Mehdi Safari a encore invoqué le risque de pollution pour exprimer la plus ferme opposition de l’Iran à un tube subaquatique reliant l’Asie Centrale sur la rive Est de la Caspienne à l’Azerbaïdjan sur sa rive Ouest. La déclaration fait suite à une intervention du département d’Etat sur la nécessité de ce tube.

Sur un plan pragmatique, l’opposition de l’Iran équivaut au maintien de l’enclavement de l’Asie Centrale, actuellement accessible via la Russie. En l’absence d’une ouverture vers l’Ouest, cette région reste donc dépendante des débouchés russe ou chinois pour son gaz. L’argument est digne d’intérêt, dans la mesure où au même moment, Ahmadinejad s’envolait pour Pékin (officiellement, afin d’assister à l’inauguration des jeux para-olympiques).

On pourrait penser qu’étant isolé sur le plan international, le régime des mollahs cherche à rappeler à ses alliés naturels russes et chinois qui est l’arbitre de la conquête du gaz de l’Asie Centrale. D’ailleurs Safari a précisé que l’accès à l’Asie centrale était possible via la Russie, mais aussi via l’Iran en ajoutant que cet autre accès était de loin le plus rentable.

De ce fait, ces déclarations sont multifonctionnelles : Téhéran relance les Européens sur le projet « White Stream » de faire transiter du gaz de l’Asie Centrale par son territoire et adressent aussi un avertissement à ses alliés chinois et russes, leur rappelant qu’il leur coûterait cher de ne pas l’aider dans ses entreprises.

Malheureusement, ses deux avertissements-relances simultanés ont pour objectif de trouver des alliés pour contrer les sanctions américaines et non de trouver des partenaires de projets énergétiques. Pour Téhéran, le but final de la manœuvre est de neutraliser les sanctions pour avoir les coudées franches dans ses négociations secrètes avec Washington afin que ce dernier ne lui impose pas des clauses non acceptables en l’affaiblissant par ses sanctions.

Plus on s’approche de la date de l’élection américaine et plus Téhéran s’impatiente et multiplie les initiatives pour geler les sanctions et en même temps arriver à une entente avec l’administration sortante. A ce titre, on peut signaler qu’à la veille des propos du vice-ministre Safari à propos du pipeline de la Caspienne, Ahmadinejad se disait encore une fois disposé à un dialogue avec les américains (c’est-à-dire l’administration Bush encore au pouvoir)…

La seule chose qui ne rentre pas en compte est l’accessibilité des réserves gazières de l’Asie Centrale ! Tout dépend des objectifs à court terme des mollahs. En janvier 2008, ils avaient par exemple laissé entendre qu’ils se prononçaient en faveur d’un futur statut juridique de la Caspienne, statut facilitant la construction du pipeline exigé par Washington.

Et en définitive, quelles que soient les réponses européennes ou chinoises à ce sujet, les mollahs préféreront en dernière instance maintenir le doute sur leur choix.

C’est la base de la diplomatie des mollahs : jamais ils ne renonceront à ce désordre qui leur donne ce pouvoir de chantage qu’ils appèlent arbitrage. De ce fait, l’accès à l’Asie Centrale sera toujours perturbé tant que les mollahs seront au pouvoir en Iran, et eux-mêmes seront toujours entre deux eaux et entre deux contrats qu’ils ne signeront jamais.

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