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Iran-Irak : Washington lâche Mariam et Massoud Radjavi
06.07.2010

Washington qui a besoin d’une entente avec les mollahs pour accéder à l’Asie Centrale ou pour dominer les chiites utilise depuis 2 ans les Moudjahiddines qui vivent en Irak dans le camp Achraf comme une éventuelle monnaie d’échange. Au moment où Téhéran continue à refuser le dialogue, première étape vers cette entente vitale pour les intérêts américains, les Etats-Unis ont définitivement renoué avec cette approche en plaçant ce 2 juillet le camp sous l’autorité du gouvernement (chiite) irakien qui a aussitôt lancé des mandats d’arrêt internationaux à l’encontre de Massoud Rajavi et de 37 hauts responsables de l’Organisation des Moudjahiddines du Peuple iranien.



C’est un véritable coup de tonnerre : la Cour d’Assise Irakienne veut juger Massoud Radjavi et 37 hauts responsables de l’OMPI (Organisation des Moudjahiddines du Peuple iranien) dont l’épouse Mariam Rajavi (qui réside en France) et un certain Amir Kazemi. Cela n’a rien de fantaisiste car cette organisation islamo-marxiste, complice de Khomeiny en 1979, s’est installée en Irak après sa brouille avec Khomeiny et en échange de l’aide militaire et financière de Saddam, elle a participé à des opérations de répression menées par ce dernier contre les Kurdes, mais aussi contre les chiites. Cette organisation a de nombreux ennemis en Irak, mais n’a jamais été citée lors du procès du président irakien car elle bénéficiait de la protection des Etats-Unis.

D’une manière communément admise, différentes sources occidentales affirment que cette protection avait une contrepartie : l’organisation islamo-marxiste devait organiser des attentats en Iran pour intimider les mollahs afin qu’ils acceptent de négocier avec Washington. Ces sources omettent cependant de préciser que l’Organisation des Moudjahiddines du peuple a été la branche armée du parti islamo-fédéraliste Nehzat Azadi, parti officiellement anti-OPEP créé avec des fonds américains dans les mois qui ont suivi la création de l’OPEP par le Chah d’Iran. On oublie également de préciser que l’OMPI a commencé ses activités terroristes contre le Chah en 1973 quand ce dernier a annoncé qu’il ne reconduirait plus les contrats pétroliers de l’Iran avec les Américains et les Britanniques en 1979. On oublie également de préciser que c’est en 1979 qu’a eu lieu la révolution islamique qui a porté au pouvoir un gouvernement 100% Nehzat Azadi qui a été officiellement reconnu par les Etats-Unis au lendemain de la révolution islamique.

Par la suite, les choses se sont gâtées car les mollahs (alliés historiques de la Grande-Bretagne) ont pris le pouvoir à l’intérieur du nouveau régime islamo-fédéraliste. Les moudjahiddines ont tenté de faire un coup d’Etat, mais ils ont échoué et ont été contraints à l’exil. Ils ont élu domicile en France, puis en Irak qui était alors armé par Washington pour punir les mollahs qui lui avaient volé son bien (une république islamique fédéraliste). Depuis ce pays, les moudjahiddines ont participé à la guerre aux côtés de Saddam pour reprendre le bien des Etats-Unis, avant de se lancer dans une attaque meurtrière ce qui leur vaut la haine des Iraniens. Malgré cela, ils ont conservé le soutien de Washington. Ce dernier les a cependant placés en 1997 sur sa liste des organisations terroristes quand Clinton tentait par tous les moyens de conclure une entente avec les mollahs suite au refus de l’Arabie Saoudite de reconduire en 1996 son contrat d’exclusivité avec les Etats-Unis. On avait alors écrit des textes très durs sur le passé des Moudjahiddines en révélant notamment qu’ils avaient tué des Américains en poste en Iran pour déstabiliser le Chah. Les efforts de Clinton ont échoué et Washington a alors entrepris des efforts pour restaurer l’image des Moudjahiddines et présenter ses ex-candidats au pouvoir comme les seuls capables de prendre le pouvoir en Iran. Ces gens, haïs en Iran qui pour leur complicité avec Saddam et Khomeiny, sont alors officiellement devenus les « principaux opposants » aux mollahs tout en demeurant sur la liste américaine des organisations terroristes.

On s’est alors retrouvé dans une situation complexe. Ils étaient officiellement poursuivis par les Etats-Unis qui ne pouvaient pas les extrader vers l’Iran car les deux pays n’ont pas de relations diplomatiques ou des conventions d’extradition et en même temps, ils bénéficiaient du soutien de Think-tanks financés par l’Etat américain ou des activistes iraniens des droits de l’homme, eux aussi grassement financés par les Etats-Unis. Washington jouait sur les deux tableaux !

