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Iran : Sarkozy a joué du tam-tam
28.08.2009

Selon la presse française, dans son discours d’ouverture de la Conférence des ambassadeurs français à l’Elysée, le président Sarkozy aurait haussé le ton face à l’Iran. Nous avons entendu un autre ton, ni plus, ni plus bas, mais un joli son de bois.



Les relations internationales avec l’Iran prennent parfois des allures bizarres car le régime en place a recours à des actes diplomatiques non conventionnels comme la prise d’otage. Le discours annuel du président français a été marqué par cette intrusion de chantage du régime des mollahs.

Le fond du problème est que ce régime ne veut pas reprendre ses négociations avec les Occidentaux car au bout de compte, il devrait accepter des compromis contraires à ses intérêts.

Ces intérêts résident dans le fait d’être l’adversaire idéologique de l’Occident pour demeurer dans le rôle intéressant d’agitateur régional arbitre du conflit israélo-arabe. Pour cela, il doit séduire la rue arabe avec des slogans anxiogènes et disposer de milices armées. S’il faisait le moindre geste d’apaisement, il perdrait l’appui de la rue arabe et de ces milices qui peuvent aller proposer leurs services à d’autres protecteurs qui souhaitent contrôler cette force de nuisance (Syrie, Russie ou Chine).

Pour ne faire aucun compromis, Téhéran a décidé de bloquer les négociations avec une crise interne de la légitimité du président élu. Il a déguisé cette contestation des résultats des élections en révolution démocratique de couleur (verte). Il espérait obtenir l’adhésion des Occidentaux ce qui aurait privé Ahmadinejad de toute légitimité ainsi qu’un éventuel accord cédé sous la pression des sanctions présentes et futures. Les Occidentaux n’ont pas été dupes, Téhéran est passé à l’offensive pour obtenir cette caution indispensable et l’une de ces opérations d’intimidation a été l’arrestation de ressortissants étrangers qu’il a accusés de délits passibles de longues années de prison. Avec l’arrestation de Clotilde Reiss, Téhéran a voulu forcer Paris à modifier son vocabulaire sur la contestation de la légitimité d’Ahmadinejad.

Hier, lors de son discours aux ambassadeurs français à l’Elysée, le président Sarkozy a cédé sur ce terrain en parlant d’un manque d’honnêteté dans les élections en Iran, une petite reconnaissance de la contestation. Il aurait pu éviter cette petite incantation pour Clotilde car le Guide a annoncé qu’il ne croyait pas à un rôle des étrangers, on peut donc supposer que…

Ce ne fut pas le seul geste d’apaisement de Sarkozy car au lieu de dégainer encore son slogan « la bombe iranienne ou le bombardement de l’Iran » comme en 2007 et 2008, il a promis des « sanctions économiques sévères, à la hauteur de l’enjeu, au Conseil de sécurité et au Conseil européen » si Téhéran refusait de répondre à l’offre internationale de reprise des négociations.

La presse française consciente du changement de ton a qualifié la déclaration de « vigoureuse » en ajoutant que le président avait « haussé le ton ». En fait, il n’y avait pas lieu de faire preuve de flagornerie car pour être honnête, hormis sa petite allusion au manque d’honnêteté de l’élection d’Ahmadinejad, le président Sarkozy n’a pas reculé par rapport à sa position de l’année dernière car la menace des sanctions européennes est aussi irréaliste que la menace d’un bombardement de l’Iran.

Tout d’abord le bombardement. On ne peut imaginer une version autorisée par le Conseil de Sécurité, elle serait impossible à cause du refus des Russes et des Chinois. On ne peut également imaginer une intervention unilatérale, elle ferait glisser l’Iran vers le camp sino-russe, ce que ne souhaitent ni les Etats-Unis ni l’Europe qui a d’importants intérêts en Iran. Il en va de même pour les sanctions européennes demandées sans succès par les Américains depuis le début de la crise. Ce que les 26 ont toujours refusé est aujourd’hui encore plus improbable car depuis le début de l’été, les investisseurs chinois se montrent très offensifs dans le domaine pétrolier. L’Europe risque gros si elle se retire du marché iranien. Sarkozy a en fait échangé une menace bidon pour une autre.

La seule sanction qui fait peur aux mollahs, car elle ne peut pas être compensée par une intervention russe ou chinoise, est un embargo sur les carburants… Mais le président Sarkozy n’a pas abordé le sujet car la France fait partie des pays fournisseurs.

Hier, Sarkozy a poussé loin l’art de la langue de bois. Il n’a ni haussé, ni baissé le ton face aux mollahs. Il a même à peine cédé à propos de son adhésion à la contestation d’Ahmadinejad, puisqu’il l’avait officiellement reconnu comme le principal interlocuteur des Six.

C’était un brillant exercice d’équilibriste : apparemment ferme envers Téhéran, apparemment pro-américain, bon pour Clotilde, sans rien apporter de neuf pour cette crise qui ne peut plus évoluer en raison des fortes contradictions entre les intérêts en jeu.

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| Mots Clefs | Décideurs : Sarkozy |
| Mots Clefs | Zone géopolitique / Sphère d’influence : France |

| Mots Clefs | Enjeux : Intérêts Européens en Iran |

| Mots Clefs | Pays : Europe (UE, UE3, union européenne) |

| Mots Clefs | Enjeux : Sanctions Ciblées en cours d’application |