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Que risque l’Iran après l’appel de Chirac ?
27.10.2006

Dans le cadre d’une rencontre avec son homologue chinois, le Président Chirac a insisté sur la nécessité d’une action unanime au sein du Conseil de Sécurité. Comme le texte de la résolution européenne sur l’Iran, ces propos peuvent être mal interprétés. | Décodages.



L’insistance sur l’unanimité [1] au sein du Conseil de Sécurité est l’une des constantes des équations de la diplomatie onusienne française à propos de l’Iran. Bien qu’il s’agisse, d’un point de vue sémantique, d’un extraordinaire appel à la sagesse, sur le plan technique, l’unanimité réduit le Conseil à l’inaction. Pire elle exige un dénominateur commun qui neutralisera définitivement le recours à des sanctions d’un minimum d’efficacité.

Explications | Les 5 membres permanents du Conseil ont un droit de veto qui leur permet de bloquer unilatéralement toute résolution contraire à leurs intérêts. Par ailleurs, ils ont tous des intérêts divergents et comme nous le pensons, la Russie est même partie prenante dans la crise nucléaire iranienne car selon notre analyse géopolitique, cette nucléarisation peut satisfaire les objectifs stratégiques de ce pays.

La nucléarisation de l’Iran décuplera la puissance du Hezbollah dans région et ce qui peut affaiblir les Américains dans la région est de nature à convenir aux Russes, mais plus que cet aspect controversé et géopolitique de l’affaire, la nucléarisation militaire de l’Iran enterrera le TNP. La fin du TNP sera une période faste pour l’industrie nucléaire Russe mais aussi pour son industrie militaire qui actuellement est le leader du marché mondial.

Par ailleurs, la nucléarisation militaire de l’Iran et surtout l’effondrement du TNP conduiront à une nucléarisation tout azimut. Ce « Tous Nucléaires » modifiera la détente et relancera paradoxalement la course aux armements conventionnels : une aubaine pour la Russie qui produit des armes sur mesures pour contrer des modèles précis de l’armée américaine. Dans ces conditions, il est évident que le Conseil de Sécurité ne parviendra jamais à une unanimité sur la crise iranienne qui est une menace pour certains pays et une aubaine pour la Russie.

Cette situation de l’impossibilité d’une unanimité n’est pas nouvelle et les règlements de l’ONU prévoient une clause pour débloquer des situations similaires. Il s’agit du Chapitre 7.

Le chapitre 7 de la Charte des Nations unies traite des menaces contre la paix et des actes d’agressions et autorise, en dernier ressort, l’emploi de mesures coercitives. Une telle résolution passerait, si Moscou et Pékin n’exerçaient pas leur droit de veto, mais s’abstenaient tout simplement. Et quand un membre permanent s’abstient, cela revient à accepter que le Conseil de Sécurité agisse, pour autant qu’il y ait par ailleurs une majorité de neuf voix.

Cette unanimité ou consensus perpétuellement exigés par la France au nom du multilatéralisme, de la crédibilité et de la légitimité, sont surtout synonymes d’un refus non assumé de la procédure du recours au chapitre 7. Hier le Président faisait un cadeau aux Russes, aujourd’hui, il gratifie les Chinois.

Le Chapitre 7 qui remet en cause le droit (discriminatoire) de veto et qui est synonyme d’une action rapide et efficace est écarté par le président français au nom de la légitimité des sanctions décidées. C’est-à-dire que le président a délibérément choisi de fonder la légitimité et la crédibilité des futures actions entreprises à l’ONU sur la reconnaissance du droit de veto, symbole même d’unilatéralisme.

Qu’y-a-t-il dans ce chapitre 7 qui effraie tant la France ? Certes, l’article 42 évoque le recours aux armes, mais avant lui, il y a l’article 41 qui offre d’inépuisables moyens pour contraindre le régime des mollahs à respecter ses engagements internationaux : des mesures susceptibles de nuire aux intérêts commerciaux de la France en Iran. Le chapitre 7, intitulé « Action en cas de menace contre la paix, de rupture de la paix et d’acte d’agression », prévoit l’imposition de sanctions telles que « l’interruption complète ou partielle des relations économiques et des communications ferroviaires, maritimes, aériennes, postales, télégraphiques, radioélectriques et des autres moyens de communication, ainsi que la rupture des relations diplomatiques ». Paris ne veut pas en arriver là et nous revivons inlassablement les mêmes épisodes de ce feuilleton où les mots sont au service des intérêts de quelques états et non de l’ensemble des nations unies.

De fait, en lisant les propos du président, nous pleurons nos compatriotes qui mourront en Iran sous la répression des mollahs à cause de cette politique qui donne à ces derniers les délais supplémentaires nécessaires pour améliorer leur rendement nucléaire. Croyez-nous, l’image de la France en Iran est exécrable et à qui la faute ? Amères compensations : la bombe des mollahs fera voler en éclats le TNP, la dissuasion française et le droit de veto français. A ce moment la France aura besoin d’un autre allié que la Russie.

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[1L’insistance sur l’unanimité.| Iran - France : des manoeuvres pour gagner du temps ! | 10.09.2006