Chaque fois que le régime des mollahs est en difficulté, il laisse entendre qu’une amélioration sera possible en évoquant le retour prochain des modérés et de leur chef Khatami. Comme nous l’avons évoqué dans nos précédentes analyses, il ne faut pas confondre la stratégie et l’enjeu.

L’enjeu pour les mollahs est d’obtenir une entente irano-américaine conforme à leurs intérêts régionaux. Dans cette perspective, ils doivent résister aux sanctions américaines et faire durer la crise pour user les Etats-Unis (et les faire céder). Téhéran a conçu sa stratégie sous Bush qui était fermé au marchandage. Il a mis face à Bush Ahmadinejad qui exigeait un dialogue sans conditions préalables, offre iranienne régulièrement rejetée par Washington. L’arrivée d’Obama a changé la donne : il acceptait le dialogue sans conditions préalables, privant Téhéran de son atout majeur pour faire durer la crise. C’est alors que Téhéran a envisagé un retour du Joker Khatami pour reprendre le dialogue avec les Six, ce qui est une autre manière de ne pas dialoguer directement avec les Américains, pour faire durer la crise. De plus, l’élection d’un « candidat modéré » supposé populaire renouvellerait la légitimité de la politique nucléaire du régime, et donnerait encore plus de poids à un dialogue qui sera un nouveau round pour d’autres négociations sans fin. Cette stratégie alternative de Téhéran a immédiatement déplu aux Américains, mais aussi aux Britanniques, qui craignent un succès de cette stratégie et l’entente qui en résultera. Cette entente renforcerait la mainmise américaine sur le pétrole au détriment des compagnies britanniques leaders du marché depuis un siècle.

Les premiers à dégainer ont été les Britanniques. Dans le documentaire conçu par la BBC et diffusé par France 3, ils ont qualifié Khatami de tricheur. Mais ce documentaire insistait également sur la nécessité d’un statut quo avec Téhéran et évoquait une proposition de compromis faite par le régime à Bush pendant la présidence de Khatami. Il y a une confusion dans le message. Une semaine après la diffusion simultanée du document en France et en Grande-Bretagne, Londres a incité un média ami à diffuser un article évoquant l’impuissance des modérés et la nécessité pour les Six de soutenir une présidence non modérée, mais efficace en Iran.

Face à ces coups bas, le régime a mis en scène plusieurs scénarii pour insinuer que Khatami était une victime du système, un dissident censuré mais très populaire.

Les Américains ont décidé d’attaquer Khatami sur ce terrain par un sondage réalisé sur la chaîne Voice of América, chaîne non censurée en Iran et très regardée par les Iraniens. Selon ce sondage effectué sur un échantillon de 39.678 Iraniens, 89 % ne veulent pas d’un troisième mandat de Mohammad Khatami.

Il est vrai que les Iraniens ne souhaitent pas ce retour, mais d’une manière générale, ces mêmes 89% boycottent toutes les élections du régime ! Cependant, cette chaîne financée par le Département d’Etat a évité de sonder les Iraniens sur ce sujet ! Ceci s’explique : son objectif était de blackbouler Khatami, le joker du régime, et non de remettre en cause la légitimité des élections dans ce même régime, un processus soi-disant démocratique qui est un prétexte plausible pour Washington de justifier une entente avec les mollahs.

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La version Britannique du Boycott de Khatami :
 Iran : Khatami ne plait pas à tout le monde
 (17 FÉVRIER 2009)