Iran : La semaine en images n°171 29.05.2011 Cette semaine, le mardi 25 mai, le régime devait commémorer la libération de la ville de Khorramchahr, le plus grand port du pays avant la révolution. C’est un anniversaire difficile car la région pétrolière de Khouzestan où se trouve cette ville a été oubliée par le régime bien qu’elle soit à l’origine du principal revenu en devise du régime. Dans le même temps, cette semaine, Washington devait annoncer de nouvelles sanctions énergétiques contre les mollahs. Les mollahs ont annoncé l’inauguration d’une nouvelle raffinerie dans la région de Khouzestan le lundi 24 mai pour calmer les habitants de cette région tout en neutralisant les effets démoralisants des sanctions prévues. Le projet (qui selon nous a été inventé à la hâte) a explosé pendant l’inauguration. On a cru à un attentat avant de s’apercevoir tardivement qu’il s’agissait d’un accident dû à la grève des ingénieurs, ce que l’opposition attend depuis toujours. Mais personne n’a pu s’étendre sur le sujet car 2h après l’explosion, le lundi à 10h55, les médias du régime ont basculé sur la mort du célébrissime footballeur en retraite Nasser Hejazi à la suite d’un cancer des poumons alors que cet homme avait annoncé sa guérison complète quelques mois plus tôt. Vu que personne n’a signalé ce détail dans les médias remarquablement dociles du régime, on peut supposer une manipulation. En fait, pour échapper à deux grands problèmes, le régime avait pensé à une inauguration miracle. Son projet a explosé, on a vu qu’il avait de graves problèmes dans le secteur pétrolier, il a tenté de détourner les attentions avec la mort d’une idole. La semaine a tourné autour de cette mort. Mais le régime a poussé le vice jusqu’à annoncer l’appartenance du défunt à sa fausse opposition islamiste, le Mouvement Vert, pour régénérer au passage cette entité agonisante. Comme nous le verrons sur les images, dans la confusion, il a commis des erreurs. Nous avons connu une semaine bien houleuse, pleine de surprises et manipulations. Le contexte de la semaine dernière | Il y a plusieurs semaines, nous avons signalé le boycott de l’anniversaire de la révolution islamique par les Pasdaran, puis leur passivité quand le peuple a défié le régime en manifestant massivement dans tout le pays pendant la fête du feu en dansant et chantant dans des réunions mixtes formellement interdites par le clergé. Cette rupture des pasdaran avec le régime avait paniqué les derniers partisans du régime notamment les hommes d’affaires. On a assisté à une ruée vers l’or de ces gens pour pouvoir fuir le pays en cas de révolution. Le régime avait d’abord menacé les acheteurs d’or avant de s’en prendre aux Pasdaran. Mais il n’est pas parvenu à les récupérer. In fine, pour casser la confiance naissante chez les Iraniens, il a prétendu que les Pasdaran cherchaient à promouvoir l’agitation sociale pour prendre le pouvoir pour établir une république islamiste encore plus dure. Cette rumeur a été abandonnée car le régime ne pouvait pas mettre en scène des actions qui confirmeraient sa théorie. L’instabilité évidente du régime a inspiré les Etats-Unis qui le sanctionnent pour le forcer à céder le pouvoir à leurs pions afin d’avoir un allié islamiste, indispensable pour agiter l’Asie Centrale. Ils ont annoncé la possibilité de nouvelles sanctions énergétiques pour créer de nouvelles tensions internes, inciter d’autres partisans du régime à plier bagages, afin de mettre le régime dans une situation de faiblesse accrue pour qu’il accepte de coopérer avant que cette nouvelle dissidence ne dégénère en une sanglante révolution. Dimanche dernier, la dernière information que nous révélions dans la « Semaine en images n°170 » était la présence en Iran de mercenaires étrangers portant l’uniforme des Pasdaran pour simuler la fin de la dissidence afin d’éviter de nouvelles dissidences qui lui seraient fatales. Ce même dimanche dans la soirée, nous avons diffusé cette information dans notre émission vers l’Iran. Dans cette émission, nous avons également expliqué que les Iraniens ne pourraient vraisemblablement avoir droit à plus de coopération de la part des Pasdaran comme un coup contre le régime car à l’origine cette milice n’avait pas été conçue comme une armée, mais comme une organisation de renseignements par conséquent ses membres sont confinés dans des cellules indépendantes et ne se connaissent pas : ils ne peuvent pas s’organiser pour renverser le régime. C’est pourquoi les Iraniens ne devraient pas critiquer le manque d’initiative des Pasdaran, mais plutôt