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Iran : Le provocateur en petite forme
08.09.2010

Il y a un mois, les Américains ont renforcé leurs sanctions contre Téhéran. D’ordinaire quand Washington augmente sa pression, Téhéran privilégie la provocation pour l’engager dans une escalade guerrière afin de le pousser à abandonner par peur d’une guerre perturbant l’approvisionnement pétrolier mondial. Mais contre toute attente, Téhéran a alors cessé ses provocations pour adopter un ton modéré. A cette occasion, il avait aussi cessé ses menaces contre Israël ou encore les pétroliers transitant par le détroit d’Ormuz pour évoquer une nouvelle doctrine militaire axée sur des armes défensives et une diplomatie axée sur le dialogue. Cette cure de modération avait en fait été décidée pour rassurer les jeunes miliciens du Bassidj et les Bazaris qui ont été durement affectés par les sanctions afin qu’ils ne laissent pas tomber le régime. Vendredi dernier, ces gens ont encore boudé une grande manifestation officielle. Téhéran a arrêté cette modération sans contenu et repris le cours de ses provocations via le champion du genre, Ahmadinejad, avec une remise en cause de la version officielle des attentats du 11 septembre et une nouvelle menace de destruction d’Israël.



Comme toujours, le choix des provocations n’est pas dû à un hasard, mais dû à des objectifs précis. En réponse à ces deux provocations et les autres qui suivront sans doute, Washington qui au cours des derniers jours n’avait cessé de parler de la nécessité de nouvelles sanctions a immédiatement écarté cette option en se disant très satisfaits par les dernières sanctions adoptées par le Conseil de Sécurité et par l’Europe. C’est là également une réponse codée qui nécessite un décodage pour savoir où va cette drôle de crise.

Il y a 3 mois, quand le Conseil de Sécurité a adopté de nouvelles sanctions, Téhéran a dit qu’elles étaient bonnes pour la poubelle car elles étaient des reformulations des sanctions existantes mises en place par l’ONU ou les Etats-Unis à partir de 2008.

Il en va de même pour les sanctions Européennes, elles ne contiennent aucune mesure nouvelle contre les mollahs. En insistant sur ces deux textes, Washington vient en fait de tirer un trait sur de nouvelles sanctions, ce qui laisse supposer qu’il juge l’état du régime très préoccupant.

Le choix des 2 provocations de cette semaine (11/9 et Israël) est aussi le signe que Téhéran partage ce diagnostic américain, mais pas dans le sens où on l’imagine.

En effet, le principe de base de la provocation a toujours été de pousser Washington à attaquer l’Iran pour que le régime se pose en victime afin de sortir vainqueur de la bataille médiatique et juridique pour exiger de compensation comme la fin des sanctions et mêmes des indemnités.

Pour provoquer cette attaque, Téhéran a dès le départ utilisé la menace contre Israël. Mais, il faut préciser que ce choix primaire n’a jamais débouché sur aucune escalade.

En effet, Washington qui sanctionne les mollahs pour les forcer à devenir ses alliés régionaux n’a jamais fait le moindre geste hostile par peur de les renverser. En revanche, il a utilisé ses menaces pour demander l’adoption de nouvelles sanctions onusiennes, mais une fois qu’il les a obtenues, il n’a plus pris au sérieux les menaces des mollahs contre Israël. Quand Téhéran a insisté en augmentant la dose de la menace en montrant des photos de tirs de missiles longue portée, Washington a dit que Téhéran trichait car il n’avait pas cette capacité balistique.

Cette attitude américaine a forcé Téhéran à se montrer plus explicite. Il a renoncé à son positionnement de victime en évoquant qu’il allait attaquer les pétroliers de passage dans le golfe Persique. Cela avait pourtant un défaut : il n’y a pas que des pétroliers américains dans cette zone, mais aussi des pétroliers approvisionnant la Chine qui est un des rares alliés des mollahs. C’est pourquoi la menace de fermeture du détroit d’Ormuz a été très fluctuante.

En fait, Téhéran a perdu beaucoup de temps avec cette politique très bruyante d’amplification délibérée de la crise sans jamais réussir à provoquer la moindre escalade.

In fine, il a été sans arrêt sanctionné et s’est trouvé de plus en plus affaibli. Washington a alors eu peur que le régime tombe et laisse la place à un Etat laïque qui ne peut pas servir ses intérêts régionaux. Il a alors autorisé certains de ses alliés à l’aider financièrement. Téhéran a profité de l’occasion décuplé de provocations en se montrant plus explicite sur sa capacité de couler des pétroliers en dévoilant une puissante torpille d’origine chinoise. Les médias occidentaux ont censuré ses annonces.

In fine, début août 2010, le régime des mollahs avait été obligé d’affirmer qu’il n’avait qu’un seul objectif : couler des pétroliers avec ses sous-marins de poche ou ses vedettes rapides. La presse occidentale avait alors parlé du sujet car Téhéran avait enfin fait état d’une menace sérieuse. Il devait dévoiler des armes destinées à renforcer cette capacité de frappes. Mais dans le cadre de sa cure de modération pour rassurer ses Bassidjis et les Bazaris, il a renoncé à cette radicalisation.

Ce dimanche, en décidant de rompre sa pseudo politique de modération, le régime n’a pas évoqué ces menaces concrètes, mais la menace contre Israël qui n’a jamais été prise au sérieux. Quant à l’autre provocation, le représentant du régime n’a même pas osé aller au bout de son accusation. Le régime a joué petit. Il a manqué de courage.

Cela n’a rien d’étonnant : le régime a perdu deux de ses alliés les plus importants qui ont la capacité de le renverser. Il a le moral dans les chaussettes.

Cela veut dire que le régime considère la menace du Bazar ou de sa rue comme plus terrible que la menace des sanctions américaines. La marche arrière des Américains montre que ces derniers sont aussi dans le même cas de stress.


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Pour en savoir + :
- Iran : Un zeste de repli
- (20 AOÛT 2010)

| Mots Clefs | Institutions : Diplomatie (selon les mollahs) |
| Mots Clefs | Institutions : Provocations |

| Mots Clefs | Enjeux : Sanctions Ciblées en cours d’application |