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Iran : La semaine en images n°182 14.08.2011 Depuis plusieurs mois, les Bazaris et les officiers des Pasdaran ont rompu avec le régime. La semaine dernière, au début du Ramadan, par leur faute, les mosquées sont restées vides. Ce vide a confirmé la rupture des associés historiques du régime et l’isolement de la caste dirigeante. Les Iraniens en ont profité pour boycotter à leur tour le Ramadan et les divers rassemblements religieux officiels. Les associés affairistes du régime (à ne pas confondre avec les Bazaris) ont conclu que le régime était fini, ils ont boudé les rassemblements autour des hauts personnages du régime en particulier le Guide. Très inquiet par l’éventualité de cette dernière rupture interne qui peut s’avérer fatale, le régime a constamment nié le boycott populaire et également mis l’accent sur la répression pour contenir le peuple. Il a aussi incendié le plus grand entrepôt du Bazar pour insinuer qu’il pourrait réserver un pareil traitement à ses associés infidèles avant de leur annoncer de grands cadeaux commerciaux pour jouer l’apaisement et l’arrangement. Ces efforts sont restés vains car le boycott a continué, l’activité commerciale n’a pas décollé et en plus, les marchands de tissus, principaux acteurs de l’économie iranienne, qui avaient payé pour les associés du régime, se sont mis en grève entraînant derrière eux l’arrêt des ateliers de confection et de divers partenaires du secteur. Cette semaine, la grève de ces Bazaris a continué (notamment en raison du poids économique, mais aussi politique depuis une centaine d’années des marchands de tissus et le mécontentement des autres Bazaris vis-à-vis de la gestion désastreuse des mollahs). Cette semaine, les mosquées sont également restées vides. En conséquence, le régime a repris les mêmes efforts de la semaine dernière mais dans de plus grandes proportions : plus d’annonces d’arrestations intimidantes et d’actions policières, mais aussi plus de cadeaux commerciaux. Les images de la semaine nous montrent la fausseté des annonces intimidantes et en conséquence, la poursuite du boycott au sein du peuple, mais aussi sa propagation chez ceux du régime qui ne croient plus en sa capacité à assurer leurs intérêts. Voici les images d’une semaine placée sous le signe d’une plus grande déstabilisation pour les mollahs. Il y a une semaine, l’émergence d’un boycott des associés avait contraint la caste dirigeante à renoncer à l’organisation des rassemblements autour des figures emblématiques du régime comme Khamenei, le guide spirituel du régime, Ahmadinejad (en sa qualité du « président élu par le peuple ») et encore Larijani, important membre du Conseil de Discernement, qui à ce titre peut être considéré comme le patron politique du régime. En 5 jours, il n’y a eu qu’un rassemblement officiel programmé : la rencontre du Guide avec les meilleurs liseurs du coran, un groupe très limité en nombre, un choix qui dénonçait la grande difficulté du régime à rassembler les troupes fidèles. Certes, les médias du régime et les faux opposants internes comme Moussavi, Karroubi et les partisans verts islamiques ont joué le jeu et évité de mettre en évidence l’absence de rassemblements, mais cela pendait au nez du régime. Il devait organiser un grand rassemblement rempli de ferveur islamique autour du Guide et tous les autres symboles de son autorité. Samedi, le premier jour de cette semaine, au soir du sixième jour du mois de Ramézan (Ramadan), le régime a enfin annoncé la rencontre des hauts responsables du régime avec le Guide. Il y avait là de simples exécutants comme les ministres ou encore les membres permanents du Conseil du Discernement qui sont les véritables dirigeants du régime. Le régime a évoqué la présence de milliers de personnes, mais comme on peut le voir, la foule ne dépassait pas les 200 participants.
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Le soir même, les médias et les faux opposants sont aussi sortis de leur silence pour remettre en cause les propos choquants du Guide sur le rôle négatif de la presse. Les médias périphériques liés au régime ont participé à la riposte en évoquant des propos choquants du Guide face à des « milliers de responsables présents ». On peut dire qu’avec ce buzz en chaîne, la caste dirigeante a fait le maximum de communication avec le minimum de fidèles à sa disposition : plus exactement il a tout fait pour détourner l’attention de ses associés économiques à propos de la perte d’une nouvelle partie de ses partisans politiques et sécuritaires depuis la semaine dernière. La semaine dernière, face aux prémices de cet effondrement interne, le régime avait joué la carte de l’autorité et de la puissance avec l’arrestation de centaines de trafiquants d’armes ou de dizaines de bandits très violents. A chaque fois, en l’absence d’images correspondant à l’étendue de l’exploit sécuritaire, il n’y avait que la volonté d’intimider. Le dimanche 7 août, au lendemain du buzz, le régime a annoncé une très grande prise d’opium (9 tonnes) sur une route désertique iranienne, sa plus grande prise depuis la révolution islamique. Par la même occasion, le régime a annoncé le démantèlement du plus grand réseau iranien de trafiquants de stupéfiants ! Mais on n’a vu aucun défilé de trafiquants, ni aucun camion transformé, ni aucun des policiers héroïques, ni les objets qui contenaient les pains d’opium. On n’a pas vu non plus l’opium en question et surtout il n’y a eu aucun spectacle symbolique de la destruction de la prise. On n’a vu que des sacs plastique qui sont censés contenir l’objet du délit. En l’absence de preuves, il ne restait que l’instance sur l’exploit policier et la volonté d’intimider.
