Iran : Les dessous de la médiation ratée de la Turquie 18.11.2008 Il y a trois jours, lors d’une visite à Washington pour le sommet de G20, Erdogan le Premier ministre turc dont le pays est l’un des alliés stratégiques des Etats-Unis avait proposé lors d’une conférence de presse, une médiation turque dans la crise nucléaire iranienne. Par le passé, l’Italie avait proposé sa médiation, mais Washington n’avait pas retenu sa candidature. Cette fois Washington n’a rien dit et au vu des dernières évolutions de cette affaire, on peut affirmer qu’Erdogan aurait agi en émissaire de Washington. L’indice de base est l’annonce faite par la Turquie de reprendre les négociations avec l’Iran sur un contrat pour l’exploitation du champ gazier South Pars (Pars sud), un projet très prometteur pour l’Europe et la Turquie qui avait capoté suite au refus de Washington qui avait interdit aux banques de le financer. La reprise des négociations sur ce contrat serait une pure perte de temps sans un accord préalable de Washington d’autoriser le financement du projet. La médiation turque supposait donc un volet économique : apaisement contre dollars. Les Américains ont pris les mollahs à la gorge et proposent un deal contre la fin des sanctions doublée d’une avalanche de dollars. Mais pour Téhéran, le deal que propose Washington est le début de la fin, puisqu’il suppose une normalisation des relations diplomatiques et une démocratisation des institutions qui elle-même permettra à des « Chalabis » iraniens de participer à des élections, d’infiltrer ainsi le régime afin d’en altérer les choix (par exemple l’éloigner du Hezbollah). Téhéran ne veut pas de ce deal (« carotte empoisonnée ») et manoeuvre pour un deal différent dans lequel il gardera le contrôle du Hezbollah et donc son autonomie. Pour Téhéran, le deal est donc avant tout géostratégique, et en aucun cas uniquement économique et possible via un échange de type apaisement contre dollars. Washington qui ne peut pas non plus accepter un deal selon les normes de Téhéran, amplifie chaque jour la pression économique, tout en ne proposant qu’une levée des sanctions suivie d’une reprise des investissements de ses propres institutions financières partenaires de la Turquie ou de l’Inde. L’opération de la médiation turque ressemble beaucoup à la double tentative de médiations arabe et indienne qui a eu lieu dans la semaine précédant l’élection présidentielle américaine. Une délégation arabe a offert un simili rôle régional dans le Golfe Persique, mais aussi la promesse d’une relance des investissements par les Emirats, le premier partenaire commercial des mollahs. Parallèlement, le ministre des affaires étrangères de l’Inde s’est rendu à Téhéran pour reparler d’une relance des négociations de finalisation du projet de pipeline Iran-Pakistan-Inde, contrat également en stand bye sous la pression américaine. Le régime pour qui la relance des contrats est synonyme de fortes rentrées de devises (pour résister aux pressions américaines) avait accepté les deux délégations, mais refusé la médiation. Ceci a entre autres débouché sur une non reprise des négociations de finalisation sur le contrat du pipeline Iran-Pakistan-Inde. Cette fois aussi, le régime des mollahs a agi exactement de la même manière : oui aux contrats, mais non aux conditions ! Dès le lendemain de la proposition d’Erdogan, le ministre iranien du Pétrole Nozari a reçu Hilmi Guler le ministre turc de l’Energie et des Ressources naturelles pour discuter des deux projets sanctionnés par les Américains : un gazoduc de 1.800 Km reliant le Golfe Persique à la Turquie et la finalisation du contrat des phases 20 et 22 de Pars Sud qui doivent alimenter ce gazoduc destiné à être relié à l’Europe. Erdogan a alors réitéré son offre dans une interview accordée au New York Times. Peine perdue, puisque Téhéran a seulement évoqué les deux projets avec le ministre turc pour rappeler l’importance de ce projet pour l’adhésion de la Turquie à l’Europe, avant de refermer la porte en remerciant poliment Erdogan pour son offre de médiation qui ne pourrait pas réussir en raison de la « réalité inhabituelle les problèmes entre l’Iran et les Etats-Unis ». Selon le porte-parole du ministère des affaires étrangères, Téhéran attendra l’investiture d’Obama « pour juger du sérieux de son offre de dialogue ». © WWW.IRAN-RESIST.ORG Pour en savoir + :
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