apprécier et utiliser cette passivité pour manifester afin de submerger le petit groupe de mercenaires en Iran et ainsi révéler l’extrême faiblesse du régime en provoquant des dissidences à la chaîne qui déboucheraient sur la révolution que l’on attend. Cette révélation est tombée par hasard à deux jours de la commémoration de la libération de Khorramchahr, un événement qui doit être organisé par les Pasdaran. On pouvait vérifier nos dires. Lundi matin, surprise ! Le commandant Naghdi, un des chefs des Pasdaran lâchés par ses subordonnés, est intervenu dans les médias du régime pour démentir les « médias étrangers qui parlent de la rupture des Pasdaran ». Puisque que nous sommes l’unique média qui parle de cette rupture, nous avons eu la preuve que l’on nous écoute en Iran y compris à un haut niveau. Nous avons certes été flattés, mais au-delà de ce plaisir, on a compris que l’on avait tapé dans le mille : le régime était très mal à l’aise à l’idée que l’on admette la rupture des Pasdaran et ce que cela sous entend ! Dans le contexte de la semaine, le régime devait trouver un moyen pour cacher l’absence de manifestation des pasdaran pendant ce jour. Il a alors eu l’idée géniale de faire diversion en clamant avant l’annonce de nouvelles sanctions, le lancement d’une gigantesque unité de production de carburant. Le projet était situé dans la région sinistrée de Khouzestan et était présenté comme une nouvelle manière de célébrer la libération de la ville. Personne n’a alors signalé qu’on n’avait jamais entendu parler de ce projet de raffinerie, mais qu’en revanche, les médias avaient sans cesse parlé d’abandon de plusieurs projets du genre par manque de financements. Tout était arrangé pour le mieux dans le meilleur des mondes au merveilleux pays des mollahs pour passer le cap des sanctions et du 25 mai. Mais le lundi 24 mai à 8h40 du matin quand le matinal Ahmadinejad a appuyé sur le bouton du démarrage de cette unité fictive une explosion a secoué le site provoquant un incendie monstrueux qui a tué 4 personnes et transformé 25 personnes de la suite présidentielle en torches vivantes. Le président n’a rien eu, mais il a vite quitté les lieux, par la suite, il s’est occupé des événements mineurs afin de ne pas croiser les journalistes et ainsi se retrouver contraints de donner des détails des faits survenus à Abadan. Dans ce genre de cas, il y a souvent l’hypothèse d’un attentat. Mais Téhéran qui accuse aisément Washington de terrorisme n’a pas parlé d’un attentat mais d’un accident. Il pouvait le faire, mais cela aurait été synonyme de sa vulnérabilité et aurait incité les rats à quitter le navire provoquant la chute du régime. Ce risque évident de l’effondrement du régime islamique dont a besoin Washington excluait un rôle américain. Il ne restait que l’hypothèse d’une avarie qui n’est possible qu’en l’absence de moniteurs de supervision et d’un personnel qualifié, autrement dit le régime venait malencontreusement de nous apprendre qu’il souffrait de grève dans le secteur de plus important de son économie, une contestation que l’on espérait depuis si longtemps et qui est devenue possible grâce à la passivité des Pasdaran. Les nouvelles vont vite en Iran : ceux, qui avaient paniqué au moment de la rupture des Pasdaran et s’étaient mis à acheter de l’or et des dollars, ont paniqué encore plus : la demande a été si importante que le prix officiel de l’or maintenu artificiellement bas a dépassé son prix du marché libre et la banque centrale a manqué de dollars pour satisfaire les acheteurs ! Bref, au merveilleux pays des mollahs tout allait mal. Tout était en train d’exploser. Très naturellement, les médias du régime ont annoncé la catastrophe à Abadan car la fumée était visible à plusieurs kilomètres de distance et l’on entendait des explosions à la chaîne et les sirènes des ambulances, mais aucune image n’a été publiée. Les médias ont alors diffusé la nouvelle de la « mort de Nasser Hejazi dans un hôpital de Téhéran après plusieurs jours de coma à la suite d’un cancer aux poumons » alors que ce champion très populaire avait vaincu cette maladie en 2010 et que les médias n’avaient aucunement parlé de son hospitalisation, encore moins de son état comateux sinon on aurait eu droit à des images de ses fans en larme aux abords de l’hôpital où il était soigné. Conscient du problème, le régime a amélioré le récit avec des images de fans très peu amassés dans l’hôpital en train de prier peu avant l’annonce de la mort, mais il a commis une erreur car sur l’une des images, on voit le « comateux » en vie !
