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Iran : Pourquoi le régime vient-il d’accepter le dialogue sur le nucléaire ?
01.11.2010

Il y a deux semaines, les Six proposaient le dialogue à Téhéran, mais ce dernier l’avait refusé. Puis, il y a 9 jours, le 24 octobre, il avait évoqué ses propres efforts pour parvenir à un dialogue alors que personne ne lui avait rien demandé. Mais le 26 octobre, il avait tout remis en cause. Puis le 29, il a adopté une autre position : il a accepté de dialoguer après le 10 novembre (après les élections à mi-terme aux Etats-Unis) en précisant qu’il s’agissait d’un dialogue, mais à ses propres conditions qui incluent entre autres un désarmement nucléaire mondial ! Washington l’avait alors rappelé à l’ordre en exigeant un dialogue constructif, Téhéran avait rejeté tout dialogue sur le nucléaire, puis après quelques heures, il s’est dit disposé à la reprise des négociations sur son programme nucléaire même avant la date proposée, c’est-à-dire avant l’élection américaine. | Décodages |



Les journalistes occidentaux ne comprennent souvent rien aux décisions des mollahs et les prennent pour des esprits fantasques, mais il n’y a rien de capricieux dans les revirements des mollahs, ces derniers agissent uniquement en fonction des attitudes adoptées par leur adversaire : les Etats-Unis.

Les attitudes de l’Etat américain sont au centre des préoccupations des mollahs car ce dernier les sanctionne depuis des années tout en leur proposant d’y mettre fin s’ils acceptent de faire la paix avec lui. En fait, il cherche à normaliser ses relations afin de pouvoir revenir en Iran pour y tisser les réseaux nécessaires à ses pions islamistes pour prendre le pouvoir au sein de ce régime afin de lui offrir la direction de l’Etat qui inspire l’ensemble des mouvements islamistes de la planète. Les mollahs perdraient alors le pouvoir, leurs privilèges, les fortunes détournées et ils se trouveraient en situation de rendre des comptes pour 30 ans d’activités terroristes. De fait, ils changent sans cesse de positions pour rendre impossible le dialogue demandé par Washington. Pour y parvenir, par le passé, le régime multipliait les provocations pour provoquer une escalade guerrière afin que par peur d’un conflit susceptible de nuire au transit des pétroliers, les Américains reculent et qu’il se débarrasse ainsi de leurs sanctions. Mais les Américains esquivaient les provocations et continuaient leurs sanctions, épuisant le régime. Pour neutraliser cette esquive, les mollahs ont accepté de les rencontrer (à certaines conditions) afin de pouvoir provoquer un clash et obtenir ainsi l’escalade esquivée par Washington.

Washington a été cette fois contraint d’esquiver ces demandes de dialogue de Téhéran. Il a alors augmenté discrètement le dosage de ses sanctions notamment en réduisant les livraisons de carburants à l’Iran, afin que le spectre d’une pénurie débouchant sur un soulèvement sanglant incite les mollahs à coopérer (perdre le pouvoir et la bourse, mais pas nécessairement la tête).

Cette augmentation des pressions a mis les mollahs en demeure de provoquer un clash. Ils ont tout essayé avant de revenir de proposer une rencontre. En réponse à cette offensive, Washington s’est discrètement opposé au ravitaillement en Europe des avions de lignes iraniens. Téhéran n’a pas reculé. Les Américains qui possèdent 30% du groupe pétrolier Total ont tout aussi discrètement demandé à cette compagnie de suspendre ses relations avec les mollahs. Etant donné que Total exploite des gisements iraniens et rémunère les mollahs avec 1/3 de sa production, la mesure consistait à priver l’Iran de barils dont il a besoin pour produire un minimum de carburants pour les besoins de ses diverses milices. Ainsi Washington mettait très discrètement les mollahs face à la pénurie qui pourrait provoquer leur perte pour les inciter à accepter son offre. Mais Téhéran n’a pas accepté (il n’y a pas eu de proposition après l’annonce de Total).

Une semaine jour pour jour après l’annonce de Total, le vendredi 22 et le samedi 23 octobre, les médias américains ont publié des documents compromettants à propos de l’ingérence des mollahs en Irak et en Afghanistan. Cela donnait l’illusion que Washington avait changé sa politique globale vis-à-vis des mollahs. Ces derniers ont paniqué : le 24 octobre, ils ont évoqué leurs efforts pour parvenir à un dialogue alors que pour mener à bien son bluff, Washington était resté silencieux.

