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Iran : Les indicateurs politico-économiques sont en alerte
29.11.2008

La situation économique iranienne est désastreuse à plus d’un titre : il y a aussi bien des facteurs étrangers comme les sanctions qui empêchent les investissements internationaux que des facteurs internes comme la nature même de la politique économique du régime (très liée aux évolutions diplomatiques) ou encore le culte de mensonges. En effet, le régime ment sur ses dettes, ses revenus et ses avoirs. Les chiffres changent sans arrêt d’un communiqué à l’autre au gré des besoins intérieurs ou extérieurs. Si ces chiffres sont faux et inexploitables, ils sont néanmoins des indicateurs importants sur l’état du régime (son indice de confiance interne, ou la confiance qu’il inspire à l’étranger).



La confiance que le régime inspire à l’étranger est aujourd’hui altérée par son attitude dans la crise nucléaire et aussi par Ahmadinejad. Le problème vient du fait que le régime a besoin de ce personnage pour amplifier la crise afin d’obtenir une capitulation des adversaires du programme nucléaire en échange des garanties américaines de sécurité. Mais en attendant cette entente, Téhéran doit continuer à résister aux sanctions américaines et pour cela il a besoin d’inspirer la confiance chez ses partenaires européens.

Cette contradiction dans les objectifs : paraître politiquement toujours plus menaçant et inspirer économiquement la confiance ne cesse de mettre le régime des mollahs dans l’embarras aussi bien sur le plan international que sur le plan intérieur.

Désordre avec l’étranger | On a assisté à l’un de ces malaises dans la polémique concernant l’état des avoirs en devises. L’exposé de ce cas est instructif : Téhéran prétend que sa politique nucléaire est l’expression d’un choix du peuple et que le président de la république islamique ne fait qu’appliquer ce choix. Cependant, très régulièrement quand le régime se trouve face à une forte pression internationale, il laisse entendre qu’Ahmadinejad pourrait céder sa place à un modéré. Pour insinuer ceci, le régime a encore évoqué une montée d’impopularité d’Ahmadinejad pour expliquer le retour des soi-disant modérés et comme justification de l’impopularité d’Ahmadinejad, les médias du régime ont évoqué sa faiblesse en gestion économique et son incapacité à gérer un budget. Pour illustrer cette incapacité, les médias, mais aussi des officiels ont affirmé que malgré des revenus pétroliers historiques, les réserves en devises étaient presque vides par la faute d’une explosion de dépenses inutiles décidées par Ahmadinejad. Cependant, vu l’ampleur que prend toute dépêche émanant d’Iran, le régime a vite compris l’erreur qui a été de reconnaître la fonte de ses réserves vis-à-vis de ses créanciers et en moins de 2 jours, les officiels indiscrets ont changé de discours pour accuser les médias et les réserves sont redevenues à nouveau officiellement pleines.

Désordre sur le plan intérieur | Ce même genre de désordres existe dans l’économie intérieure, et à un degré plus élevé. L’observation de ce désordre intérieur est d’ailleurs beaucoup plus intéressante que les revirements sur l’état des réserves.

Sur le plan intérieur, le régime doit inspirer confiance à ses alliés économiques internes. Ces alliés ne sont plus les bazaris, mais les mollahs et les pasdaran reconvertis en hommes d’affaires. Ces nouveaux commerçants (importateurs, spéculateurs…) sont impliqués aussi bien dans le commerce qu’en politique : ils savent que l’avenir du régime dépend de ses relations avec les Etats-Unis et non de la confiance qu’il peut inspirer en Europe. Ces véritables piliers du régime suivent l’actualité et sont très sensibles aux relations avec Washington. Quand ils paniquent par peur d’une attaque ou de nouvelles sanctions et qu’ils sont tentés de fuir avec leur magot : le régime les rassure par des annonces financières pour les dissuader car étant impliqués dans la sécurité du pays, leur fuite marquerait la fin du régime. Les contenus de ces annonces économiques rassurantes sont donc un indice de confiance de la stabilité interne du régime.

Ainsi au début de l’année dernière, quand les sirènes de la guerre et des sanctions lourdes se faisaient entendre dans les médias internationaux, Téhéran a décidé de calmer ses nouveaux commerçants par la promesse d’importants prêts bancaires (souvent en dollars) sous forme d’aides aux entreprises rapidement créatrices d’emplois ou de remboursement d’une soi-disant dette de la Banque Centrale Iranienne (BCI) aux banques (privées dont certaines n’existaient pas encore). Cependant, avec l’appauvrissement graduel de l’Iran, le régime a été tenté de reprendre sa parole et d’oublier ses promesses.