Le modèle de communication sécuritaire de la semaine dernière comportait aussi des annonces de remplissage des mosquées pour attribuer un appui populaire au régime afin de rassurer ses associés tout en démoralisant ses adversaires sans trop solliciter une police qui manque de troupes fidèles. C’était là une trouvaille pragmatique. Cependant, puisque que le régime ne pouvait pas remplir effectivement ses très nombreuses et gigantesques mosquées pour donner de la crédibilité à ses annonces de remplissage, il avait troqué les grands rassemblements de prieurs pour des « réunion d’intimité avec le Coran », justifiant le vide des moquées par le respect des fidèles pour le besoin d’intimité de leurs congénères. Malgré les sous-titres, avec moins de 600 participants dans la plus grande réunion d’intimité avec le Coran, l’initiative avaient ridiculisé le régime. Cette semaine, le régime était tenu de reproduire le schéma en l’améliorant pour limiter la casse. Lundi, le régime n’a pas pu réunir les mêmes participants pour une nouvelle « réunion d’intimité avec le Coran ». Il n’a pu trouver qu’une quarantaine d’enfants pour sa trouvaille médiatique, un aveu que personne ne le craint assez pour l’aider ou participer à ses mises en scène.
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Mais, au même moment, le régime a également relevé le plafond de transferts quotidiens de capitaux « à des fins commerciales » vers l’étranger de 100,000 dollars à 500,000 dollars pour permettre à ses hauts dirigeants de préparer leur fuite au cas où les choses commenceraient à aller mal. Le régime a aussi annoncé le démantèlement du plus grand gang de trafiquants d’héroïne en Iran pour restaurer son autorité perdue et inviter ses adversaires à se tenir tranquille. Cette fois, il a montré les trafiquants, leur butin, leurs armes et le policier qui les aurait arrêtés !
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Lundi dans la soirée, le régime a enfin trouvé une parade pour effacer des mémoires son échec dans l’organisation des « réunions d’intimité avec le Coran » en annonçant tout simplement le « succès répété des dîners géants qu’il organisait depuis une semaine pour les jeûneurs de Machad ! » La série de photos qui suit résume tout : des gros plans sur les préparatifs d’un service continu de plusieurs heures, puis un cadrage serré pour cacher de grandes étendues restées vides par la faute d’un boycott massif dès le premier service.
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Mardi, le régime a sombré dans le silence. Pour ne pas montrer son trouble, il fallait faire acte de présence : il a chargé son serviteur Ahmadinejad de présider la cérémonie d’investiture de son nouveau ministre du pétrole, Rostam Ghassemi, un commandant Pasdaran fidèle au régime. Comme on peut le voir, les mines étaient moroses pendant cette cérémonie entre le petit singe (le surnom de Mahmoud en Iran) et le grand yéti.
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Jeudi, acte 1. Pour intimider Machad, le régime a annoncé le rassemblement de toutes ses troupes dans la principale caserne de la ville, mais les troupes n’ont pas quitté la caserne. Grâce aux images, on comprend la raison de ce choix : il y avait très peu de monde et de surplus très peu de jeunes (on allait voir que le régime était esseulé et vieillissant).
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Ce vendredi, il semblerait que le régime a été confronté à la même réponse. Notre preuve est la disproportion entre les dimensions des têtes des gens situés sur la même ligne dans la partie arrière de la salle, un problème qui n’existe pas sur le devant de la foule. Les images qui suivent sont très grandes : vous pouvez cliquer & zoomer sur elles pour les agrandir afin de mieux voir leurs détails.
Un autre signe qu’il y avait un problème ce vendredi est que pour la première fois dans l’histoire de cette institution politique, le régime a parlé d’une séance de Prière de Vendredi très normale avec « ses incidents habituels comme les cris d’Allah Akbar ». Vendredi dans la soirée, Haddad-Adel, un membre du Conseil de Discernement, avait invité les membres de l’« association islamique des ingénieurs » qui compte des milliers de membres à venir dîner avec lui dans une grande mosquée de Téhéran : la salle était presque vide, les gens présents, presque mécontents d’y être et de s’afficher avec un régime mourant.
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Cette fois, le régime a bien fait les choses en montrant une brigade type avant, pendant et après l’opération.
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En nous renseignant dans la presse iranienne, nous avons appris qu’il n’y avait pas eu d’autres interventions et que l’opération était une vitrine unique. En d’autres termes, le régime a organisé une jolie simulation en terrain conquis. En résumé, au début de la semaine, le régime était boycotté par tout le monde, ridiculisé par le peuple, la majorité des Pasdaran et des Bazaris, il devait les intimider. Mais il n’a pas osé intervenir une seule fois hors de ses territoires conquis (sauf pour jouer les pyromanes) révélant à tous ceux qui le connaissent bien qu’il n’avait pas les moyens d’intimider ses adversaires pour assurer sa survie. Le régime est désormais comme ce commando de pacotille dans un équilibre précaire : menacé de chuter par un coup inattendu jaillissant d’une des fenêtres de son propre camp.
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