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Iran : Le régime ne peut tenir ses promesses financières
07.10.2008

Lors de la cérémonie des passations de pouvoir, Mazaheri, l’ancien administrateur de la Banque Centrale iranienne, a parlé de « mirages économiques » en remettant en cause les émissions de monnaies sans contrepartie pour créer un faux pouvoir d’achat et les injections de dollars. C’est un discours étrange puisque Mazaheri a été pendant 11 ans l’exécuteur de ces deux principes de base de l’économie des mollahs. Ce discours répond à une situation d’urgence.



Cet été, la Banque Centrale iranienne, dirigée par Mazaheri, a décidé de relancer le pouvoir d’achat en imprimant et en injectant encore plus massivement des Rials sans contrepartie dans l’économie iranienne sous forme de salaires, retraites ou prêts bancaires. Sa seule mesure non inflationniste a été l’émission d’une nouvelle tranche de 15 millions de tickets de rationnement, mais souvent les Iraniens les revendent pour avoir des rials qui ne valent rien. Dans la même période, le régime a aussi décidé d’injecter toujours plus de dollars sur le marché pour maintenir le dollar stable et bas afin que les importateurs-spéculateurs-commerçants du Bazar, ce principal pilier du régime, puissent transformer leurs brouettes de rials sans valeur en de confortables quantités de dollars.

Ce plan s’avéra insuffisant : il a fallu rassurer les gros bonnets du Bazar et prévenir la fuite de leurs capitaux à l’étranger en leur promettant une distribution de capitaux. Le régime a inventé deux prétextes pour cette opération : des prêts aux investisseurs créateurs d’emplois (un paquet de 15 milliards de dollars au minimum) et un remboursement d’hypothétiques dettes de la BCI aux banques privées, y compris celles qui n’étaient pas encore créées (un autre paquet de 15 milliards de dollars).

Il y a environ une semaine, le régime a changé de ton ! C’était au lendemain de la nouvelle résolution de l’ONU qui ne prévoit pas de nouvelles sanctions et présage la possibilité d’une entente avec les Etats-Unis. Le régime a estimé qu’il pouvait faire l’économie de ces primes surtout à un moment où la réserve en devises où il doit puiser les dollars promis est en déficit.

Le régime a alors oublié l’hypothétique dette de la BCI aux banques et il a évoqué de prétendues dettes (d’un montant inconnu) des banques à la BCI et il a aussi décrété un gel des prêts aux investisseurs créateurs d’emplois au prétexte de l’échec de ce programme. Selon l’expression iranienne, l’administrateur a posé un triple cadenas sur les coffres de la BCI.

Pour brouiller les cartes, le régime a destitué l’administrateur de la BCI et dès le lendemain de la nomination de son successeur, la rumeur courrait que le nouvel administrateur allait faire sauter le triple cadenas. La seule incertitude était sur le calendrier de la libération des capitaux promis. On parle de moins en moins de la levée de ce triple cadenas, mais le régime et son trésorier la BCI ont trouvé un compromis pour calmer les Bazaris en promettant de lâcher un nouveau paquet d’au moins 20 milliards de dollars soit les 2/3 des 2 paquets initiaux.

Le nouveau paquet se compose de deux parties, une acquise, et l’autre qui reste à être adoptée par le gouvernement. La partie acquise est une prime de 5 milliards de dollars aux industriels (calendrier et bénéficiaires flous) et la seconde partie se compose à nouveau d’une prétendue dette de l’Etat aux banques d’un montant de 5,5 milliards de dollars et d’une prime de 9,2 milliards de dollars aux banques privées (existantes ou en création).

La pilule est passée car le régime a promis qu’il s’agissait d’acomptes et aussi parce qu’il a promis de distribuer les 9 milliards de primes (soit la moitié du nouveau paquet) non pas en rials (imprimés sans contrepartie et malmenés par l’inflation), mais en dollars. Le choix est officiellement expliqué comme une mesure pour ne pas aggraver l’inflation.

Mais le paiement de cette seconde partie reste une hypothèse : en fait le régime n’a pas renoncé à sa décision de faire des économies. Dès le lendemain de ces bonnes annonces, l’ancien administrateur de la BCI (puériculteur de formation), par ailleurs initiateur de ces mêmes projets, a pris la parole pour critiquer ces programmes inflationnistes. C’est du politiquement correct et en même temps un frein à opposer à l’appétit des Bazaris pour ralentir cette redistribution des capitaux alors que la réserve en devises est négative.

Dans le même registre, le milicien Mohsen Rezaï, secrétaire du Conseil du Discernement de l’intérêt de l’Etat (berger de formation) a pris la parole pour mettre en garde contre un déficit budgétaire prévisible et immédiat de 10 à 15 milliards de dollars des réserves en devises si le prix du baril descendait sous les 90 dollars.

Le régime a la mémoire courte : au début du mois de septembre, il avait annoncé une hausse de 31% de ses revenus pétroliers par rapport à l’année dernière et des réserves gonflées à bloc. Cette annonce était fausse comme l’est la présente.

Les revenus pétroliers iraniens ne peuvent pas baisser de 10 à 15 milliards de dollars du jour au lendemain si le prix du baril baisse car les Etats ne vendent pas leurs barils quotidiennement à la criée sur les marchés. Dans le cas de l’Iran, le pétrole est prévendu en contrats buy-back à un prix fixe bien en dessous de 90 dollars évoqués (8 à 15 dollars : c’est ce qui explique les déficits de l’Iran).

Par conséquent, il s’agit là de deux annonces semi-officielles, de freins à la redistribution des dollars promis, freins d’autant plus utiles que le régime prévoit une réévaluation à la hausse de ces redistributions pour contrer des envies de plus en plus fortes des Bazaris de fuir l’Iran avec leurs capitaux.

En dehors de cet aspect pragmatique, il y a un aspect politique. Cette intervention surmédiatisée de l’ancien administrateur de la BCI (IRNA, AFP), jouant au gourou économique, faisant la leçon à Ahmadinejad, donne une stature politique à l’ex-banquier que le régime souhaite opposer comme un candidat super technocrate à Ahmadinejad afin de donner un parfum pragmatique au show électoral des présidentielles de juin 2009.

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Pour en savoir + :
- Iran-économie : Le choix destructeur du Dollar Stable
- (16 SEPTEMBRE 2008)

Pour en savoir + sur les présidentielles :
-  Iran : L’ex-président de la BCI pourrait succéder à Ahmadinejad !
- (27 SEPTEMBRE 2008)

Pour en savoir + sur les revenus pétroliers :
- Revenus pétroliers : l’Iran veut rassurer ses créanciers !
- (9 SEPTEMBRE 2008)

| Mots Clefs | Instituions : Politique Economique des mollahs |

| Mots Clefs | Institutions : Démocratie Islamique |

| Mots Clefs | Enjeux : Pétrole & Gaz |