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Iran : Mortazavi, le coupable consentant !
11.01.2010

Selon l’AFP, « une commission parlementaire iranienne a mis en cause dimanche l’ancien procureur de Téhéran Saïd Mortazavi pour avoir envoyé des manifestants de l’opposition au centre de détention de Kahrizak où trois d’entre eux ont trouvé la mort, victimes de sévices ». A la lecture de ces lignes, on se dirait formidable, quelle démocratie parlementaire ! Or, d’une part, la commission ne parle pas de mort par sévices, mais de mort par négligence et d’autre part, le Parlement n’a aucun pouvoir au sein du régime des mollahs. Nous n’avons pas là l’exemple d’une démocratie, mais le modèle réglementaire pour classer une affaire qui pue.



On peut à tous les égards parler du centre de détention de Kahrizak comme d’une affaire gênante. L’existence du centre de détention de Kahrizak a été révélée en juillet dernier par les partisans du Mouvement Vert qui contestaient la légitimité d’Ahmadinejad. Puis, ce centre qui était présenté comme un lieu de torture a pris un caractère plus tragique quand Karroubi, l’un des 2 chefs du Mouvement Vert, a évoqué des viols sur les prisonniers surtout les garçons en exhibant des liasses de preuves avec des dépositions des victimes. Tout le monde s’est alors intéressé à l’affaire, mais quand les familles des gens arrêtés cet été ont demandé des noms de coupables en exigeant à leur encontre la peine maximale selon les lois du pays (la mort selon la charia), les récits de viols publiés sur les sites Verts ont changé. On est passé de viols avec pénétration sexuelle à des viols sans pénétration sexuelle : avec des matraques, des bouteilles… C’est-à-dire que l’on est passé de crimes avec des coupables issus du régime à des crimes sans coupables issus du régime ! Dans le même temps, Karroubi a refusé de publier le contenu des dépositions des violés qui devaient contenir les noms des coupables. Et enfin, ces violés qui avaient donné des interviews à des chaînes étrangères n’ont pas pris contact avec ces chaînes pour révéler l’identité des coupables, ils ont disparu dans la nature ! Les Verts eux-mêmes ont été frappés d’amnésie pour une affaire aussi grave.

En fait, l’affaire des viols semble avoir été une invention médiatique pour choquer les Occidentaux et les forcer à prendre officiellement parti pour le Mouvement Vert, ce qui aurait privé Ahmadinejad de toute légitimité et aurait rendu tout dialogue avec lui sans valeur. En fait, avant que l’on arrive au changement de version sur le déroulement des présumés viols, les chefs d’Etats occidentaux ont compris la ruse et ont tous reconnu officiellement Ahmadinejad comme leur interlocuteur légal. Au final, Téhéran s’est retrouvé avec une affaire de viols très gênante et aucune envie de sacrifier un agent dans l’opération car évidemment dans le cas contraire, les autres barbouzes aurait envie de déserter le navire.

On a alors assisté à un enterrement par étape. Dans un premier temps, le régime a reconnu l’existence de ce centre de détention que personne n’avait jamais vu et ni filmé. Il a annoncé l’arrestation de quelques coupables (anonymes, cela va de soi) qui attendent leurs jugements. Il ne lui restait qu’à trouver une porte de sortie pour le sinistre procureur de Téhéran, lui-même accrédité d’une solide réputation de tortionnaire et de violeur, dont le nom avait été cité à plusieurs reprises pour donner un fond de crédibilité à l’affaire. Cette porte a été sa destitution de son poste. Mais elle a été immédiatement suivie d’une promotion (pour ne pas refroidir les autres bons serviteurs du régime).

Cependant, Kahrizak reste dans les mémoires populaires : il est devenu le symbole de la cruauté avouée par le régime. Dernièrement, toujours pour obtenir le soutien officiel des Occidentaux, en particulier Obama, le Mouvement Vert (alter ego du régime) a reparlé de Kahrizak pour mobiliser les Iraniens dans les rues. Mais les Iraniens qui connaissent la signification des slogans du Mouvement et les passés noirs de Moussavi et Karroubi ont encore une fois boycotté l’appel.

Téhéran a raté son coup, mais s’est retrouvé avec une plaie rouverte nommé Kahrizak. Pour la fermer rapidement et définitivement, le régime a opté pour une commission parlementaire d’enquête sur les circonstances des morts survenues à Kahrizak, commission qui a mis en avant l’audition du personnage le plus haï de l’affaire, Saïd Mortazavi !

C’est un choix intéressant de 2 points de vue. Tout d’abord, une commission parlementaire n’a aucun pouvoir et ce parce que le Parlement lui-même n’a aucun pouvoir même législatif. Il ne fait, en définitive, qu’entériner les choix faits au sein du Conseil de Discernement, seul organe habilité par la constitution de choisir les orientations politiques du régime. De fait, sa condamnation de Mortazavi ne peut être que symbolique. Le régime a juste sermonné Mortazavi.

Mais, le second point important, en fait, cette condamnation a juste été une diversion pour cacher la vraie mission de la commission : déclarer que les morts n’étaient pas dus à la torture comme on l’avait prétendu initialement mais, à « diverses causes comme un espace limité, de mauvaises conditions sanitaires, une alimentation inadaptée, la chaleur ou le manque ventilation ! » ! Les « agressions de geôliers » reconnues par le régime viennent en queue de l’énumération à côté de la possibilité de sévices affligés par « 30 criminels endurcis » enfermés avec ces jeunes ! Par ailleurs, les dites « agressions des geôliers » ont été transformées en « gifles ou comportement humiliants ! » Et enfin, cette commission mixte a « rejeté l’existence des viols ! » C’est un enterrement de première classe, une conclusion qui risque de bénéficier aux geôliers anonymes mis en examen en août dernier.

Le régime des mollahs s’est bien fichu de tout le monde et pour couronner tout, il n’a pas manqué d’accorder une belle promotion à Mortazavi pour avoir joué encore une fois le coupable consentant. Cette fois, le ricanant Mortazavi a hérité en grande pompe et devant tous les médias du très lucratif poste de « responsable des services chargés de la lutte contre la contrebande ». La cérémonie (ci-dessous) a eu lieu le jour même où en se basant sur d’autres dépêches iraniennes, la presse occidentale affirmait qu’il était « entendu et malmené par la commission ». Il n’y a évidemment pas eu la moindre protestation contre cette promotion de la part des Verts épris de justice.
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Les médias occidentaux diffusent toutes les nouvelles qui arrivent d’Iran sans aucun recoupement, commentaire, explication des institutions. Alors que sans aller aussi loin, le moindre recoupement avec des informations diffusées par le passé révèlerait de graves distorsions. On dirait qu’ils n’ont tout simplement pas envie de comprendre ou d’informer. Nous pensons que cette « autocensure » est liée à la politique étrangère française qui ne veut pas remettre en cause les nouvelles diffusées par le régime, nouvelles qui donnent l’impression d’un Etat avec des instances démocratiques. Pétrole quand tu nous tiens.

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| Mots Clefs | Institutions : Démocratie (médiatico)-Islamique |

| Mots Clefs | Réformateurs & faux dissidents : Le Mouvement Vert |

| Mots Clefs | Institutions : Désinformation et fausses rumeurs |

| Mots Clefs | Auteurs & Textes : Selon l’AFP |

| Mots Clefs | Enjeux : Intérêts Européens en Iran |