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Iran-sanctions : Washington veut mener la danse
02.04.2010

Un jour après l’accord de la Chine pour l’adoption des sanctions multilatérales, les raffineries indiennes Reliance qui réalisent la majorité de leur chiffre d’affaires avec les Etats-Unis ont annoncé hier la fin de toutes leurs relations avec l’Iran, ce qui suspend ses achats de pétrole, mais aussi d’importantes livraisons d’essence ou de gazole. Bien que derrière cette rupture, Washington n’en a pas parlé. Il mène discrètement la danse.



Depuis 3 ans, Washington sanctionne durement l’Iran, un partenaire stratégique de la Chine, en lui proposant de mettre fin à son calvaire, s’il accepte de devenir son allié régional. L’objectif est d’accéder via ce pays à la région hautement gazière qu’est l’Asie Centrale pour l’éloigner de la Chine. Il cherche aussi à contrôler les musulmans d’Asie Centrale avec le concours des mollahs et des Pasdaran pour créer un front de soutien aux Ouïgours, musulmans chinois afin de déstabiliser la Chine de l’intérieur. L’entente permettrait également aux Etats-Unis de contrôler au moins 51% des réserves mondiales du gaz. Pour toucher l’objectif sans payer aucune contrepartie aux mollahs qui veulent vendre cher leur alignement, Washington a misé sur une guerre d’usure à leur encontre. Pour les ratatiner sans les renverser, il lui fallait être le seul maître à bord des sanctions. Washington a réussi ce tour de force en prétendant qu’il voulait attaquer militairement Téhéran : les autres puissances, y compris la Chine, se sont empressées de le supplier de ne recourir qu’à des sanctions. Puisqu’il était le seul à les vouloir, en janvier 2007 il s’est trouvé seul maître à bord !

La Chine a été bien embêtée comme la Russie ou encore la Grande-Bretagne, 1ère puissance pétrolière mondiale, qui ne peut pas accepter la mainmise américaine sur 51% des réserves gazières mondiales. Mais c’était trop tard car Washington n’a plus fait appel au Conseil de Sécurité. Il n’en avait plus besoin pour adopter ses propres sanctions. Il n’y est revenu qu’en janvier 2010 quand il a eu besoin de l’immobilisme de cette institution pour ralentir voire stopper les sanctions pour attendre sagement que les mollahs épuisés s’effondrent à ses genoux.

Dès lors, une résistance s’est organisée chez les Etats qui souffriraient d’une alliance entre les mollahs et les Américains. Le premier à réagir a été la Grande-Bretagne, citée hypocritement en exemple par les USA comme un obstacle à des sanctions plus fortes. Bien que la Grande-Bretagne soit l’alliée historique du clergé iranien, afin de contrer le péril absolu pour son avenir économique, elle a demandé à ses entreprises qui fournissaient 50% des besoins iraniens en carburant de cesser leurs livraisons. Elle espérait entraîner Washington dans l’escalade des sanctions ou l’escalade guerrière pour rendre impossible l’entente irano-américaine. Washington qui a irrémédiablement besoin de cette alliance et ne peut tolérer que l’on attente à sa maîtrise des sanctions avait boycotté la nouvelle. Puis ce fut le tour de la Chine, citée encore plus explicitement comme un obstacle à des sanctions contre Téhéran : elle a diminué ses achats pétroliers à l’Iran pour priver Washington de son alibi et l’entraîner dans l’escalade qu’il veut éviter. Washington a boycotté la nouvelle : ce sont les Britanniques qui l’ont révélée. Enfin, le dernier à réagir a été la Russie. Désormais tous les membres permanents du Conseil de Sécurité étaient implicitement favorables à des sanctions contre Téhéran. Washington a encore esquivé. Il y a deux jours, la Chine a forcé la barrière de l’esquive américaine en acceptant l’adoption de nouvelles sanctions.

Ce que l’on peut qualifier d’événement historique n’a donné lieu à aucun commentaire du côté de la Maison-Blanche bien embêtée par le risque de perte de sa maîtrise exclusive des pressions sur les mollahs. Washington a même gardé le silence sur cette adhésion : l’info a encore été diffusée en premier par les Britanniques qui veulent faire capoter l’entente dangereuse entre Washington et les mollahs. Avec une pointe de malice, Reuters a même affirmé que c’était une victoire pour les Etats-Unis.

Finalement, sans sauter de joie ni se presser, Obama est intervenu pour faire savoir qu’il espérait une résolution dans quelques semaines ! Mais ce retard n’était pas de la torpeur puisque 24 heures après l’adhésion chinoise aux sanctions multilatérales, les raffineries indiennes Reliance, qui réalisent la majorité de leur chiffre d’affaires avec les Etats-Unis, ont annoncé la fin de toutes leurs relations avec l’Iran ce qui suspend leurs achats de 90,000 barils de pétrole par jour d’une valeur approximative de 700,000 dollars par jour. L’info de la rupture de Reliance nous vient encore une fois des Britanniques !

Au-delà de l’anecdote, quand la Chine a changé de ligne directrice pour entrer dans le jeu des pressions sur Téhéran, nous avions pronostiqué une course aux sanctions pour avoir la maîtrise des pressions. Washington a coupé une importante source de devises des mollahs pour restaurer sa maîtrise, mais plus concrètement, pour faire plier rapidement les mollahs dans le délai de quelques semaines évoquée par Obama, avant que la gestion des pressions ne lui n’échappe.


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| Mots Clefs | Zone géopolitique / Sphère d’influence : Chine |
| Mots Clefs | Enjeux : Sanctions (du Conseil de Sécurité) |

| Mots Clefs | Décideurs : OBAMA |
| Mots Clefs | Enjeux : Sanctions Ciblées en cours d’application |
| Mots Clefs | Enjeux : Apaisement (entente) |