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L’Iran : Ne rien faire ?
13.01.2007

Le système d’information du régime des mollahs utilise la méthode 80/20. Il s’agit de diffuser 80% de données fondées (généralement une analyse des défauts du régime dans un domaine précis) afin de faire passer 20% de données délibérément fausses (qui sont les solutions proposées par un courant réformateur du régime).



Roger Stern suit ce modèle. Dans son seul et unique article scientifique, il avait ainsi évoqué les lacunes de l’industrie pétrolière iranienne afin de justifier le programme nucléaire iranien. Après avoir essuyé quelques critiques quant à ses conclusions, il revient en changeant ses conclusions ! C’est ce qui fait le charme de la méthode 80/20.

Les données fondées sont constantes, et l’on peut à volonté varier les plaisirs intellectuels des 20% restants. Ainsi dans la version précédente, Stern justifiait le programme nucléaire et diabolisait le recours à une option militaire : nous y avions vu la signature des diverses campagnes médiatiques des mollahs qui ont toujours diabolisé l’option militaire, pour ameuter les mouvements anti-guerre et créer un mouvement international pour accélérer la tenue d’une conférence internationale Iran-USA qui permettrait d’aboutir à une Solution consensuelle Globale [1] (Iran-Irak-Hezbollah).

C’est pourquoi, l’absence de toute référence à de possibles sanctions économiques nous avait frappée : Le document de Stern ne tenait à aucun moment compte de l’efficacité d’un isolement économique de l’Iran. A l’époque les Etats-Unis n’avaient pas encore divulgué leur plan pour abattre le système bancaire des mollahs, mais de la part d’un supposé chercheur économiste de la classe internationale de Stern, cette absence était suspecte et l’est encore d’avantage aujourd’hui.

Dans la version précédente de son article destiné essentiellement à la presse virtuelle, son souci avait été de frapper l’opinion, de donner un délai aux mollahs et de justifier leur programme nucléaire qui était selon lui purement civile. Parallèlement, il avait réussi à focaliser l’attention de l’opinion publique sur le danger d’une option militaire et surtout il avait réussi à convaincre l’opinion malléable des internautes de l’absence de l’efficacité des sanctions économiques.

Aujourd’hui, la donne a changée de nombreuses banques internationales ont rompu leurs relations avec Téhéran et la dernière d’entre elles est la Commerzbank de l’Allemagne. Hormis cette mise à l’écart des banques internationales, les grandes compagnies pétrolières, y compris Total, suivent l’exemple de la japonaise INPEX (et la chinoise SINOPEC) et se montrent réticentes pour renouveler leurs contrats en Iran.

Aujourd’hui, il y a des vraies sanctions contre l’Iran et les choses risquent d’empirer si l’ONU leur apporte son « approbation » car alors la Russie, la Chine mais aussi de nombreux états Européens devront également renoncer à certaines manœuvres pour préserver leurs intérêts en Iran.

L’article de Stern arrive à point nommé : il re-propose de laisser un délai aux mollahs et surtout d’abandonner les sanctions onusiennes (ou autrement dit, la « caution morale » d’un soutien l’ONU aux sanctions déjà appliquées).

La forme du nouvel article de Stern (publié par l’International Herald Tribune) est délibérément moqueuse envers la république Islamique et utilise les terminologies des opposants (les mollahs – ndlr : pour faire taire les opposants et écarter les soupçons d’une entente entre l’auteur et « les mollahs »).

Les éléments de la partie des « 80 %» des données fondées (de la méthode) sont particulièrement bien dosés et évoquent sans langue de bois l’affairisme des mollahs et leur économie mafieuse. Il fallait ce niveau de vérité pour prouver la sincérité de l’auteur et donner plus de poids à ses conclusions.

A l’issue de cet exposé sans complaisance, quel est son argument pour justifier que l’on accorde un nouveau délai aux mollahs et surtout que l’on abandonne les « inefficaces » sanctions onusiennes ?

Selon Roger Stern, le régime des mollahs risquerait de faire passer ses propres déboires économiques pour des conséquences des sanctions à venir !

On voit bien que Stern habite en Californie et non pas en Iran où les pilotes de l’aviation civile arrondissent leur fin de mois en faisant le taxi au noir.

