Il faut tout d’abord préciser qu’à l’approche des échéances électorales, il y a toujours des attentats sanglants en Iran. Ce sont des opérations du régime pour dire que sa belle et populaire démocratie islamique est en danger. Au passage, le régime profite de l’affaire pour lancer des rafles et faire de la répression interne. Dans le cas de l’attentat du 12 avril, le régime a longtemps hésité pour choisir sa cible. En fait les mollahs auraient pu accuser n’importe quel groupe de cet attentat, mais ils ont choisi les monarchistes car les iraniens surtout ceux nés après la révolution sont dans une forte majorité très favorables au retour de la dynastie Pahlavi qui a incarné la modernité, l’enseignement laïque, la tolérance religieuse, l’émancipation des femmes, l’accès des ouvriers à la propriété, mais surtout la restauration de l’identité iranienne non islamique.

L’attribution de l’attentat aux monarchistes est une opération médiatique pour ternir l’image positive de ce mouvement qui a toujours rejeté, selon les recommandations de Reza Pahlavi, tout recours à l’usage de la violence pour un changement de régime.

Cependant, il ne faut pas négliger la capacité des mollahs à anticiper : ces derniers ont toujours recours à la technique des faux opposants, et depuis quelques années, ils ont décidé de s’attaquer aussi bien au féminisme qu’à la défense de l’identité iranienne ou encore au monarchisme. C’est ainsi qu’ils ont créé des personnages qui incarnent ces idéaux mais dans le sens des attentes des mollahs.

Dans le secteur identité nationale, les mollahs ont offert aux iraniens un certain « Hakha » qui depuis son échec s’est converti en guérisseur à Washington. En 2002, cet homme qui se disait « le fondateur du syndicat international des pilotes de lignes et le propriétaire des Irak Airlines ou encore conseiller en affaires soviétiques de Reagan », voulait restaurer la monarchie Achéménide de Cyrus en Iran. Il promit de débarquer avec 10,000 avions de ligne pour prendre d’assaut Téhéran. Des dizaines de milliers d’iraniens sont descendus dans les rues vêtus de blanc pour accueillir ce faux prophète qui ne vint jamais.

Il y eut par la suite les rumeurs qu’un barrage allait inonder Persépolis. Nous avons d’ailleurs évoqué cette menace qui s’est avéré être un canular, mais il a permis au régime de mettre en place des comités de sauvegarde de Persépolis et même des commandos qui ont explosé le fameux barrage inexistant, commandos appartenant à la mouvance d’un certain « Forood Fooladvand », l’homme qui selon Téhéran serait derrière l’attentat de Chiraz !

Ce Forood Fooladvand est apparu après Hakha et il a fondé un groupe nommé l’« Assemblée Royale Iranienne ». FF agissait depuis la Grande-Bretagne, le principal protecteur des mollahs. Dans une émission télévisuelle quotidienne, il expliquait et critiquait le Coran car c’est un sujet très apprécié des iraniens. Il s’agissait en fait d’un appât pour attirer les iraniens, mais aussi d’une preuve de son hostilité apparente au régime des mollahs.

Mais la véritable mission de ce personnage hybride était de dire son plus grand respect pour le Chah (sans quoi il n’aurait pas pu se dire monarchiste), et en même temps d’insulter copieusement et quotidiennement en des termes très orduriers son héritier Reza Pahlavi ainsi que son épouse la Chahbanou Farah Pahlavi, c’est-à-dire les deux symboles de la monarchie qui sont encore en vie et représentent une menace pour le régime. Il s’agissait de les discréditer par une soi-disant remise en cause de soi-disant militants de la monarchie.

En outre, cette « Assemblée Royale Iranienne » rejetait les emblèmes historiques du Lion et du Soleil du drapeau iranien, symboles de l’identité iranienne, et même le principe héréditaire de la monarchie…

Comme son prédécesseur Hakha, le septuagénaire Fooladvand prédisait un débarquement pour sauver l’Iran avec ses commandos et comme preuve de son activité, il a détourné un avion ou fait escalader l’Arc de Triomphe par ses acolytes. Sur place, nous avons vu les soi-disant chefs de coordination du commando en grande conversation avec un bouquiniste iranien, un faux opposant qui est un mouchard de l’ambassade des mollahs. Après avoir sans cesse repoussé la date de son invasion finale de l’Iran, Fooladvand disparut subitement en octobre un peu comme l’imam caché pour entrer en clandestinité : officiellement débarqué en Iran pour renverser les mollahs.

En l’accusant, les mollahs relancent la légende de ce personnage trouble et essaient de substituer de faussaire violent à Reza Pahlavi, le seul opposant très apprécié des iraniens justement parce qu’il refuse le langage de la violence et qu’il n’a pas participé à la révolution.

Le récit même de l’arrestation de l’auteur des attentats cherche à créer une légende : l’« il a été arrêté l’arme à la main, seul dans les bois face au régime » ! Non mais quel héros !

Autre détail intéressant, l’arrestation de ce terroriste aidé par les américains et les britanniques a eu lieu au lendemain du retrait des Moudjahiddines de la liste des groupes considérés comme terroristes en Grande-Bretagne sous une impulsion des Etats-Unis.

Cette affaire louche n’a pas encore dit son dernier mot et peut encore nous réserver d’autres surprises : comme de soi-disant complicités internes au sein du régime, préludes à des règlements de comptes internes.

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