Iran : Le régime fait front car il craint les sanctions 30.09.2009 A deux jours d’une rencontre avec les Six à sa propre initiative, Téhéran a affirmé qu’il ne céderait pas d’un millimètre sur ses droits nucléaires, qu’il n’arrêterait pas une seconde l’enrichissement et qu’il ne négocierait que sur ses propres propositions à propos de la paix et du désarment dans la région. Différents composants du régime ont apporté leur solidarité avec cette option. | Décodages | En juillet dernier, les Six avait menacé d’adopter de nouvelles sanctions contre l’Iran à la date du 25 septembre pendant le Sommet des G20 à Pittsburgh au cas où les mollahs n’auraient pas encore suspendu leurs activités nucléaires ou encore accepté des négociations sur les modalités de cette suspension. Bien que Téhéran soit très affaibli par les sanctions déjà en place, il ne peut pas s’asseoir à la table des négociations pour avoir un dialogue apaisé avec les Six car cela suppose un apaisement avec les Etats-Unis, protecteurs par excellence d’Israël. Cet apaisement est impossible car Téhéran a fondé sa puissance sur une opposition frontale à Israël, opposition qu’il utilise pour embrigader la rue arabe pour s’en servir afin de déstabiliser les Alliés arabes des Etats-Unis. Si Téhéran changeait de slogans et d’attitude, il se priverait de son seul moyen efficace de pression sur les Etats-Unis. proposition iranienne | A l’approche de la date limite de Pittsburgh, Téhéran a annoncé qu’il pourrait accepter une rencontre si on y parlait de la paix ou du désarmement et non de son programme nucléaire. Ces demandes concernaient le conflit israélo-palestinien et aussi l’arme nucléaire d’Israël. En proposant un dialogue, Téhéran est allé dans le sens de la demande de reprise des négociations et en choisissant l’ordre du jour, il est resté dans son rôle de porte-parole de la rue arabe. Téhéran imaginait que sa proposition allait être refusée car Washington utilise la bombe israélienne comme une extension de sa dissuasion nucléaire dans la région. En fait, peu avant la date limite de Pittsburgh, Téhéran n’a pas accepté le dialogue, il a opté pour une reculade tactique avec la certitude qu’on lui dirait non et que cette réponse affaiblirait la position américaine au sein des Six. Washington qui s’attendait à cette ruse a refusé effectivement la proposition iranienne. Il s’agissait aussi d’une tactique. Cette ruse a trompé les mollahs : pour stigmatiser l’absence de souplesse de Washington, ils ont répété leur offre en insistant lourdement sur leur ouverture. C’est alors que Washington a accepté rendant impossible toute remise en cause de la rencontre par Téhéran. Piégé, Téhéran a essayé de s’échapper avec une déferlante de provocations pour énerver Washington et le pousser à claquer la porte et ainsi affaiblir sa position au sein des Six. Il a ainsi évoqué la construction d’un second centre d’enrichissement. Les Américains ont esquivé toutes les provocations et sont même allés au-delà en précédant la demande iranienne de dénucléarisation d’Israël avec l’adoption au Conseil de Sécurité d’une résolution extraordinaire « pour un monde sans arme nucléaire ». Ils ont ainsi rendu aussi illégal tout refus de coopération iranienne avec l’AIEA. Cette tentative d’échec et mat préventif a déclenché la colère de Téhéran qui s’est lancé dans des tirs de missiles comme un ultime moyen pour faire capoter la rencontre. Encore une fois, les Américains ont esquivé. Ainsi à l’issue de 22 jours de provocations, Téhéran a échoué et devra s’asseoir à une table de négociation avec les Américains car il est à l’origine de cette initiative. Il se retrouve dans un dialogue apaisé avec l’ennemi, une situation très inconfortable vis-à-vis de son engagement envers la rue arabe. dernier baroud de Téhéran | C’est fort intéressant car sa première et finalement unique réponse a été de rappeler plusieurs fois les raisons de sa présence à Genève à savoir le désarmement et la paix dans la région qui sont les deux motifs qu’il avait invoqués pour rester dans les limites de sa politique de séduction et d’embrigadement de la rue arabe. Pour donner le plus de relief possible à cette position anti-apaisement, le régime des mollahs l’a faite dire par divers intervenants qualifiés de « modérés » ou de « conservateurs », pour prouver un consensus national sur le sujet. On a ainsi entendu évidemment, Salehi, le responsable « modéré » du programme nucléaire, le président (conservateur) Ahmadinejad, et enfin son adversaire soi-disant modéré Ali qui préside l’Assemblée Consultative Islamique. Pour marquer encore plus ce consensus interne et aussi parler en position de force pour plaire à la rue arabe, 239 députés de l’Assemblée Consultative Islamique ont adressé une déclaration commune au groupe des 5+1. Ces députés ont apporté « leur soutien au programme nucléaire, à la lecture iranienne du TNP et aussi à un second centre d’enrichissement » avant d’appeler les Six à accepter l’offre de propositions iranienne tout en les mettant en garde que s’ils « répétaient leurs erreurs du passé, l’Assemblée Consultative Islamique prendrait les mesures appropriées pour diversifier les options du gouvernement iranien ». analyse | Cette déclaration figure depuis hier soir à la une des sites d’info du régime et aussi au menu de ses médias notamment les télévisions destinées à la rue arabe. Cependant, il ne suffit pas de dire une même chose 239 fois sur 4 chaînes pour qu’elle ait l’air pertinente, forte, intimidante. Loin de l’impression qu’elle souhaite donner, cette déclaration ne vaut rien car l’objectif de Téhéran n’est pas de quitter la table des négociations –et écoper de nouvelles sanctions pour manque de coopération-, mais de pousser les Américains à la faute. De fait, cette déclaration n’est que mollesse. L’objet de l’analyse n’est donc pas l’apparente dureté (pommade pour les cœurs arabes), mais la mollesse qu’elle cache. Cette mollesse est la preuve que Téhéran a peur d’aller plus en avant dans la provocation, du moins à la veille de la rencontre. Il craint les sanctions.
| Mots Clefs | Décideurs : P5+1 (les Six) |
| Mots Clefs | Institutions : Diplomatie (selon les mollahs) |
|