En octobre 2008, quand les sirènes de la guerre ont cédé leur place aux rumeurs d’une entente préélectorale, le régime a laissé tomber ses promesses étant sûr que ses miliciens businessmen n’étaient plus tentés par la fuite (mais heureux de rester pour récolter les retombées de l’entente). Le régime a alors affirmé que ce sont les banques qui devaient de l’argent à la BCI et non le contraire, il a aussi gelé les aides promises aux entreprises rapidement créatrices d’emplois accusées d’inefficacité (c’est une vérité). Le régime a aussi décidé de ponctionner lourdement le Bazar traditionnel qui est aujourd’hui devenu un obstacle pour les nouveaux commerçants, mais aussi pour le projet d’ouverture du marché iranien aux investisseurs étrangers.

Après ces annonces négatives qui remettaient en cause toutes les promesses, le régime a destitué le directeur de la BCI et a promis une révision des mesures de ce dernier. Pour rassurer les alliés internes, le nouveau directeur a annoncé des changements rapides avec une nouvelle répartition des aides payables en dollar (et non en rial qui ne vaut rien). Le régime a parlé de 5,5 milliards dollars de cadeaux aux banques (sommes très en baisse par rapport aux chiffres précédents), et finalement rien n’a été distribué car Téhéran attendait les résultats des élections américaines pour estimer les chances d’une entente (de sa survie), avant de décider de la suite à donner à ses promesses anti-panique.

Ces distributions étaient en stand bye car l’administration Bush continuait à tendre la main aux mollahs ou d’envoyer des émissaires à Téhéran, sans modifier son offre qui est un gel des activités nucléaires comme condition préalable à une reprise du dialogue. Or, cette offre ne convient pas aux mollahs car ils ne veulent de condition préalable ni pour le dialogue et ni pour l’entente.

La contradiction (faire peur ou faire confiance) entraîne toujours des turbulences | Mercredi dernier, pour sonder Washington et savoir s’il allait changer son offre, Téhéran a joué la carte de l’escalade par un tir de missile et l’annonce d’un raidissement du programme nucléaire. Immédiatement, le porte-parole du gouvernement a annoncé un nouveau montant de la soi-disant dette de la BCI aux banques privées, c’est-à-dire le paquet promis aux piliers du régime pour les dissuader de déserter le navire : 20 milliards de dollars soit presque 4 fois le montant annoncé en octobre dernier au moment d’une possible entente. On peut en conclure que les provocations du régime déplaisent à ces composants businessmen qui craignent l’échec d’une entente avec Bush et l’arrivée d’une nouvelle administration qui disposera de 4 ans pour briser les défenses de ce régime.

Jeudi, au lendemain de la provocation des mollahs, Condoleezza Rice a fermé la porte à une entente dans l’immédiat. Seulement quelques heures après (vendredi jour férié), le nouveau directeur de la BCI a annoncé une nouvelle estimation du paquet qui est passé à 31 milliards de dollars, soit 6 fois le montant promis en octobre ! C’est un formidable indice de la baisse du moral des troupes. Le directeur de la BCI a aussi annoncé en guise d’acompte, l’ouverture immédiate d’une ligne de crédit de 6 milliards de dollars officiellement accordés pour faciliter les échanges interbancaires. Cette seconde annonce confirme le précédent indice. Le moral des troupes semble altéré par de mauvaises nouvelles.

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Mensonges du régime sur ses performances économiques :
- Iran : Risques très élevés pour les investisseurs, selon la Coface
- (19 AOÛT 2008)

Mensonges du régime sur ses dettes :
- Iran : Quand la Banque Centrale manipule les chiffres de la dette extérieure
- (21 JANVIER 2008)

Mensonges du régime sur ses revenus pétroliers :
- Iran-Pétrole : Incohérences dans la dépêche de l’AFP
- (25 OCTOBRE 2008)

Mensonges du régime sur ses revenus gaziers :
- Iran – Gaz : Les mensonges de la phase 6 de Pars Sud
- (23 OCTOBRE 2008)

| Mots Clefs | Instituions : Politique Economique des mollahs |

| Mots Clefs | Nucléaire : Crise & Escalade |

| Mots Clefs | Enjeux : Rétablir les rel. avec les USA & Négociations directes |