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Roxana Saberi : L’Iran manipule les médias !
29.04.2009

Sur un fond de tension avec les Etats-Unis, fin janvier 2009, Téhéran s’en est pris à Roxana Saberi, une Iranienne établie aux Etats-Unis mais travaillant en Iran. Téhéran espérait une intervention musclée de l’administration Obama afin de crier à l’ingérence dans ses affaires internes pour bouder tout futur dialogue avec les Américains. Le sort de Roxana Saberi, otage du régime des mollahs, est donc lié aux évolutions des relations entre Téhéran et Washington. Pour pronostiquer des changements dans son cas, il faut s’intéresser aux passes d’armes entre les deux Etats.



La guerre entre Téhéran et Washington se fait (depuis des années) par des chemins détournés. Les Américains font pression sur Téhéran par des sanctions économiques sur son programme nucléaire. Ils souhaitent affaiblir Téhéran pour le pousser à faire compromis sur ses choix idéologiques et ses liens avec le Hezbollah afin de rendre possible et politiquement correcte une entente avec ce pays. Cette entente est vitale pour les Etats-Unis car elle leur permettrait d’accéder à l’Asie Centrale. En prenant le contrôle de cette région, les Etats-Unis priveraient la Chine et la Russie de ses très importantes réserves gazières nécessaires à leur épanouissement économique. Pour battre ses deux adversaires de l’Est, Washington doit arriver à une entente avec les mollahs.

Cette option ne convient pas à Téhéran, car il tient le Hezbollah pour son assurance vie : il peut l’utiliser pour agiter la région, si on le menace. C’est pourquoi Téhéran a toujours fuit ce dialogue pour faire montrer les enchères et monnayer ce précieux droit de passage pour obtenir un arrangement : une reconnaissance de leur rôle d’agitateur régional au Moyen-Orient et la fin des sanctions pour ses milices le Hamas, le Hezbollah, le FPLP et d’autres encore.

Sous Bush, Téhéran fuyait en exigeant un dialogue sans condition préalable de suspension de ses activités nucléaires, car il était sûr que Bush refuserait. Obama a pulvérisé ce prétexte, en proposant un dialogue sans condition préalable aux mollahs. Obama tendait la main aux mollahs pour les engager dans un processus d’apaisement et de compromis (en particulier sur le Hezbollah).

En réponse à cette invitation au dialogue aux conséquences néfastes pour son avenir, le régime des mollahs s’est lancé dans des déclarations anxiogènes de progrès nucléaires et balistiques et il a aussi arrêté la journaliste Roxana Saberi pour faire sortir Obama de ses gonds et clore ce projet d’apaisement.

Washington a alors mis en place sa tactique d’esquive qui consiste à ignorer les provocations de Téhéran afin de ne rien dire ou faire qui puisse donner un prétexte aux mollahs à fuir le dialogue qui les engagerait dans un processus d’apaisement et de compromis.

Par la faute de cette tactique d’esquive, Téhéran n’a pas pu obtenir ce qu’il voulait grâce à la prise en otage de Roxana Saberi. Dès lors, elle est devenue une otage inutile dont la détention nuisait à l’image du régime des mollahs. Téhéran a alors donné des signes de vouloir s’en débarrasser légalement via un procès en appel. Ahmadinejad a annoncé qu’une enquête était nécessaire pour vérifier les faits qui lui étaient reprochés et a demandé qu’elle soit défendue par les meilleurs avocats du pays.

Nous étions alors à la veille de la conférence de Genève (Durban 2), un rendez-vous au cours duquel Téhéran s’apprêtait à infliger une déculottée aux Etats-Unis dans leur guerre privée. En fait, Téhéran a lâché du leste sur Saberi car il était certain d’avoir trouvé un autre moyen contre les Etats-Unis à cette conférence.

En se basant sur l’opinion arabe que le Conseil de Sécurité protège Israël dans un esprit de partialité, Téhéran a cherché à créer un front uni d’Etats musulmans pour remettre en cause la légitimité du Conseil de Sécurité et de ses résolutions passées. Cette manoeuvre était destinée à remettre également en cause les résolutions contre son programme nucléaire, résolutions qui légitiment les sanctions américaines contre l’Iran : en cas de succès, Téhéran aurait privé définitivement ou ponctuellement les Etats-Unis de tout prétexte pour continuer leurs sanctions contre l’Iran. Et en l’absence de sanctions, Téhéran pourrait négocier plus facilement un arrangement avec les Etats-Unis.

Or, le 20 avril, Téhéran n’a pas réussi à créer ce front de rébellion contre le Conseil de Sécurité. Privé de moyen de pression sur Washington, Téhéran a immédiatement révisé ses positions sur Roxana Saberi pour pousser Washington à bouger.

Alors que normalement on ne sait jamais ce qui se passe dans les prisons du régime, Téhéran autorise désormais le père de la prisonnière à parler quotidiennement à l’AFP pour évoquer la fragilité de l’état de santé de sa fille ou ses difficultés de son avocat de la rencontrer.

Téhéran applique en fait le scénario de base qu’il utilise pour recycler ses agents en soi-disant dissidents pour les infiltrer parmi les vrais opposants exilés : une condamnation médiatisée suivie d’une grève de la faim et des annonces quotidiennes de l’entourage du prisonnier sur son état alarmant, plus des comités de soutien, des pétitions etc…

Loin d’encourager les Américains à intervenir, cette configuration médiatique connue a fait craindre une manipulation médiatique peut-être avec la complicité du père de la prisonnière, voire avec la prisonnière elle-même.

Il y a deux semaines, quand tout cela a commencé, l’administration Obama a détecté une menace pour son approche froide avec tactique d’esquive tactique indissociable de l’invitation au dialogue.

Alors que Téhéran espérait une intervention politique américaine peut-être liée à son dossier nucléaire, Washington a décidé d’y envoyer un émissaire humanitaire pour désamorcer la crise et aussi vérifier la véracité des faits de visu.

Washington a choisi pour cette mission délicate le révérend Jessy Jackson, ex-1er candidat noir du Parti Démocrate à la présidence américaine qui est à la fois un vrai spécialiste de ce genre de mission, mais aussi un ami du Hezbollah.

Le 20 avril, après Durban 2, et à la reprise des annonces médiatiques sur la santé fragile de Roxana Saberi, Jessy Jackson a fait part de son intention de se rendre en Iran à la tête d’une délégation multiconfessionnelle pour faciliter la libération de Roxana Saberi.

Téhéran n’a donné aucune suite à cette demande, car il ne souhaite pas une issue humanitaire, mais un tapage médiatique et une issue politique. La famille de la victime qui parle à tous les artisans du tapage (AFP, RSF) n’a également pas établi de contact avec Jackson.

Le 25 avril, le révérend Jessy Jackson a fini par parler à des responsables iraniens, mais n’a pas encore obtenu de visa pour se rendre en Iran. Téhéran espère encore une intervention politique.


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A lire absolument :
- Iran : Affaire Saberi – Ebadi – Ghobadi
- (23 AVRIL 2009)

Article complémentaire :
- Iran : Roxana Saberi, otage américain des mollahs !
- (9 AVRIL 2009)

| Mots Clefs | Institutions : Diplomatie (selon les mollahs) |
| Mots Clefs | Terrorismes : Prise d’otages |

| Mots Clefs | Zone géopolitique / Sphère d’influence : USA |
| Mots Clefs | Enjeux : Rétablir les rel. avec les USA & Négociations directes |
| Mots Clefs | Enjeux : Sanctions Ciblées en cours d’application |