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Iran - Jundallah : La dernière tentative de Washington
16.12.2010

Trente-neuf personnes ont été tuées et plus de 50 blessées mercredi dans une mosquée de la ville iranienne de Chahbahar lors d’un attentat suicide perpétré par le groupe armé islamo-séparatiste Jundallah qui opère depuis le Pakistan, allié des Etats-Unis. La terreur est normalement censée déstabiliser les Etats, mais cette bombe est une aubaine pour les mollahs car ils peuvent évoquer la menace d’un éclatement en cas de chaos pour dissuader les opposants de se lancer dans un soulèvement. Ce n’est pas un hasard, Washington a agi pour sauver un régime en perdition dont il a besoin pour contrôler la région.



C’est une situation très étrange, Washington sanctionne les mollahs depuis des années pour parvenir à une entente car il a besoin d’un allié islamiste pour agiter les régions musulmanes de Chine et de Russie. Mais les mollahs refusent de céder malgré la pression car l’entente les obligera à autoriser le retour en Iran des pions islamistes de Washington qui pourraient prendre le pouvoir de l’intérieur par une révolution de couleur. Ce refus a amené Washington à accentuer ses accusations et ses sanctions, mais il s’est toujours limité dans ses efforts pour diaboliser les mollahs afin de ne pas auto-saboter l’entente et s’est gardé de trop renforcer ses sanctions car il risquait de déstabiliser un régime haï permettant au peuple de profiter de son affaiblissement et du chaos pour le renverser. Cette double autocensure a incité les mollahs à refuser avec plus d’assurance et à aligner les provocations pour se diaboliser ou mieux encore pour engager Washington dans une escalade afin qu’il recule devant le risque d’une nouvelle guerre. Téhéran est alors devenu plus menaçant que Washington.

Les débuts du Jundallah | En 2006 pour casser cette assurance et devenir plus menaçant, Washington a commencé des frappes terroristes via le Jundallah, l’OMPI et le Pejak et des médias iraniens qu’il finance ont prétendu que ces groupes allaient tenir les Pasdaran occupés pour permettre au peuple de se soulever.

La réaction du régime a été surprenante. Connaissant l’attachement viscéral des Iraniens à leur pays, il a organisé des attentats pour mettre les Iraniens face au risque d’une balkanisation. Le régime a ainsi marqué un point, mais il a aussi admis sa peur face à la nouvelle intimidation américaine. Devant le manque de succès de cette intimidation, Washington a gommé le côté séparatiste et islamiste de ses mercenaires et il est revenu à une intimidation économique : via des sanctions bancaires, il a commencé à assécher les réserves en devises du régime pour réduire sa capacité d’approvisionnement afin que la peur d’une pénurie susceptible de dégénérer en soulèvement fasse reculer les mollahs.

De plus en plus affaibli, la première réaction des mollahs a été de diversifier leurs réseaux bancaires en créant des banques relais en Afrique, en Asie Centrale et du côté de la Malaisie. Dans le même temps, ils ont augmenté les prix pour habituer les Iraniens à consommer peu. Le seuil de pauvreté est alors passé de 400 dollars à 800 dollars alors que les salaires de 85% de la population n’excèdent pas les 200 dollars. Les mollahs ont aussi supprimé les avantages de leurs miliciens comme les aides en nature. Les miliciens sont passés sous le seuil de pauvreté. Ils ont commencé à bouder les manifestations officielles. Le régime s’est vu menacé. Avant qu’il ne soit trop tard, il a décidé d’organiser sa propre révolution de couleur sous la direction de deux de ses hauts dirigeants Moussavi et Karroubi avec le slogan du retour aux valeurs de Khomeiny c’est-à-dire le refus de tout compromis avec les Américains. Pour mettre en scène cette fausse révolution appelée le Mouvement Vert (couleur de l’islam), le régime a autorisé les manifestations. L’aventure a viré au soulèvement avec des slogans hostiles au système islamique. On n’a pas vu les jeunes miliciens ou des troupes de Pasdaran prendre part à la répression, ils ont été remplacés par des éléments confirmés des Pasdaran, les agents en civil qui ont un passé lourd et risquent la mort dans le cas d’un changement de régime quel qu’il soit.

La première panne du Jundallah | A ce moment-là, les groupes terroristes financés par Washington n’ont rien tenté pour aider le peuple. Chacun a compris que Washington avait menti depuis le début en prétendant le contraire d’autant plus qu’Obama, ce formidable lauréat du prix Nobel de la Paix, partisan des guerres préventives comme son prédécesseur, a fait semblant de ne pas voir le soulèvement iranien.

Après ce soulèvement, Washington a stoppé les frappes pour ne pas déstabiliser le régime alors qu’il était très affaibli. Il a alors cherché à approcher ses islamistes des partisans du Mouvement Vert, mais Téhéran n’a pas été sensible à cette tentative d’alliance, il a profité de cette occasion pour promouvoir sa fausse opposition sur les médias américains. Le peuple a boycotté tous les appels à manifester de cette fausse opposition qui veut la continuité du modèle existant, mais Washington a sans cesse parlé d’importantes mobilisations pour que l’on ne parle jamais des vrais opposants, mais aussi pour entretenir le terreau pour sa propre révolution de couleur. Parallèlement, il est revenu à des pressions d’ordre économique en interdisant les activités bancaires du régime en Malaisie et aussi en oeuvrant à la réduction progressive de ses réserves en carburants, espérant une capitulation ouvrant la voie à sa révolution de couleur.

