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Iran : La semaine en images n°89
01.11.2009

Cette semaine Téhéran devait donner « sa réponse » à l’offre internationale pour la réduction de son stock d’uranium enrichi. Les Américains et les Occidentaux qui s’attendaient à une réponse positive avaient joué l’apaisement à fond : Obama avait envoyé son ami Erdogan en Iran avec les éloges plein la bouche et les Six dans leur totalité s’étaient gardés de faire connaître l’avis des inspecteurs de l’AIEA sur la visite de l’usine d’enrichissement de Fordo. Cette complaisance a convaincu Téhéran que les Américains étaient en position de faiblesse et qu’il pouvait répondre négativement. C’est ce qu’il a fait en soignant la mise en scène : en faisant prévaloir une unité nationale sur la question de l’enrichissement. Ce fut un rendez-vous raté. Le tout et un peu plus en images avec des ratés et aussi de grandes surprises.



Inspection en catimini | Cette semaine toute en mises en scène a commencé par un événement que le régime ne pouvait pas truquer : la visite de sa seconde usine d’enrichissement par les inspecteurs de l’AIEA.

Il y a deux mois, Téhéran a accepté la reprise des négociations pour échapper à des sanctions. Il s’agissait de sa part non pas d’un pas en avant mais d’une reculade tactique. Une fois le rendez-vous fixé pour le 1er octobre à Genève et la menace des sanctions éloignée, il s’est mis à enchaîner les provocations pour pousser les Américains à évoquer à nouveau des sanctions unilatérales et ainsi diviser durablement les Six pour provoquer une panne dans le processus d’apaisement proposé par ce groupe.

L’une de ces provocations a été l’annonce d’une seconde usine d’enrichissement : Washington n’était pas tombé dans le piège et Téhéran avait dû accepter que les inspecteurs la visitent. Quand le régime a rencontré les Six à Genève, il devait jouer la carte de l’apaisement qui va de pair avec les négociations : pour montrer sa bonne foi, il s’est à nouveau engagé à honorer sa parole en autorisant la visite de cette seconde usine. Il s’est aussi engagé à échanger une partie de son stock d’uranium enrichi contre du combustible nucléaire pour son réacteur de recherche, un équipement qui date des années 60.

Si Téhéran avait appliqué ces engagements en temps et en heure, il aurait donné son accord pour l’échange avant la visite. On aurait alors assisté à un autre échange, cette fois de bons procédés, avec un avis favorable de l’AIEA sur le caractère bénin de ce second équipement d’enrichissement. Mais étant donné que Téhéran n’avait pas donné sa réponse et avait de manière indirecte remis en cause la possibilité d’une réponse positive, il appréhendait cette inspection. Il s’est donc montré fort discret sur cette visite, la même règle a été observée par l’AIEA.

Cette discrétion s’est traduite par un traitement minimum dans les infos des deux côtés. Téhéran pour ne pas faire de vague, et l’AIEA car elle réserve son diagnostic pour plus tard et en fonction de la réponse définitive des mollahs à l’échange « stock contre combustible ». Téhéran a même évité de prendre en image les fameux inspecteurs. Les seules photos existantes sont signées AFP.
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Une visite à la dérobée | On ne se souvient même plus de cette visite tant elle a été discrète. Cependant, les mollahs pourraient à nouveau en entendre parler car ils n’ont pas agi comme l’attendaient les Américains, notamment vis-à-vis de leur émissaire, le Premier ministre Erdogan qui était venu acheter un apaisement avec des contrats plein les bras et un discours très anti-occidental et anti-israélien très proche de celui des mollahs. Il s’agissait en fait pour Washington de montrer aux mollahs qu’ils pourraient garder leur spécificité s’ils devenaient les alliés des Etats-Unis.

Fait rarissime, dans cette visite toute en symboles, Erdogan s’était rendu en Iran avec son épouse portant une tenue islamique très sobre : il s’agissait pour les Américains de montrer aux mollahs quelle attitude de leur part vis-à-vis des femmes serait acceptée par les Etats-Unis.

Madame rêve | Nous nous sommes donc attachés à suivre le parcours de Mme Erdogan. Les images sont terribles. La première dame turque ne semblait pas ravie d’être là en mission pour le Grand Satan. On a aussi été déçu par le machisme du Premier ministre turc qui n’a pas daigné prendre la main de son épouse en descendant les marches. Et en authentique macho, il a aussi vite largué l’épouse symbole pour aller gambader avec le ministres iranien des affaires étrangères. On la voit à peine au troisième rang marchant derrière son mari.
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Dès le lendemain de cette soirée, on n’a plus vu Mme Erdogan. Les caméras étaient toutes braquées sur le Premier ministre turc que le régime a montré comme un beau trophée, preuve que l’Amérique se traîne à ses pieds. La preuve est la différence de couvertures accordées aux inspecteurs et à Erdogan. (cliquez puis zoomez pour agrandir une ou deux fois)
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Après des échanges de vue avec le président, Erdogan est allé à la rencontre du Guide (qui n’a pas l’air mort, ni empaillé). Il a fini sa tournée à la chambre de commerce de Téhéran, surnommée par les connaisseurs comme le véritable Parlement de la république islamique d’Iran.
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On a beaucoup parlé, mais en l’absence d’un accord sur l’échange « stock contre combustible », Erdogan a quitté le pays très discrètement sans même une conférence de presse. Il n’y a même pas eu de photos de cérémonie de son départ !

