Iran : La semaine en images n°129 08.08.2010 L’évènement marquant de la semaine d’un point de vue occidental a été la déflagration à proximité de la voiture d’Ahmadinejad lors de son voyage dans la région de Hamedan. Téhéran a démenti la thèse de l’attentat, mais a lui-même alimenté les rumeurs car il a besoin de faire des diversions médiatiques pour faire oublier ses difficultés à redresser la barre face aux sanctions. Alors que le monde entier était occupé à tirer au clair l’explosion de Hamedan, les mollahs ont pu entreprendre en toute discrétion plusieurs projets pour neutraliser les sanctions, notamment une vente massive d’actions de grandes entreprises iraniennes à des investisseurs étrangers. Alors que le monde entier courrait après les rumeurs lancées par les mollahs, les Iraniens avaient les yeux rivés sur cette vente qui les a révoltés. Voici donc des images du soi-disant attentat, de la vente et de la révolte sourde des photographes iraniens (que nous saluons encore). Au début de cette semaine, Téhéran était sous le choc des évènements survenus au cours des 15 derniers jours. Tout d’abord, il y a deux semaines, les Européens qui s’étaient opposés à l’adoption des sanctions unilatérales américaines ont adopté leurs premiers trains de sanctions unilatérales. Puis ce fut le tour des Japonais. Ces sanctions n’ont été que des répliques des mesures restrictives américaines que les Européens appliquaient déjà depuis 1996 et n’ont de ce fait pas aggravé la situation économique, mais le fait de se prononcer en faveur du principe des sanctions unilatérales a aggravé le moral des mollahs car ils ont des alliés de poids. Après l’annonce des sanctions européennes, les mollahs se sont alors empressés d’inaugurer des équipements, des usines ou des raffineries pour laisser entendre que tout allait bien et que l’argent ne manquait pas. L’affirmation étant difficile à croire quand on perd des alliés comme les 27 Européens, Téhéran avait annoncé pour la semaine dernière un programme riche en bonnes nouvelles économiques à savoir une arrivée massive d’intermédiaires iraniens opérant pour des investisseurs étrangers ! La braderie géante de Téhéran | Le projet de vendre les actions des grandes entreprises iraniennes à des étrangers a démarré en 2005 au moment où l’on parlait d’un transfert du dossier nucléaire iranien vers le conseil de sécurité. Les Iraniens attendaient ce transfert depuis 2003 dans l’espoir d’un embargo sur l’essence qui immobiliserait les troupes du régime rendant possible un soulèvement. Pour les mollahs, si les grandes puissances possédaient l’Iran à hauteur de 50%, elles ne pouvaient pas sanctionner son régime propriétaire de l’autre moitié des actions. Officiellement, pour le bien de l’économie iranienne, Rafsandjani, le patron politique du régime, a alors lancé le projet de privatisation de l’économie iranienne. Mais ce projet n’a pas eu le succès escompté car les puissances visées n’avaient pas confiance en la stabilité du régime, elles avaient peur de perdre leur mise en cas d’un changement de régime. Après trois ans d’efforts, en 2008, Téhéran a renoncé à attirer les grandes puissances. Au même moment, le poids des sanctions se faisait enfin sentir et les Iraniens espéraient des sanctions encore plus fortes et susceptibles de mettre KO les mollahs. On était loin d’imaginer le soulèvement de l’été suivant. Les mollahs qui devaient êtres conscients des risques de troubles sociaux en cas de pénuries ont décidé de réduire le pouvoir d’achat des Iraniens en supprimant les prix subventionnés et parallèlement, ils ont transformé le projet (de privatisation) en une vente d’actions pour ramasser des devises nécessaires pour l’approvisionnement du marché intérieur (afin de réduire les risques de pénuries et d’émeutes). À ce moment, Téhéran a proposé aux éventuels investisseurs le passage par les banques offshore iraniennes ce qui laisse supposer qu’il s’adressait non pas à des investisseurs Etatiques ou institutionnels, mais à des trafiquants ou des réseaux de blanchiment d’argent. Cette seconde tentative a été contrée par les sanctions financières et bancaires américaines mises en place par Bush. Avec l’arrivée d’Obama, la situation est devenue plus difficile puisqu’en parallèle avec sa guerre d’usure économique, Washington a cherché des solutions pour forcer les mollahs à coopérer alors que ces derniers doivent refuser tout apaisement pour préserver le leadership de la rue arabe. Pendant un an, Téhéran a tenté de provoquer une escalade guerrière dissuasive, mais Washington a esquivé ses provocations pour continuer sa guerre d’usure afin de l’avoir par KO économique. La perspective de ce KO est devenue un facteur de panique chez les alliés internes du régime : les miliciens et les Bazaris qui pourraient être lynchés en cas d’un effondrement du régime. En avril 2010, quand Téhéran a eu une confirmation absolue que Washington avait les moyens d’esquiver toutes ses provocations pour mener à bien la guerre d’usure vers ce KO effrayant, il a eu une nouvelle idée autour de la vente des actions. Il a lancé publiquement un appel à l’investissement en direction des « Iraniens expatriés » pour leur