En décembre 2009, peu avant une annonce attendue d’un renforcement des sanctions, Téhéran a simulé une mini-révolution sanglante avec ses acteurs au moment du deuil chiite d’Achoura pour amener Obama à les soutenir et ainsi se mettre en position de ne pas pouvoir alourdir ses sanctions. Washington a nié ce côté ultra-Khomeiniste et il a encore parlé d’une forte mobilisation avant de réitérer son offre pour un pouvoir partagé entre ses pions et les gens du Mouvement Vert, offre que Téhéran a refusé via des déclarations ultra-Khomeinistes de Moussavi et de Karroubi.

Les 2 retours du Jundallah | Washington a censuré ces propos et un peu dépité, a repris les sanctions contre les établissements financiers des mollahs et la réduction de leurs réserves de carburants qui étaient ses dernières cartes. Il a aussi renoué brièvement avec le Jundallah avant de tenter une entente en remettant des chefs de ce groupe aux mollahs avant de revenir à une version plus sanglante de cette option pour tenter de déstabiliser les mollahs en les entraînant dans une guerre contre les musulmans sunnites pour les brouiller avec le Hamas !

Le contexte actuel | De son côté, le régime a continué à baisser le pouvoir d’achat tout en cherchant l’escalade. Il continuait aussi à agiter sa fausse opposition. Cette rigidité a convaincu tout le monde qu’il fallait en finir avec ce régime. On a assisté à des boycotts successifs des manifestations du régime par les miliciens, les Bazaris et même les mollahs de base. Le régime a tenté de mobiliser les croyants avec des manifestations religieuses : le boycott a été plus important. On peut dire que le boycott a gagné du terrain chez les derniers partisans du régime, mais on ne peut pas nier un rejet de l’islam après 30 ans d’islamisme violent.

Comme en juillet 2009, Washington a tenté de sauver le système en approchant ses islamistes de ceux du Mouvement Vert (les faux exilés de la Campagne des ambassades vertes). Cette fois, le régime a accepté. Mais il n’a pas pour autant cédé. Il a comme à son habitude tenté de provoquer une grande guerre pour faire reculer Washington.

Entre temps, son effondrement a continué : la milice étudiante, un des fournisseurs des cadres du régime et par ailleurs chargée de l’animation du Mouvement Vert a lâché cette opposition fantoche avant l’une de ses manifestations, la Journée de l’Etudiant (qui marque l’engagement islamiste des universités). Le régime s’est alors réduit à ses dirigeants, ses commandants ou haut gradés des Pasdaran, du Bassidj et de l’armée, ses préfets, les dirigeants de sa fausse opposition. C’est une situation bien périlleuse car ceux de l’armée qui par essence n’ont pas pris part à la répression ou aux malversations du régime sont susceptibles de quitter le navire. Le régime est dans une situation précaire.

Réduit à presque rien et en train de fondre tout doucement, le régime a donné un coup d’accélérateur à ses provocations nucléaires. Puis avec l’aide de sa fausse opposition, il a commencé à diffuser des rumeurs sur l’existence de troupes fidèles et aussi à parler d’une très forte pollution cancérigène pour expliquer l’absence de mobilisation pour la Journée de l’Etudiant, mais aussi pour empêcher tout rassemblement car en l’absence de miliciens, cela peut vite dégénérer en soulèvement.

Après la Journée de l’Etudiant, le régime a insisté sur la pollution de l’air et sa fausse opposition a repris "cette info" car ce jeudi à l’occasion d’Achoura, elle devait célébrer la commémoration de la fausse mini-révolution sanglante de décembre 2009 ! Sans ses animateurs attitrés, elle allait perdre la face ! Comble de malchance, il a beaucoup plu ces derniers jours : l’excuse de la pollution a été éliminée.

Du coup, branle-bas de combat : les chefs du Mouvement Vert n’ont lancé aucun appel à la manifestation ! Moussavi a disparu alors qu’en décembre 2009, il aurait perdu son neveu dans la manifestation d’Achoura en 2009. De son côté, Karroubi a proposé que l’on remplace la manifestation par un débat entre lui et on ne sait qui, sur les revendications du Mouvement Vert et non sur les supposés martyrs. Le Mouvement Vert a aussi opté pour un repli. Il n’appelle pas ses partisans à la manifestation, mais à scander Allah Akbar après la tombée du jour (c’est-à-dire quand on ne peut plus voir le nombre de ses partisans).

Washington s’est retrouvé avec un système islamique en perdition de fond en comble. Il y a deux jours, Washington a commencé à ébruiter des rumeurs de frappes israéliennes via WikiLeaks pour provoquer un sursaut nationaliste ou du moins dissuader les militaires de quitter le navire qui coule, mais il n’a pas constaté d’appels de solidarité avec le régime ou sa fausse opposition. Il vient d’actionner le Jundallah pour préciser la menace d’une balkanisation. La frappe est aussi une nouvelle tentative pour provoquer une guerre entre sunnites et chiites.

Conscient de l’échec probable de ce projet guerrier et de son électrochoc pour sauver un régime fini, Washington a légèrement augmenté sa pression par une rupture diplomatique du Sénégal, pays relais pour les banques anonymes du régime. Les mollahs ont cependant trop à perdre et le peuple attend depuis trop longtemps. Washington n’est pas au bout de ses peines. Nous non plus car son président nobélisé peut faire pire en décidant une attaque préventive pour sauver le régime islamique dont il a besoin pour contrôler la région.


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Pour en savoir + sur notre analyse :
- Iran : La semaine en images n°147
- (12 DÉCEMBRE 2010)

article complémentaire :
- Iran : Obama va atteindre le seuil de l’absurdité
- (22 SEPTEMBRE 2009)

| Mots Clefs | Décideurs : OBAMA |
| Mots Clefs | Terrorismes : Jundallah |

| Mots Clefs | Résistance : Menace contre le régime |

| Mots Clefs | Enjeux : Option militaire |
| Mots Clefs | Zone géopolitique / Sphère d’influence : Israël |

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