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Iran : à la pêche aux voix
30.11.2006

Les Iraniens n’ont pas envie d’aller voter aux élections organisées par les mollahs. Ce fait n’est pas nouveau et le taux de participation a toujours été revu à la hausse par les autorités.



Les premières élections furent quasi obligatoires, le choix était entre le oui et le non à la république islamique dans des bureaux de vote surveillés par des hommes en arme, avec des enveloppes quasi translucides et des bulletins en couleur, rouge pour le non et vert pour le oui. Comme on avait menacé de lourdes sanctions ceux qui feraient le choix de l’abstention (suppression des papiers d’identité, interdiction de sortie du territoire, impossibilité d’obtenir un poste dans la fonction publique…), on comprend mieux la raison du succès de ce premier vote en nombre.

Mais sous le régime des mollahs, les candidats sont présélectionnés par un conseil composé de mollahs et leurs programmes sont évidemment conformes au régime, d’où une désaffection des iraniens pour les élections dans ce pays. Bien que les chiffres officiels fassent état d’une participation massive, personne n’est dupe en Iran et tout le monde sait bien que les faits sont différents.

La Deutsche Velle, la radio allemande, s’est penchée sur la question et son envoyé à Téhéran a expliqué dans un reportage que les iraniens n’avaient plus envie de participer aux élections organisées par les mollahs et encore moins aux prochaines qui doivent désigner les membres de l’Assemblée des Experts, assemblée de 90 mollahs qui est en charge de désigner le futur guide suprême de la révolution.

Le reporter allemand s’est d’ailleurs étonné du peu de publicité donnée à cet événement en Iran bien que le procureur général de la république islamique, le mollah Nadjafabadi, ait appelé à une forte participation populaire : Participation qui selon la terminologie officielle en vigueur chez les mollahs devrait contrer les USA, Israël et les contre révolutionnaires.

En réalité contrairement à l’analyse du reporter allemand de la Deutsche Velle, il y a eu une grosse campagne pour intéresser les iraniens dans ces élections inter-mollahs. Mais il s’agissait d’une campagne indirecte et par exemple la révolte d’un jeune mollah à Téhéran et le débat que ce dernier avait lancé sur la mission d’une république islamique faisait partie de cette campagne indirecte.

Tout au long des 6 derniers mois, différents incidents ont opposé les ténors du régime à des mollahs insurrectionnels, incidents qui étaient censés pimenter ces élections qui par leur nature sont les dernières à passionner les iraniens excédés par la présence des mollahs dans tous les domaines. Ainsi les incidents en question devaient attester de l’existence d’un autre islam politique, un contre-courant qui aurait dû inciter à une plus grande participation.

Cette abstention effraie le régime des mollahs qui y voit le signe de l’effondrement de sa base fidèle. On peut d’ailleurs le comparer à la baisse de fréquentation des mosquées ou mieux encore au boycott de la dernière manifestation obligatoire organisée par le régime.

Pour contrer l’abstention ou le boycott des élections, Pour-Mohammadi, le ministre de l’intérieur, vient de proposer un plan qu’il qualifie lui-même de très ambitieux.

Selon ce plan, tout iranien qui désire voter pourra recevoir sa carte d’électeur à son domicile sans démarche de sa part. En réalité cette mesure qui est un appel à la fraude dispense le régime de contrôler l’identité des électeurs. La carte d’électeur devient anonyme et vierge et celui qui la reçoit peut y inscrire le nom de son choix et pourra voter avec ce seul document au lieu d’une pièce d’identité. On ne voit en quoi cette mesure peut modifier le boycott des iraniens…

Mais gageons qu’il se trouvera encore des intellectuels (comme Emmanuel Todd), des journalistes (comme Alexandre Adler) et des politiciens français (comme Le Pen) pour s’extasier devant ce « modèle de démocratie électorale ».