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Iran-Pakistan : La Russie rêve de l’Inde !
28.05.2009

Les Russes seraient sur le point d’investir dans un gazoduc entre l’Iran et le Pakistan afin d’orienter le gaz iranien vers le marché chinois pour tuer dans l’œuf le projet Nabucco. Origine de la nouvelle : la Russie ! C’est en soi comique. Encore une fois, les médias ont commenté une déclaration russe sans déchiffrer ses sous-entendus très géopolitiques.



Selon le quotidien russe Kommersant, en réponse à une demande formulée dimanche dernier par Ahmadinejad, Gazprom s’est dit intéressé d’investir dans le projet de gazoduc Iran-Pakistan qui aurait été signé dimanche par Ahmadinejad et son homologue Pakistanais Zardari. Selon le très poutinien Kommersant, Moscou voudrait ainsi éliminer la concurrence iranienne sur le marché européen en orientant le gaz iranien vers la Chine.

En d’autres termes, Moscou prendrait en charge le coût d’un gazoduc reliant l’Iran à la Chine ce que la Chine elle-même ne veut pas faire en raison du coût exorbitant du projet. C’est d’autant plus absurde que ce projet concurrencerait son gazoduc trans-sibérien actuellement en chantier pour relier la Chine afin de lui vendre des milliards de dollars de gaz ! L’enjeu n’est donc pas commercial. Pour comprendre le sens de cette déclaration et surtout la méthode choisie pour attiser la curiosité des médias, il faut d’abord comprendre les tenants et les aboutissants du pipeline Iran-Pakistan.

Le pipeline Iran-Pakistan | Il y a une semaine, Washington avait expédié deux de ses alliés stratégiques, les présidents pakistanais et afghan, à Téhéran pour relancer le dialogue avec les mollahs. Pour les inciter à accepter son offre, il avait levé son veto à la réalisation du pipeline Iran-Pakistan-Inde.

A l’issue de cette rencontre, Téhéran a accepté la participation des diplomates américains à la prochaine rencontre avec les Pakistanais et les Afghans. En sortant de la réunion, le président afghan a parlé de la signature d’un accord majeur ! Ayant donné satisfaction aux Américains, en récompense, ces derniers ne se sont pas opposés à un déblocage dans le projet de gazoduc Iran-Pakistan-Inde, projet bloqué par leurs soins depuis 1994.

Ce n’est pas la première fois que Washington agi ainsi : il a, à plusieurs reprises, utilisé cette autorisation pour encourager les mollahs à accepter son offre d’entente. Par le passé, il concentrait ses efforts sur l’Inde qui est le principal financier moteur de ce projet car il est le véritable bénéficiaire du gazoduc. Cependant, Washington a constaté qu’après chacune de ses autorisations de la finalisation de l’accord, Téhéran revenait sur sa parole pour ne rien concéder en échange. Washington a alors décidé d’utiliser le Pakistan et l’Inde comme sas de sécurité : ainsi quand l’un dit oui, l’autre retient sa réponse afin de laisser Téhéran dans le doute et tester sa sincérité. Pour continuer ce jeu, les deux compères ont évoqué un désaccord sur le prix du transit, mais ce désaccord étant factice, ils refusent des réunions tripartites pour en débattre avec les mollahs. Cette fois encore, Washington a suivi le même schéma : l’Iran et le Pakistan ont signé dimanche dernier un pré accord en s’engageant à finaliser le contrat dans trois semaines dans un pays tiers, sous-entendu l’Inde.

Aussitôt après, Téhéran a convoqué une conférence internationale pour refuser tout dialogue sur le nucléaire avec les Etats-Unis en cas de rencontre internationale. Quelques heures plus tôt, il avait lancé un appel aux investisseurs étrangers pour financer ce projet qu’il savait à nouveau condamné par un nouveau veto américain.

L’intervention russe |Aucune compagnie issue d’un des partenaires (stratégiques ou mêmes commerciaux) des Etats-Unis n’a répondu à cette demande stérile. La Russie l’a fait car elle n’est pas un allié ou un partenaire des Etats-Unis, mais bel et bien un adversaire dans tous les domaines. Cette démarche répond à deux impératifs : renforcer Téhéran dans sa lutte contre Washington et perturber les pressions américaines vis-à-vis du Pakistan et de l’Inde en leur disant vous n’avez pas besoin de cet allié qui vous empêche de réaliser des projets utiles pour votre développement économique. C’est une véritable offensive contre les intérêts géopolitiques des Etats-Unis en Asie Centrale et en Inde.

Il s’agit cependant uniquement d’une offensive de charme : coup de publicité en direction de ces deux Etats asiatiques retenus pour faire partie de l’Organisation de Coopération de Shanghai. Moscou a tout simplement donné au Pakistan et surtout à l’Inde un exemple fort des bienfaits de leur future union au sein de l’OCS. Si elle se concrétisait, l’Inde pourrait acheter du gaz iranien et même du gaz russe via un pipeline Russie-Inde-Chine qui avait été évoqué dès 2006 et très pris au sérieux par les Indiens. On n’ose imaginer l’alliance de ces trois.

Cette union ne sera pas uniquement commerciale, mais aussi stratégique, c’est pourquoi Moscou est allé ouvertement à l’encontre du veto invisible des Etats-Unis en faisant beaucoup de bruit autour de cette affaire.

On est dans la tectonique des forces stratégiques. Moscou s’affirme comme un leader régional, pour attirer à lui les déçus du rêve américain.

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Paradoxalement, cette attitude qui pourrait séduire bon nombre d’actuels alliés des Etats-Unis ne risque pas d’intéresser les mollahs dont le centre d’intérêt n’est pas cette région (la leur), mais le Moyen-Orient. En essayant de préserver leur rôle régional au Liban pour y être un pouvoir de nuisance anti-américain, ils risquent de rater un grand rendez-vous historique et c’est tant mieux.


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| Mots Clefs | Zone géopolitique / Sphère d’influence : RUSSIE |
| Mots Clefs | Zone géopolitique / Sphère d’influence : O.C.S |
| Mots Clefs | Enjeux : Offensive énergétique Russe |

| Mots Clefs | Pays : Inde |
| Mots Clefs | Pays : Pakistan |

| Mots Clefs | Enjeux : Gazoduc, Oléoduc & pipelines |
| Mots Clefs | Enjeux : Pétrole & Gaz |

| Mots Clefs | Pays : Inde |