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L’Iran et le grand gâteau chinois
24.03.2010

Washington a besoin des mollahs pour contrôler les musulmans de l’Asie Centrale pour s’emparer de cette région aux immenses réserves gazières afin d’en priver la Chine. Les mollahs exigent des contreparties excessives au Moyen-Orient, d’où la guerre d’usure américaine pour fatiguer les mollahs afin de leur proposer une petite révolution de couleur pour passer sous le giron américain. La clef du succès est de continuer cette guerre d’usure tout en évitant une escalade des sanctions. C’est pourquoi Washington tergiverse sur le sujet. Hier, cependant, il s’est écarté des figures de style pour préciser qu’il « ne voulait pas d’une escalade dans ses sanctions ». | Décodages |



Washington veut à tout prix éviter une escalade dans ses sanctions car plus de sanctions sera synonyme d’une très grande fragilisation économique d’un régime déjà très affecté. Les mollahs payent en fait le prix de 30 ans de leur mauvaise gestion qui a donné la priorité à l’import-export aux dépens de la production nationale et le réinvestissement des bénéfices dans de nouveaux outils de production. Quand Washington a commencé sa guerre d’usure, tout s’est rapidement effondré au point qu’aujourd’hui ils sont incapables d’assurer l’approvisionnement des marchés intérieurs. Les mollahs en sont arrivés à organiser une baisse délibérée du pouvoir d’achat ou de la consommation pour éviter des pénuries susceptibles de dégénérer en émeutes voire en révoltes capables de renverser leur pouvoir. Pour organiser cette baisse délibérée du pouvoir d’achat, ils ont tout d’abord bloqué les salaires avant d’adopter une loi de suppression des prix subventionnés qui entrera en vigueur dans les prochains jours. Ils se débarrasseront ainsi de 85% des Iraniens qui sont salariés ou assimilés. Mais ils n’ont pas oublié les autres puisque depuis une dizaine de jours, il est impossible en Iran de retirer de l’argent d’un compte bancaire : les gens sont invités à régler leurs dépenses en chèque, ce qui est difficile car en raison d’un taux astronomique de chèques sans provision, les commerçants refusent ce mode de paiement. Il n’y a aucun moyen de contourner ce plan de réduction forcée de consommation puisque les distributeurs des banques iraniennes sont fermés ou ne distribuent que de très grosses coupures en travellers chèque de 50,000 ou 100,000 tomans (50 & 100 $) ce qui est excessif pour un pays où le salaire moyen est de 200 dollars. Le système ne tient qu’à un fil. Le sanctionner plus serait de signer son arrêt de mort et la fin du pouvoir islamique dont Washington a besoin pour contrôler l’Asie Centrale. C’est pourquoi Washington évite d’aller en ce sens.

Mais Washington n’est pas le seul concerné. Ses projets d’entente avec les mollahs pour dominer en plus des réserves du Golfe Persique, celles de l’Iran et de l’Asie Centrale déplaisent fortement à la Grande-Bretagne, le n°1 mondial du marché pétrolier depuis 1908. Depuis le démarrage de la guerre d’usure de Washington contre les mollahs, la Grande-Bretagne a été systématiquement opposée aux points de vue de Washington. Elle a ainsi utilisé l’AIEA pour contrer les accusations nucléaires américaines, puis quand Washington a mis de côté ses accusations pour adopter une politique de dialogue, Londres a changé de discours sur le programme nucléaire iranien pour accuser Téhéran d’avoir la bombe afin d’entraîner Washington dans une spirale de conflits avec ses futurs alliés barbus pour ruiner la possibilité de cette entente.

Depuis que Washington évite de plus en plus ouvertement l’escalade dans ses sanctions avec ses prétextes parfois ridicules, Londres s’ingénie à démontrer l’artificialité des arguments. Ainsi quand Washington a écarté la possibilité d’un embargo sur l’essence au prétexte d’un refus de Lula, toutes les compagnies britanniques qui détenaient le marché iranien de l’essence à la hauteur de 60% se sont retirées pour le contredire et montrer que l’on peut très bien imposer ce genre de sanction. Elles ont au passage imposé aux mollahs cet embargo que Washington refuse d’adopter dans une optique de nuire à ce dernier. Cela a quand même bien secoué les mollahs qui ont toujours tenu la Grande-Bretagne pour un allié. Cette action a donné la mesure de l’enjeu.

