Téhéran emploie une énergie folle pour représenter Moussavi et Karroubi comme « des opposants à l’ordre établi, maltraités par le président Ahmadinejad ».

Cela n’a aucun sens au vu des structures légales du régime car Moussavi et Karroubi sont tous les deux des membres à vie du Conseil de Discernement de l’Intérêt du régime, organe plénipotentiaire aux pouvoirs prétoriens qui décident de tout en Iran. Parmi leurs immenses pouvoirs, les 22 membres à vie de ce véritable gouvernement permanent du régime ont le droit de nommer ou destituer le chef du pouvoir judiciaire. Ils viennent d’ailleurs de nommer à ce poste Sadegh Larijani, un homme sans connaissance juridique, mais qui est le frère d’Ali Larijani, un des membres à vie du Conseil.

A l’occasion de cette destitution, le Conseil a accueilli en son sein comme nouveau membre à vie l’ancien chef du pouvoir judiciaire, Shahroudi, alors que ce dernier avait arrêté et fait juger de nombreux « opposants ». Si au lieu de profiter de son limogeage pour se venger, les modérés Moussavi et Karroubi ont voté pour son intégration dans leur club très fermé qui décide toutes les politiques dans tous les domaines, c’est parce qu’il avait toujours agi selon les ordres.

Arrêter et juger des opposants est la procédure de base pour fabriquer une opposition interne à partir d’éléments 100% sûrs : membres du conseil, anciens des services secrets, fondateur des services secrets… Tous ces partisans d’une « évolution lente et interne du régime » ont eu droit à cette procédure médiatique et ont accédé à leur notoriété d’opposant grâce aux prises de parti des chefs d’Etats occidentaux qui se sont exprimés en faveur du respect des droits de l’homme. Au passage, le régime a validé le discours modérateur de ces faux opposants.

Cette procédure de base du régime est actuellement réactivée à fond car le régime espère déclencher le même genre de soutiens officiels de la part des Occidentaux pour les messieurs Moussavi et Karroubi. Mais cette fois, l’objectif n’est pas de transformer ces messieurs en ambassadeurs itinérants du régime, mais juste d’obtenir une validation de leur discours qui est le refus de reconnaître la légitimité électorale d’Ahmadinejad. Or, le président est l’interlocuteur légal et officiel des Six, si sa légitimité est contestée, il ne peut plus représenter l’Iran et l’Etat iranien ne peut plus parler aux Six. Téhéran a besoin d’invalider Ahmadinejad pour échapper au dialogue sans pour autant refuser formellement et s’exposer à des sanctions par un refus direct.

C’est le 13 juin dernier après l’annonce des résultats de l’élection que le régime a eu cette idée saugrenue. Pour obtenir le soutien des Occidentaux à la contestation de la légitimité d’Ahmadinejad, il a donné à l’opération la forme attrayante d’une révolution de couleur, en l’occurrence verte qui est la couleur de l’Islam. A cause de ce genre de détails nos compatriotes n’ont pas adhéré au Mouvement Vert, mais ont profité de l’ouverture pour descendre massivement dans tout le pays pour contester le régime dans sa totalité. Ce soulèvement qui a duré du 15 au 25 juin a été un échec pour le projet très précis d’invalider la légitimité d’Ahmadinejad.

Pour remettre le projet sur les rails, Téhéran a organisé des manifestations vertes à travers le monde entier, car il était incapable de mobiliser en Iran même. Dans le pays, il a tenté d’attirer les Iraniens dans les rues à diverses occasions pour des prétextes totalement étrangers à l’islam et la révolution, en ajoutant la signature verte à la dernière minute.

Cela n’a jamais fonctionné car les Iraniens ne veulent pas adhérer à ce Mouvement Vert dont les chefs ont appelé le Guide à réprimer le soulèvement. Cependant, puisque le régime a bâti sa réputation régionale sur un anti américanisme militant voire guerrier et de ce fait ne peut pas accepter le dialogue, à l’approche de la date limite pour répondre aux Six, il doit retenter le coup de la contestation d’Ahmadinejad (pour bloquer la situation).

C’est ce qui nous vaut cette comédie autour de Moussavi et Karroubi avec des arrestations plus que fictives. Le régime les médiatise. Les deux hommes qui se disent persécutés ont alors appelé les Iraniens à descendre dans les rues pour scander des slogans alternatifs à l’occasion de la Journée de Qods, manifestation organisée chaque année par le régime pour affirmer l’attachement des Iraniens à la conquête de Jérusalem.

Des sources anonymes (qui se disent des opposants au régime) ont joint leur voix à cet appel pour affirmer que ce 18 septembre est bien une occasion unique, voire la dernière, pour agir « même si l’on n’est pas partisans des verts ». Tous oublient de préciser que depuis sa création cette journée à la gloire de la guerre sainte menée par le Hezbollah est placée sous la couleur verte.

Quiconque dupé par ces appels descend dans la rue à l’appel de ces messieurs mal intentionnés sera comptabilisé contre son gré comme un partisan des islamistes modérés comme Moussavi ou encore comme le partisan du Hezbollah !

D’après nos contacts, les Iraniens ne seront pas au rendez-vous. Cette nouvelle journée verte sera encore un échec. Au lendemain de cet échec annoncé, le régime fera semblant d’accuser Moussavi de trahison pour arracher un soutien occidental à son encontre.

© WWW.IRAN-RESIST.ORG
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Pour en savoir + :
 Iran : Le Chemin Vert de l’Espoir porterait-il bien son nom ?
 (19 AOÛT 2009)