Topo | C’est une drôle de situation. Pour ne pas accepter la main tendue par Obama, Téhéran a imaginé une fausse révolution de couleur autour de Moussavi, un grand partisan du retour aux principes fondateurs de la révolution islamique, c’est-à-dire le rejet de l’Occident et le refus de tout compromis. L’idée était de soutirer un soutien d’Obama à cette révolution. Ce soutien officiel du président des Etats-Unis aurait légitimé le Mouvement Vert et l’aurait placé au-dessus du président élu du régime des mollahs, rendant toutes négociations avec ce dernier dépourvues de valeur.

Washington a bien compris le plan des mollahs. C’est pourquoi quand le 13 juin 2009 les jeunes habillés en Vert ont déferlé dans les rues pour demander la victoire de Moussavi sous les regards étonnés des cameramen étrangers autorisés à filmer la rue (ce qui est strictement interdit en Iran), Obama ne s’est pas exprimé sur les évènements en cours. Il a même dénigré la représentativité de Moussavi en le qualifiant d’ersatz d’Ahmadinejad.

Téhéran est alors passé au plan B : attirer les Iraniens dans la rue pour forcer Obama à bouger. On a alors assisté à un changement de slogans et des rumeurs rassurantes que les Verts étaient en fait anti-régime ! Le 15 juin (25 Khordad), les Iraniens sont massivement descendus dans les rues dans toutes les grandes villes et le régime a tiré ou prétendu avoir tiré en espérant faire réagir Obama. Ce dernier est encore resté silencieux, mais la chaîne gouvernementale de télévision Voice of America qui émet en persan est entrée dans l’arène en prenant la défense des victimes. En fait, Washington s’est seulement mis à défendre les victimes du Mouvement Vert (et non ceux qui y ont été pour renverser le régime). Il a ainsi retourné le piège dans l’espoir de faire évoluer le mouvement à son avantage en y injectant ses propres islamistes iraniens basés aux Etats-Unis afin d’aller vers une république islamique inféodée à ses intérêts dans région.

Enjeux | Depuis cette date, il y a une sorte de ping-pong entre les deux adversaires : quand Téhéran parle d’un sujet pour relancer ce Mouvement Vert qui en raison de ses slogans n’a aucune capacité de mobilisation, Washington en rajoute pour faire prendre la mayonnaise. Les deux adversaires ont des objectifs différents, mais un seul but : attirer les Iraniens dans la rue sous la bannière de leur propre révolution verte !

Il y a une semaine, nous vous avons expliqué les mécanismes de ce ping-pong avant d’exposer ces explications à nos compatriotes pour qu’ils ne regrettent pas de ne pas participer à des manifs que l’on leur présente comme décisives pour un changement de régime.

En réponse, Téhéran vient d’interdire à grand renfort de bruits les médias occidentaux et iraniens qui travaillent au corps les Iraniens en présentant le Mouvement Vert comme une chance pour le pays. Ce n’est pas une interdiction, mais du teasing : il s’agit en fait de faire la publicité de ces médias pro verts démasqués !

Interdiction-teasing | L’info concerne d’une part les Occidentaux (que l’on veut duper), mais aussi les Iraniens (que l’on veut mobiliser). La partie internationale vise à réhabiliter les ONG américaines pro–verts, mais aussi les sites ou blogs anglophones du Mouvement Vert. La partie iranienne de cette interdiction teasing est plus intéressante car elle concerne 2 chaînes iraniennes, Pars (basée en Californie) et Rang-a-Rang (basée à Washington), qui font semblant d’être anti-mollahs, mais ne le sont pas vraiment. Les deux chaînes ont bénéficié de cette publicité car leurs noms sont associés de deux manières différentes à la monarchie et à Reza Pahlavi.

Pars a la particularité d’avoir une réputation de monarchiste, ce qui lui assure une bonne audience en Iran, audience qu’elle utilise pour promouvoir la mobilisation sous la bannière verte de Moussavi. Elle peut même se targuer d’être derrière la mobilisation du 15 juin.
© WWW.IRAN-RESIST.ORG

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Le cas de Rangarang aux finances douteuses (pas de pub, pas de revenus, mais beaucoup de moyens) est différent. Dirigée par Dâvar -un (ex) Gardien de la révolution- (ci-dessus), cette chaîne a bâti son succès sur un produit d’appel : des critiques anti-mollahs dans un langage très cru. Mais elle ne fait pas que critiquer les mollahs, son principal propos est de qualifier Reza Pahlavi de « complice du régime », diffamation sensée éloigner les jeunes qui semblent très attirés par le retour de la monarchie.

Parallèlement à l’interdiction-teasing pour ces deux chaînes complices (en perte de vitesse), on vient d’apprendre que le régime a chargé certains mollahs de s’installer dans des quartiers pauvres et d’installer ostentatoirement des paraboles sur le toit de leur logement pour inciter les habitants à les imiter afin qu’ils profitent des « bonnes » émissions des chaînes Pars et Rang-a-Rang.

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Pour en savoir + sur le Mouvement Vert :
 Iran : L’histoire secrète du Mouvement Vert
 (30 DÉCEMBRE 2009)