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La réponse | On n’a pas remarqué ce départ à la dérobée d’Erdogan, car le lendemain, Téhéran donnait « sa réponse » à l’AIEA et dans un déplacement en province dans son discours public, Ahmadinejad évoquait la possibilité d’une coopération avec les Six.

Le « discours public » est un élément de propagande : il se veut la preuve de l’adhésion des Iraniens à la politique nucléaire du régime. Pour mettre en valeur cette communion, les médias du régime évoquent toujours un « accueil extraordinaire du peuple, des foules en délire ». Il y a même des images pour le prouver, sauf qu’elles sont truquées : le régime ajoute du monde avec photoshop. Cette semaine, nous avons une preuve supplémentaire de cette supercherie.

En Iran, l’espace pour les rassemblements de badauds pour écouter le président est coupé en deux : à gauche pour les femmes (en tchador noir), à droite pour les hommes ou vice et versa. La semaine dernière, apparemment deux personnes différentes ont fait les trucages puisque sur l’une des photos, on a cette division et pas sur l’autre.
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De fait, Ahmadinejad a probablement parlé devant un parvis vide. On peut aussi parier que sa visite n’a pas déplacé les foules dans les rues. Une image aérienne montre comment le régime peut simuler la foule.
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En vérité, ceux qui se déplaçaient étaient payés avec des rations, de sucre et des bons d’achats. Sous l’effet des sanctions, depuis plusieurs mois, le régime a remplacé ces dons en nature par des allocations en cash qui ne valent rien avec une inflation supérieure à 60%. Il a ainsi perdu le soutien de ses derniers fans. Et si les gens se réunissent, ils seraient plutôt intéressés par l’annonce d’un changement de la politique nucléaire et la fin des sanctions que par l’annonce de la poursuite de l’une et de l’autre.

En raison de ce désaveu, le régime ne peut donner une couleur populaire à son programme nucléaire. C’est pour contourner cet obstacle qu’il a créé de toutes pièces une opposition interne à Ahmadinejad qui tout à fait par hasard rejette à 100% tout compromis sur le nucléaire. Cette semaine, Téhéran a ainsi remplacé des démonstrations spontanées de la foule par l’annonce d’un soutien spontané de Moussavi et Karroubi au refus de tout compromis sur le nucléaire !

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Rencontre en tête-à-tête devant la foule | Dans le même genre de spontanéité, preuve d’une belle entente nationale, le Guide recevait les étudiants qui dans le bestiaire du régime sont classés au rayon dissidents internes hostiles à Ahmadinejad (mais pro-régime). Tout d’un coup, un étudiant s’est levé pour critiquer le Guide !
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Ce héros a remis en cause son manque d’impartialité dans les évènements récents et a aussi critiqué la radio et télévision du régime qui nous éloigne des enseignements de la révolution islamique. il lui a dit que tout pouvait être mieux avec un peu plus de tolérance islamique ! Le Guide a été charmé ! Et par la même occasion, un nouveau faux opposant est né en la personne de cet étudiant exemplaire.
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Pas dupes | Cette belle unité entre le guide, l’étudiant, le président et ses opposants a un revers. La réalité.

Dans le monde réel : il y a de plus en plus de pauvreté. Cette semaine, le régime a annoncé le tarif de ses allocations en cash dans l’avenir : 24 dollars par personne, ce qui fait moins de 100 dollars pour une famille. C’est bien peu car le revenu moyen des familles est de 250 dollars et le seuil de la pauvreté à 800 dollars. Dans le monde réel, les gens croisent souvent des piquets de grève comme ici devant les Télécoms iraniens (ITI) où les 1000 employés des appels internationaux n’ont pas été payés depuis 9 mois.
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On peut aussi croiser des manifestations ouvrières. Ici à Ahwaz, on voit les 2000 employés de l’usine de fabrication de pipelines qui n’ont pas été payés depuis 13 mois. Le slogan que l’on entend souvent dans ces manifs est : « Je préfère la mort à cette vie sans honneur ».
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Dans la vraie vie où tout va mal, les mollahs qui ne sont pas dupes organisent des démonstrations de force des miliciens où l’on casse la gueule aux manifestants factices. Il y a trois semaines, le spectacle était à Téhéran avec l’incendie du bazar qui est devenu un foyer de mécontentement. Cette semaine, le spectacle avait lieu les 26 et 27 octobre à Ispahan, une ville commerçante qui est également sous pression car elle est très mal traitée par le régime.
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L’autre réponse | Si on devait faire un bilan de cette semaine avec les inspecteurs qui n’ont pas trouvé leur public, Erdogan qui n’a pas fait mouche, les mollahs qui ont été privés de leur buzz par la censure de leur réponse dans les médias occidentaux, ou encore l’épisode de l’étudiant critique qui est tombé dans les oubliettes de l’info ; on peut à juste titre parler d’une semaine de rendez-vous manqués.

Cet enchaînement de rendez-vous manqués a fini en apothéose par la réponse des bazaris d’Ispahan au spectacle qui avait lieu les 26 et 27 octobre dans leur ville : le 28 octobre, dans la rue où a vécu l’une des figures de la révolution islamique, sur plusieurs centaines de mètres, les commerçants ont arboré à l’entrée de leurs magasins des drapeaux iraniens sans l’insigne de la république islamique. Il y a une semaine, nous invitions les Iraniens à coudre des drapeaux iraniens pour marquer leur rupture avec ce régime. La désobéissance civique est en marche.
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