Cher Monsieur Stern,

Ne vous en faites pas pour l’état mental des Iraniens. Ils savent que les « méchants » sont les mollahs et leurs fistons, ils savent que l’argent public est distribué aux terroristes du Hezbollah (tiens, vous n’en parlez pas !). Les iraniens voient les fortunes des mollahs et leur train de vie et voient les SDF iraniens, il n’y a aucun risque qu’ils attribuent leur misère à autrui !

Il est de notoriété publique que les mollahs ont gagné 560 milliards de $ avec le pétrole depuis 1979 soit 80 fois les revenus pétroliers iraniens d’avant la révolution ! Les iraniens connaissent bien tout ce qui avait été alors accompli (avant la révolution) avec ce presque RIEN, et le trésor qui a été gâché sous les mollahs. Aujourd’hui, les iraniens souffrent et attendent du soutien de la part des occidentaux. Ils ne comprendraient pas que l’on puisse donner du temps aux mollahs en prétendant qu’il faut attendre tranquillement un effondrement du régime dans cinq à huit ans. Si on les laisse tomber, il est clair qu’ils n’auront plus aucune envie de prendre leur destin en main et d’aider l’occident à abattre ce régime. Les mollahs le savent bien et compte sur les partisans des « délais supplémentaires » car ces derniers sont là pour tuer les urgences.

Cher Monsieur Stern, vous êtes au service des intérêts des mollahs : gagner du temps, attendre la fin du mandat de Bush, espérer un consensus… Ainsi on néglige le peuple iranien pour le pousser à haïr l’occident et retourner dans les bras des mollahs. Bizarrement ces dernières années, le quotidien International Herald Tribune a répondu présent à chaque fois qu’un partisan des délais s’est manifesté dans le cas du dossier nucléaire iranien.

International Herald Tribune : Les mollahs maladroits !
8 Janvier 2006 | Roger Stern

L’Iran s’est lui-même enlisé dans sa crise pétrolière qui pourrait ramener ses exportations de pétrole à zéro en 2015. Alors que l’Iran dispose de la troisième réserve mondiale de pétrole, ses exportations ralentissent de 10 à 12 % par an. Comment cela a-t-il pu arriver ?

Les industries lourdes doivent être entretenues pour être productives, et c’est particulièrement vrai dans le cas du pétrole. En Iran, les rendements de chaque puits diminuent tous les ans. Si de nouveaux forages ne sont pas faits, la production s’effondrera. C’est ce qui arrive à l’Iran car ce pays n’a pas réinvesti dans de nouvelles productions. Mais pourquoi ?

Pour les mollahs, le retour sur investissement à court terme dans le pétrole équivaut à zéro. Ils sont réticents au principe d’attendre 4 à 6 ans pour qu’un forage soit rentable, aussi plutôt que de réinvestir pour relancer la production, la république islamique assèche son secteur pétrolier en dépensant les profits du pétrole dans un état providence d’une inefficacité inouïe (il n’y a pas d’état providence en Iran, sauf pour les clans au pouvoir. Certains ouvriers ne sont même pas payés depuis des années… –ndlr).

La survie politique du régime est assurée par la création d’emploie dans des sociétés publiques subventionnées par un état qui est lui-même déficitaire (le système économique iranien ne crée pas d’emploie car elle ne croit qu’en la spéculation).. L’autre menace qui plane sur les exportations est la croissance de la demande intérieure. La demande iranienne en pétrole n’est pas simplement croissante, elle est explosive, à cause du prix subventionné des carburants qui crée une croissance de la demande la plus élevée au monde (là encore, Stern interprète les chiffres selon ses convenances… Cette croissance de la demande intérieure est liée à la contrebande de l’essence par les Pasdaran).

Ainsi l’Iran brûle sa chandelle par les deux bouts en produisant de moins en moins tout en consommant de plus en plus.

En l’absence d’un changement de la politique énergétique en Iran, un déclin rapide des exportations semble rapide. L’immobilisme politique et une économie planifiée à la soviétique rendent la résolution de ce problème pratiquement impossible. Le régime aurait pu s’aider en facilitant les investissements étrangers dans de nouvelles productions et étonnamment il ne l’a pas fait alors que le déclin de ses exportations pétrolières met la survie même du régime en péril (c’est totalement faux, le régime a toujours privilégié le buy-back, mais il n’a pas réinvesti convenablement ses revenus. Et en plus, le texte de Stern se contredit - ndlr).

