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Iran : Medvedev donne un coup de pied dans la fourmilière
13.07.2010

Le président russe Medvedev a déclaré que Téhéran était sur le point d’acquérir prochainement le potentiel nécessaire à la création d’une arme atomique. Les médias occidentaux parlent d’un durcissement de la position russe vis-à-vis de l’Iran. De notre point de vue, c’est une provocation destinée à agiter l’opinion américaine afin de rendre impossible le dialogue prôné par Obama, dialogue dont le but est de sceller une entente irano-américaine contraire aux intérêts russes.



Il y a quelques mois, avant l’adoption de la dernière résolution du Conseil de Sécurité, la Russie évoquait sur un ton grave le risque d’une bombe nucléaire iranienne et était à la pointe des Etats demandeurs de sanctions, elle avait même laissé entendre qu’elle pourrait adopter des sanctions unilatérales seules ou en combinaison avec la Chine. Pour montrer sa détermination, elle avait même arrêté ses derniers investissements pétroliers en Iran. Puis, elle a adopté la dernière résolution. Quelques jours après quand Washington et les Européens ont évoqué des sanctions complémentaires, bien qu’elles soient un rappel des sanctions exsitantes, elle s’était insurgée, en menaçant de quitter les Six. À présent, elle affirme que les sanctions ne sont pas idéales pour régler un problème, mais pourraient inciter Téhéran à se montrer coopératif tout en insinuant que l’on pourrait s’accommoder des mollahs atomiques.

Ce comportement fluctuant n’est pas nouveau, la Russie a toujours eu cette position dans la crise nucléaire iranienne. La raison de cette fluctuation n’est pas à Téhéran car les mollahs n’ont guère changé de position depuis le début de la crise : ils refusent tout dialogue. La raison de cette fluctuation se trouve à Washington car ce sont les Américains qui ont une position fluctuante et alternent des offres de dialogue et des sanctions. La Russie ne fait que réagir à ces fluctuations en prenant des positions contraires à celles des Etats-Unis. Les deux pays sont en compétition et l’Iran n’est qu’un terrain de confrontation ou un enjeu. Mais il s’agit d’un enjeu vital (pour les deux pays) puisque l’Iran est un couloir d’accès vers l’Asie centrale, région gazière dominée par la Russie et convoitée par les Etats-Unis. Les mollahs (anti-américains) sont le verrou qui ferme ce couloir. En passant dans le camp américain, le verrou saute. La Russie serait privée de plus d’un tiers de ses revenus gaziers. C’est pourquoi elle ne doit pas laisser les Etats-Unis avoir les moyens de négocier et cela suppose qu’il n’ait pas la gestion des pressions économiques qui affaibliraient efficacement les mollahs.

Dès le début de la crise, la Russie a tenté d’empêcher les Etats-Unis d’avoir cette capacité en s’opposant à l’adoption de nouvelles sanctions et en insistant sur le dialogue. Mais dernièrement elle s’est aperçue que son choix était erroné car elle avait aidé les Etats-Unis à retarder les sanctions plus fortes exigées par leur opinion publique pour mener tranquillement leur guerre d’usure économique et continuer la politique d’apaisement et le dialogue direct. La Russie s’est alors mise à exiger des sanctions pour priver Washington de son faux prétexte et l’engager à son propre insu de s’éloigner de sa politique de dialogue et de négociations via ses partenaires régionaux comme les Emirats, l’Inde, le Pakistan, la Turquie ou encore le Brésil qui proposent des compromis assortis d’importants investissements.

Washington a su éviter le piège en annonçant des sanctions sans conséquence économique aggravante pour les mollahs avant de relacer ses offres de dialogue (assorties d’investissements). La Russie s’est alors mise à imiter cette approche en s’adressant directement aux mollahs pour leur proposer des investissements pétroliers en Iran en échange d’un compromis avec les Six. Cette approche russo-iranienne n’a rien donné car les sanctions qui visent les mollahs sont à Washington et non à Moscou. Un accord sur le nucléaire avec Moscou n’est pas synonyme de la fin des problèmes avec Washington qui sanctionne les mollahs pour le nucléaire, mais aussi pour le terrorisme. Moscou a essayé de relancer les mollahs en parlant du Hamas, leur milice palestinienne, comme un grand interlocuteur régional, mais ces derniers n’ont pas relevé.

Moscou vient de laisser tomber son approche russo-iranienne pour revenir à une approche russo-américaine (axée sur l’inefficacité des sanctions et l’efficacité du dialogue).

On ne peut pas parler d’une reculade car c’est une nouvelle approche, sans doute la plus ingénieuse jamais imaginée par les Russes, puisque quelques jours après un échange d’espions, Moscou invite les Américains à envisager l’idée de cohabiter avec les bombes nucléaires iraniennes ! L’Américain moyen serait tenté de dire non merci.

La déclaration de Medvedev parle de dialogue, mais elle donne envie du contraire. C’est un formidable coup de poker pour diaboliser les mollahs afin de forcer Obama à cesser sa politique de guerre d’usure et de dialogue conçue pour parvenir à une entente contraire aux intérêts russes.


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Et si Washington acceptait la demande de Medvedev :
- IRAN : LE POUVOIR DU NON !
- (28 Avril 2010)

| Mots Clefs | Zone géopolitique / Sphère d’influence : RUSSIE |

| Mots Clefs | Décideurs : OBAMA |
| Mots Clefs | Enjeux : Apaisement |