Lundi à midi, alors que la famille pleurait la disparition de l’être aimé, on a vu apparaître des banderoles en mémoire du champion défunt alors que l’on venait à peine d’apprendre le décès.
Mais en sachant que le peuple avait toujours boycotté les manifestations du Mouvement Vert, le régime devait ruser : il a alors annulé le rassemblement prévu en son honneur le mercredi 25 mai au stadium Azadi d’une capacité de 100,000 personnes pour contrarier les fans et les amener ainsi à chercher à se réunir. Lundi a été marqué par de revirements délibérément énervants pour contrarier les fans et les pousser à se rassembler et aussi détourner les attentions du fait que les Pasdaran étaient sur le point de boycotter la manifestation officielle du 25 mai. Alors que l’on était collé à cette affaire, comme d’autres suivent l’affaire DSK, le mollah Pour-Mohammadi, un mollah haut placé et réputé proche des Pasdaran, a perdu sa mère. Le régime n’a pas trop parlé de cette disparition car si les vrais chefs du pays, c’est-à-dire les membres du Conseil de Discernement, étaient présents au rassemblement de soutien au mollah Pour-Mohammadi, il y avait très peu de monde à ce rendez-vous et surtout aucun uniforme. La dissidence avait gagné du terrain. Peut-être certains n’ont pas aimé le sacrifice de Nasser Hejazi.
Cet événement a été finalement célébré par distribution de fleurs et de keffieh au Parlement, une visite molle du ministre de la défense sur un chantier naval de cette ville et enfin l’inauguration d’un panneau publicitaire d’hommage au héros de la bataille sur une route périphérique dans l’indifférence des riverains en présence des derniers Pasdaran disponibles : la fanfare et une quinzaine de commandants.
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Selon notre correspondant et comme le montre cette image, il y avait au plus 600 personnes au cimetière, principalement des figurants afghans, alors que le régime a tout de même près de 3000 « partisans » que l’on voit pendant la Prière de Vendredi.
Jeudi, ce manque d’enthousiasme de la base (synonyme d’un futur succès du peuple) a encore effrayé les hommes d’affaires du régime : le marché de l’or et du dollar a enregistré de nouvelles hausses. Le régime était alors au plus bas. Comme à son habitude dans ce genre de cas, pour intimider ses amis tentés par la fuite, mais aussi le peuple qui attend son heure, le régime a repris les annonces de pendaisons. Il a annoncé 11 exécutions dont une en public.
Jeudi dans la soirée, aux alentours de minuit à Téhéran, le régime a publié un communiqué pour démentir l’hypothèse de l’absence ou la grève des ingénieurs et des pompiers spécialisés du site d’Abadan. Vendredi, le régime qui avait collectionné les échecs a encore échoué, une cinquantaine d’individus généralement des footballeurs (donc des gens liés au régime et souvent critiqués par Hejazi) se sont rendus à la cérémonie religieuse proposée par les faux opposants Verts et encadrée par le régime.
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