En réponse, Washington a ignoré politiquement l’affaire, demandé à ses médias de ne pas en parler et a commandé au quotidien le Monde un article minimisant les effets réels de ce quasi-embargo. Puis profitant du désarroi provoqué par la trahison Britannique, il est allé proposer une nouvelle fois une entente aux mollahs en agitant sous leur nez la promesse d’autoriser la construction du pipeline Iran-Pakistan-Inde qui serait la source de revenus très importants. Les mollahs ont signé l’accord partiel avec le Pakistan. Mais n’y voyant qu’un signe de faiblesse de Washington, ils n’ont pas changé de comportement. Ils se sont même moqués de Washington en acceptant une offre qui n’est pas valide depuis quelque mois.

La réponse très structurée de Washington a poussé Londres à revenir avec plus de force à l’approche censée rendre l’entente politiquement incorrecte. Ainsi il y a trois jours, au moment où Obama présentait ses vœux à ses futurs alliés barbus, la chaîne publique britannique Channel 4 – qui avait invité Ahmadinejad à présenter ses vœux aux Chrétiens en 2008 – a cette fois diffusé un long documentaire sur l’aide apportée par Téhéran aux Talibans pour tuer les jeunes Américains. Cette autre tentative de Londres a subi le sort de sa bombe médiatique sur son embargo unilatéral : censure à Washington, petit article sans intérêt par le Monde.

Londres est revenu à la charge pour enquiquiner Washington avec la révélation que la Chine (que Washington accuse de sabotage anti-sanction) avait en fait commencé à se séparer des mollahs comme fournisseurs de pétrole. Comme on pouvait s’en douter, Washington a censuré cette autre information contraire à ses projets. Hier matin, Londres a cette fois publié un article sur le classement de l’Iran comme une « zone à risques » chez l’assureur Lloyds avant de rediffuser encore une fois l’affaire des Talibans sur le site du Time pour avoir au moins un buzz. Ces efforts ont été récompensés car on parle enfin de ces Talibans, mais aussi, la Chine, connue pour sa discrétion, a rejoint la Grande-Bretagne pour la rediffusion de l’affaire des Talibans car elle est la victime désignée des projets centrasiatiques de Washington.

C’est inouï car les deux pays ont un lourd passif.

Qu’à fait Washington ? Pour couper court aux efforts agaçants des Britanniques, Il a avoué qu’il « ne voulait pas d’une escalade dans ses sanctions ». Il a aussi envoyé Total parler aux Chinois de CNPC afin de leur proposer un partenariat sur le gigantesque projet gazier iranien de South Pars.

On partage l’Iran à l’insu de ses dirigeants. Washington les suppose sans doute déjà morts. Cela rappelle les caricatures où l’on voyait les grands empires européens attablés autour du grand gâteau chinois pour le dévorer. Cela n’arriva pas car peu après, ces prédateurs se sont dévorés entre eux. Mais l’histoire ne se répète pas car la dernière fois, la Grande-Bretagne était parmi les prédateurs, alors qu’aujourd’hui, elle et ses joyeux pétroliers sont au menu des nouveaux convives, parmi lesquels la Chine. Cette dernière risque de refuser l’invitation car elle est elle-même au menu du second service. Le repas risque d’être agité. Les menus pourraient se rebeller.

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| Mots Clefs | Pays : Grande-Bretagne |
| Mots Clefs | Enjeux : Sanctions Ciblées en cours d’application |

| Mots Clefs | Enjeux : Alliances Régionales d’ordre stratégique <font
| Mots Clefs | Zone géopolitique / Sphère d’influence : Chine |

| Mots Clefs | Décideurs : OBAMA |
| Mots Clefs | Enjeux : Apaisement |