demander de chercher de petits ou moyens investisseurs et d’acheter pour leurs comptes autant d’actions des grandes entreprises ou ressources naturelles iraniennes que ces derniers voudraient. Téhéran a remplacé les Etats ou les blanchisseurs par les petits porteurs Ces « Iraniens expatriés », qui étaient en fait ses sbires ou ses lobbyistes installés à l’étranger, ont naturellement répondu immédiatement, en masse et positivement à cet appel d’unité nationale. Il a ainsi insinué qu’il pouvait réunir les devises nécessaires pour résister. Cette opération étant une affaire entre le régime et ses employés, tout est allé très vite avec un premier grand rassemblement des Iraniens Expatriés en Iran. Cependant, le but étant de rassurer ses alliés de l’intérieur tout en restant discret sur les investissements sanctionnés, Téhéran a fait une publicité importante sur le plan intérieur, mais il est resté plutôt discret à propos de cette opération sur le plan international. De fait, il n’a guère communiqué sur les retombées économiques de ce 1er rassemblement. Il a aussi organisé de nombreux rassemblements d’investisseurs sans trop de publicité. C’est cette semaine, à l’heure où il a perdu l’Europe que Téhéran a dû déroger à cette règle de discrétion en annonçant un 2ème rassemblement et une très forte hausse des activités boursières depuis avril dernier pour rassurer ses derniers fidèles serviteurs tout en restant aussi discret que possible. Cette affaire d’investissements par les petits porteurs n’a pas agacé les Américains qui eux-mêmes à l’occasion permettent aux mollahs de signer quelques contrats pour ne pas s’effondrer avant une entente, mais les manœuvres des mollahs ont attiré l’attention de l’Iranien moyen qui a réalisé que le régime était en train de brader l’avenir de ses enfants. De fait, le régime a été obligé de dénoncer ce rassemblement dans ses propres quotidiens pour calmer le jeu. Il a aussi retiré les panneaux publicitaires évoquant ce rassemblement. De fait, le régime a commencé le show itinérant (de 5 jours pour rassurer ses troupes à reculons alors qu’il avait vu les choses en très grand pour apaiser la grande peur du KO chez ses fidèles.
Le régime a aussi annoncé la mise en œuvre immédiate de sa promesse d’ouverture d’un compte d’1 million de rials (16 $ selon le taux réel du rial, 100 $ au cours officiel) pour chaque nouveau-né. Il a également promis des hausses de prix modérées à l’occasion de la disparition des prix subventionnés… Cela n’a pas suffi : les Iraniens très remontés contre les 2000 « invités des mollahs lapideurs » exigeaient des noms. Dans notre émission vers l’Iran, nous avons mis à la disposition de nos auditeurs une liste d’une centaine de noms d’intermédiaires très actifs. Aussitôt, des soi-disant opposants que nous soupçonnons d’être au service du régime se sont mobilisés pour dénoncer un ou deux participants avec plein de détails sur leur biographie pour faire diversion et faire oublier tous les autres mis en danger. Sur un fond de tension, en une semaine, les invités des mollahs ont rapporté 100 millions de dollars au régime (ce qui n’est rien). Soudain, Téhéran a alors évoqué le voyage de son ministre du pétrole en Chine en milieu de semaine pour remplacer l’Europe par ce géant d’Asie. Nous avions alors affirmé qu’il s’agissait d’un leurre car au cours des trois dernières années, la Chine n’a cessé de réduire sa dépendance pétrolière envers l’Iran. Cette analyse a été confirmée par une annonce tardive du régime faisant Etat de l’absence d’officiel chinois à l’arrivée de la très imposante délégation iranienne. Selon l’agence officielle IRNA, la délégation iranienne (comprenant entre autre le ministre du pétrole et le directeur de la Compagnie nationale Iranienne de pétrole) a été accueillie par le personnel de l’ambassade du régime et les envoyés de Téhéran ont mis 48 heures pour obtenir une audience avec un ministre chinois. Ce dernier n’a signé aucun contrat, il n’a pas parlé de nouveaux contrats, il a uniquement affirmé que Pékin entendait garder de bonnes relations avec Téhéran. Téhéran avait cependant énormément communiqué sur le sujet. Le monde entier attendait des résultats, il a alors trouvé une superbe diversion avec l’annonce artificiellement gonflée par ses propres rumeurs à propos d’un attentat contre Ahmadinejad pendant l’un de ses déplacements régionaux. Téhéran a parfaitement réussi car de nombreux sites réputés sérieux ont régulièrement publié les rumeurs diffusées par les mollahs. Mais à la fin, il n’y a eu aucune arrestation, ni aucune accusation contre les supposés auteurs de l’attentat. La bombe sonore | Dans le lot des victimes de cette désinformation, le site web de l’Express a gagné le 1er prix de la naïveté en publiant une photo comme étant la preuve de l’attentat.
En attendant cette présentation qui sera la nouvelle bombe médiatique des mollahs, ces derniers ont achevé la semaine par la visite du président de Guinée-Bissau, pays considéré comme un narco-Etat, signe qu’ils n’ont pas rompu avec leurs affaires de blanchiment d’argent. La Braderie continue à nouveau de manière la plus discrète.
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