Mais par la suite, Washington n’est pas allé plus loin dans les révélations et surtout il n’a pris aucune position officielle sur les révélations d’ingérence. Téhéran a alors compris qu’il s’agissait d’un bluff et le 26 octobre, il a remis en cause sa disposition au dialogue.

Deux jours plus tard, Téhéran est allé plus loin dans le refus d’apaisement en évoquant son projet de dialogue à des conditions impossibles. Cette prise de position a été motivée par trois décisions hasardeuses prises par Washington.

1 | La première de ces décisions était l’annonce que le Département du Trésor américain avait mis sur sa liste noire 37 sociétés de fret maritime basées en Allemagne, à Malte ou à Chypre pour avoir collaboré avec les mollahs pour le transit de matériels dangereux. L’annonce est une pure hérésie car les compagnies de fret maritime ont des bureaux ou des sociétés écran un peu partout à travers le monde (dans tous les grands ports). La fermeture d’un bureau ne change rien à la donne.

Les mollahs étaient face à une annonce ultra médiatisée pour une sanction bidon alors que depuis plusieurs mois, ils sont frappés par des sanctions énergétiques fortes appliquées en toute discrétion. Il a vu là une annonce destinée à l’opinion américaine. Le régime a lié cela aux élections américaines à venir : il a compris qu’Obama tentait de convaincre les électeurs qu’il était très actif vis-à-vis de l’Iran. Le régime y a vu un point faible de l’administration Obama. Il a compris qu’il avait un coup à jouer.

2 | Le lendemain de l’annonce de 37 sociétés blacklistées, Washington a critiqué officiellement via Susan Rice son ambassadrice à l’ONU, l’ingérence des mollahs au Liban. Mais Madame Rice s’est gardée de faire des révélations compromettantes. Washington était sur une vague de prise de position médiatique. Téhéran a eu l’impression qu’Obama cherchait à améliorer son image médiatique. Cela a confirmé sa vulnérabilité pendant l’élection, il a été convaincu que le moment était opportun pour agir.

3 | Le même jour, Hillary Clinton a souhaité un bon anniversaire à Ahmadinejad. Téhéran a été convaincu que l’Administration Obama était à la recherche d’une victoire diplomatique immédiate. En voyant cette faille, le régime a foncé en proposant son dialogue à ses propres conditions. Washington n’a pas relevé car il ne doit pas critiquer Téhéran, cela pourrait remettre en cause l’opportunité de tout dialogue. Téhéran s’est alors vu en position d’aller à un rendez-vous où il pourrait faire un scandale.

Dans notre analyse parue le 27 octobre, nous avions affirmé que Washington allait se sentir piégé et devait en conséquence trouver un moyen pour intimider les mollahs ou alors pour saboter cette rencontre pour ne pas s’engager sur un terrain glissant. Son premier geste a été d’inviter Téhéran à accepter un dialogue constructif.

En réponse, le régime a réaffirmé ses conditions par l’intermédiaire d’un conseiller d’Ahmadinejad pour obtenir une réponse à ce sujet : de préférence une réponse négative pour aller vers un clash.

Washington a évoqué un cas de violation des droits de l’homme (pour saboter l’apaisement), mais il n’a rien répondu sur les conditions posées par les mollahs. Ces derniers y ont vu le signe d’un malaise (électoral). Ils se sont dépêchés d’accepter une reprise des négociations avant la date qu’ils avaient proposée, c’est-à-dire avant l’élection à venir, pour exploiter ce malaise idéal pour provoquer la grande crise dont ils ont besoin pour faire reculer Washington.


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Un autre exemple des choix diplomatiques du régime :
- IRAN : LA LIBÉRATION DE SARAH SHOURD
- (14 SEPTEMBRE 2010)

| Mots Clefs | Institutions : Diplomatie (selon les mollahs) |
| Mots Clefs | Institutions : Provocations |

| Mots Clefs | Décideurs : OBAMA |
| Mots Clefs | Enjeux : Sanctions Ciblées en cours d’application |