Résistance : Menace contre le régime |

| Mots Clefs | Enjeux : Sanctions Ciblées en cours d’application |

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[1Annonces d’autosuffisance | Les responsables du régime confondent souvent dans leurs déclarations les mots essence et carburant. Le plus généralement ils parlent d’essence, mais il leur arrive aussi de détailler en citant outre l’essence, le fuel, mais aussi le gazole ou du gaz liquide.

[2Baisse de production d’électricité : motifs invoqués par les mollahs | L’Iran prétend que la baisse a été provoquée par une baisse de sa production hydroélectrique, elle-même due à une année de sécheresse et des problèmes d’approvisionnement en gaz. Les deux motifs sont faux.

Tout d’abord, on ne peut également retenir le manque d’eau comme un motif de la perte de 50 à 60% de la production de l’électricité car un seul barrage iranien, celui de Dez, est affecté à la production d’électricité. Elle est censée produire théoriquement 3 à 5% de l’électricité iranienne. S’il était à l’origine du problème, l’Iran aurait dû perdre 3 à 5% de sa production et non 50 à 60%. Précisons cependant que les difficultés de Dez (situé près de la ville de Dezfoul dans le sud du pays) ne proviennent pas d’une année de sécheresse en 2007 car depuis l’Iran a connu deux années exceptionnelles en termes de précipitation. Dez ne produit plus rien car nos chers mollahs préfèrent vendre l’eau du pays aux Etats voisins. C’est d’ailleurs pourquoi d’autres barrages ainsi que de nombreux marais ou lacs et même deux grandes rivières du sud du pays, Zayandeh Roud et Karoun, ont été asséchés.

On ne peut également retenir le manque du gaz comme un motif de perte de 50 à 60% de la production de l’électricité car le régime a équipé uniquement 3 de ces centrales avec des turbines à gaz. Elles alimentent partiellement les régions de Khorassan (Nord-Est) et d’Azrbaïdjan (Nord-Ouest), ainsi que la ville de Shiraz. C’est pourquoi les deux premières régions ont été les seules à être touchées quand le Turkménistan, situé au nord de l’Iran, a rompu ses livraisons pendant l’hiver 2008. Le problème n’existe plus car ces livraisons ont été définitivement rétablies et même augmentées depuis janvier 2010.

[3Plan de hausse des prix pour brider la consommation | Quand Washington a réduit les ressources en devises des mollahs, il pensait les mettre en situation de danger pour les forcer à accepter de devenir ses alliés. Ces derniers ont refusé car cela passe par un transfert des postes clés de leur régime aux pions islamistes de Washington ce qui les mettrait globalement en danger après les joyeuses réconciliations. Pour résister aux Américains, les mollahs qui manquaient de devises ont pensé à la réduction du pouvoir d’achat des Iraniens pour masquer leur incapacité à approvisionner le marché intérieur. Mais le secteur le plus touché fut le secteur énergétique. De fait, ils ont commencé à manquer d’électricité pour produire de nombreux biens et ont été contraints d’importer plus au moment où ils devaient se serrer la ceinture. C’est pourquoi avant l’application du projet de réduction générale du pouvoir d’achat par une augmentation du prix des produits de base, ils ont été contraints d’augmenter le prix de l’électricité avant l’entrée en vigueur des autres augmentations. Dans ce cadre, tous les produits vont monter pour forcer à baisser la consommation des ménages. L’essence fait aussi partie du lot bien qu’elle soit finalement la seule qui ne manquera pas du moins tant que les raffineries recevront leur part d’électricité.

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