Même programme nucléaire iranien, qui est aperçu par les Etats-Unis comme une tentative pour posséder la bombe atomique, est un signe de l’effondrement pétrolier. Les USA disent que l’Iran est un pays riche en pétrole qui n’a pas besoin de l’énergie nucléaire et alors que ce pays est décevant dans ses réponses sur le sujet… On ne peut pas dire que tous les arguments iraniens soient faux. La plupart des centrales électriques d’Iran sont au fuel ou au gaz et de l’électricité moins chère fournie par les réacteurs de fabrication russe pourrait libérer plus de pétrole pour les exportations. Reconstruire de nouvelles centrales à gaz ne serait pas beaucoup moins cher que de construire un nouveau réacteur. Et les ventes russes de réacteur bon marché sont une subvention indirecte à la survie du régime.

Investir en Iran est devenu si peu attractif que même les états désespérément en manque d’énergies ont arrêté leurs tentatives. Par exemple, l’INPEX, la compagnie pétrolière japonaise, a abandonné une négociation étalées sur sept ans concernant l’immense gisement d’Azadegan. Si l’Iran avait été un meilleur partenaire de négociation, Azadegan serait aujourd’hui en production. Les fuites à l’intérieur des raffineries est à l’exemple de tout ce qui va mal dans le secteur pétrolier de ce pays. Selon le journal gouvernemental « Iran », les fuites représentent 6% de la production totale et sont toujours non solutionnées. Cette perte colossale de revenus persiste en raison du modèle soviétique d’économie planifiée par l’état. Les prix subventionnés (de l’énergie) forcent la compagnie nationale de pétrole à vendre à perte sur le marché intérieur. L’Iran pourrait gagner des milliards en réparant les fuites, mais la compagnie nationale de pétrole ne fait pas ces réparations car, selon la direction, ces réparations ne sont pas rentables. Les fuites du pétrole entraînent des pertes d’argent.

Dans un monde menacé par les propos va-t-en-guerre d’Ahmadinejad, les soucis pétroliers de l’Iran peuvent apparaître comme une bonne nouvelle. La décision du Conseil de Sécurité de l’ONU de s’en prendre au développement de l’armement iranien semble aussi être un bon signe.

Pourtant les dommages économiques que l’Iran s’inflige à lui même sont bien pires que les sanctions insignifiantes que l’ONU pourrait mettre en oeuvre. Les sanctions économiques pourraient mettre en difficulté les adversaires de la politique (nucléaire) iranienne : Téhéran pourrait faire passer ces déboires comme étant les conséquences des sanctions économiques. Les mollahs font un excellent travail de destruction de l’économie iranienne et il faudrait les laisser seuls finir le travail.

Attaquer l’Iran permettrait au régime d’échapper à la responsabilité d’un désastre économique qu’il a lui-même créé. Pire, une attaque pourrait conduire à l’unité derrière un clergé actuellement en perte de vitesse. C’est pour cela que la meilleure des politiques face à l’Iran est peut-être de ne rien faire du tout.

Ne Rien faire : Si vous avez des doutes sur les liens entre les mollahs et Stern, relire nos remarques qui précédaient ce texte.

| Mots Clefs | Nucléaire 2 : Expertises Nucléaires |

| Mots Clefs | Enjeux : Sanctions Ciblées en cours d’application |

[1Solution Globale | L’instabilité de la région permet aux mollahs de se poser en arbitre de la confusion. Cette confusion ne peut exister que si les mollahs ont des agitateurs sur place. Tel est le fondement de leur stratégie, ils restent en retrait et laissent faire des intermédiaires : le Hamas, le Hezbollah et même la Syrie. C’est pourquoi le Hezbollah est une nécessité pour les mollahs. Le Hezbollah garantit la politique de nuisance régionale des mollahs et au retour les mollahs doivent trouver un cadre international qui garantisse le Hezbollah. La communauté internationale s’y oppose (avec des nuances). C’est pourquoi le régime des mollahs doit faire peur à une très grande échelle afin de pousser les Européens et surtout les Américains à consentir à accepter un compromis : un statut quo sur le Hezbollah. |