De fait quand Saddam était dans le box des accusés sans avoir à ses côtés les Moudjahiddines qui avaient été les bras armés de sa répression, Washington ne protégeait pas un ex-complice du dictateur irakien qu’il aurait découvert par hasard dans une ville fortifiée près de Bagdad en se disant tiens, je les utiliserais bien. Non, il protégeait sa propre création qui devait en 1979 participer au pouvoir en Iran et destinée à reprendre le pouvoir par une révolution de couleur si le deal échouait. A la même époque, Washington leur a confié des missions de déstabilisation qu’ils ont exécutées dans l’espoir d’une victoire pour revenir à Téhéran.

Mais ces opérations ont été un échec. Les Moudjahiddines d’Achraf étaient vieux et n’avaient plus de base à Téhéran. Les opérations ont été confiées aux Kurdes marxistes de Pejak et aux islamistes sunnites de Jundallah. En tenant compte de leur incapacité et leur impopularité, les moudjahiddines d’Achraf sont devenus inutiles. C’est à partir de ce moment que Washington a fait part de son intention (en juin 2008) de confier la tutelle du camp Achraf au gouvernement chiite irakien dont les membres parlaient depuis longtemps d’un procès puis d’une extradition de coupables vers l’Iran. Cette annonce laissait supposer qu’il voulait livrer les Moudjahiddines d’Achraf à leurs pires ennemis, les mollahs. Quelques mois plus tard en octobre 2008, certains Moudjahiddines moins connus ont établi une nouvelle organisation d’opposition aux Etats-Unis englobant tous les révolutionnaires islamistes pro-américains de 1979 qui avaient été chassés du pouvoir par les mollahs. On ne pouvait pas alors deviner que Washington était en train de se débarrasser des branches mortes pour sauver l’arbre.

Contre l’attente de Washington, cette opération d’élagage nécessaire n’a pas fonctionné car les mollahs, qui demandent régulièrement l’expulsion des Moudjahiddines d’Irak, n’ont pas saisi l’occasion. En fait, ils ont refusé car en tant qu’alliés des Palestiniens et de la rue arabe, ils doivent éviter d’avoir de bonnes relations avec les Américains, principaux protecteurs de l’Etat d’Israël. De fait, quand ils demandent l’expulsion des Moudjahiddines d’Irak, ils ne demandent pas indirectement un échange, c’est un prétexte pour parler de la protection américaine à cette organisation afin de refuser l’apaisement ou encore engager Washington dans un processus irréversible de déportation des opposants sous sa protection, un processus pour en finir avec tous les opposants, mais aussi avec le projet d’un changement de régime.

Devant l’échec de cecoup de poker doublement utile (élagage+élimination d’un prétexte anti-apaisement), les (faux) droits-de-l’hommistes iraniens grassement entretenus par Washington depuis des années sont entrés en scène pour condamner cette extradition (avortée) ou à défaut pour exiger que les habitants d’Achraf soient envoyés dans un pays tiers comme la France. Ainsi Washington a rassuré la direction historique de l’Organisation qui fut très impliquée dans les opérations irakiennes et dans le même temps, il a offert à ses pions droits-de-l’hommistes (peu connus des Occidentaux) de faire parler d’eux comme de parfaits démocrates (on les retrouve aujourd’hui dans le processus de soutien américain au Mouvement Vert de réforme du régime).

Dans les mois qui ont suivi, Washington a recommencé l’opération à plusieurs reprises, en évoquant la mise sous tutelle irakienne du camp d’Achraf et en franchissant des étapes laissant supposer le processus de déportation souhaitée par les mollahs (pour désintégrer l’opposition). Mais cela n’avait rien donné car il y avait cette idée d’échange qui ne convient aux mollahs.

L’été dernier, les choses se sont accélérées car le régime a été proche d’un effondrement, Washington devait procéder à son élagage pour confier un rôle à cette organisation islamiste créée sur mesure pour ses projets d’agitation régionaux. Il avait alors confié la tutelle du camp aux policiers irakiens qui avaient pénétré à l’intérieur du camp pour tuer ses habitants avec la complicité des Pasdaran. La direction parisienne s’était mobilisée et Washington avait dû intervenir pour arrêter le massacre.

Cette année, Washington a trouvé une meilleure idée : l’émission de mandats d’arrêt internationaux contre Massoud et Mariam Radjavi ainsi que 36 de leurs collaborateurs de la période irakienne pour qu’ils soient jugés par la Cour d’Assise Irakienne, ce qui exclut l’expulsion, mais élimine les branches mortes qui ne servent plus à Washington. Pour donner plus de force à cette opération, Washington a encore organisé une cérémonie de transfert de tutelle !

La durée du processus dépend des évolutions du régime. Si l’effondrement se précise, Interpol remettra les époux Radjavi aux Irakiens.

Cette opération intervient une semaine après le rassemblement de l’OMPI à Taverny qui a été cautionné par l’Etat américain avec la présence de John Bolton et encensé par la Voice of America, la chaîne publique américaine qui a parlé de dizaines de milliers de participants alors que selon un ami présent il n’y avait que 3000 personnes de différentes nationalités engagées à la journée. Un pot de départ sans doute.


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