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L’économie iranienne et le dernier choix des mollahs
29.12.2006

L’économie iranienne est un édifice mystérieux. En occident, on attribue sa lenteur ou ses lacunes à la nationalisation du secteur privé au lendemain de la révolution islamico-communiste iranienne qui a tourné en faveur des mollahs. Mais l’économie iranienne n’est pas un modèle étatique : c’est un modèle hybride très particulier.



Quand en 1979 les mollahs ont pris le pouvoir, ils n’ont pas « nationalisé » le secteur privé mais supprimé le jeu des marchés en « étatisant l’économie » et en « privatisant l’exercice du pouvoir » : l’Etat a été parcellisé et chaque parcelle confiée à un clan.

De nombreux clans ont des liens familiaux, mais ces liens n’ont pas empêché les règlements de comptes internes ou la concurrence entre deux clans rivaux. Le chef de chaque clan est en général un des mollahs qui ont apporté leur soutien à Khomeiny pour la prise du pouvoir. Ainsi, à la fois l’Etat et l’économie ont été privatisés et confiés à des familles qui gèrent leur secteur familialement : le pouvoir et l’économie ont de ce fait un caractère mafieux.

Cette économie est basée essentiellement sur la spéculation et les marchés noirs. En dehors des mollahs, il y a dans le paysage politico-économique iranien les Gardiens de la Révolution qui agissent en meute ou individuellement. Sur eux repose la sécurité de tous les composants de cette mafia. Cette protection a un coût et en échange de leur loyauté, ces miliciens, d’anciens repris de justice ou simples jeunes voyous avant la révolution ont aussi reçu des parts de ce gâteau.

C’est cette oligarchie de mollahs et de miliciens qui gère les affaires politiques, diplomatiques et économiques de l’Iran. Il ne s’agit pas de simples parvenus, c’est pire. Le parvenu a sans doute des capacités professionnelles dont sont dépourvus ces personnages dont l’arrivée aux affaires repose sur des circonstances géopolitiques et non sur leurs compétences. Leurs compétences relèvent de la manipulation des masses, de la répression et du terrorisme.

Les mollahs ont immédiatement compris la nécessité de peser au Liban, afin de devenir une puissance régionale agressive. Ils ont joué sur les divisions Europe-Amérique et parallèlement à leur terrorisme armé, ils ont entrepris de politiser leur économie afin d’obtenir la complaisance des alliés commerciaux pour contrer l’adversité américaine.

Il y a donc en Iran un domaine particulier, le pétrole (mais pas seulement), qui doit garantir la survie du régime. En pratiquant, les plus bas prix pétrolier, le régime a gagné le soutien de quelques puissances intermédiaires. La majeure partie du pétrole est donc vendue à bas prix (en pré-vente/Buy-back) contre cette protection et 20 à 30% sont vendus au prix du marché. Parallèlement, les Etats partenaires ont accepté d’investir d’importants capitaux en Iran, investissements qui alimentaient les secteurs réservés aux différents clans.

Ces investissements n’ont pas été profitables à l’économie iranienne car les capitaux n’ont pas été gérés pour créer des richesses pour tous mais de l’enrichissement personnel (pour les chefs du clan et leurs progénitures toujours plus nombreuses). Les profits n’ont jamais été investis pour le renouvellement des équipements, la modernisation industrielle, la recherche ou l’éducation. Ils ont été engloutis dans des sociétés étatiques gérées à vie par tel ou tel clan. En même temps, la population s’est appauvrie et le marché intérieur a cessé d’exister. A l’extérieur, on ne reconnaît aucune réussite économique spectaculaire iranienne.

Il est probable que les investisseurs étrangers y trouvaient leur compte dans des affaires ponctuelles, mais cette gestion a ruiné l’Iran et détruit ses capacités industrielles. Le système a fonctionné tant que les investisseurs continuaient de financer cette fuite en avant mais il va soudainement s’effondrer si l’investissement s’arrête et les revenus pétroliers plongent. Le pétrole vendu en Buy-Back (prévente) apportait un revenu fixe mais peu intéressant à l’Iran (encore moins que les revenus d’avant la révolution | graphique ci-dessous) et lui assurait la protection des Etats Européens et Asiatiques, ce revenu était complété par la part vendue au prix du marché pour alimenter le budget de l’Etat.

On peut inclure dans ce budget les dépenses courantes mais aussi les énormes dépenses militaires, le salaire des millions de miliciens et les subventions intérieures (comme celles de l’essence et du pain), mais il ne faut pas oublier les aides économiques et militaires (missiles, armes, équipements) au Hezbolah, au Hamas et aux centaines de mouvements islamistes.

Le régime des mollahs dépense à tort et à travers pour s’adjuger la loyauté des groupes extérieurs ou intérieurs. Il investit également à perte d’importants capitaux dans des pays infréquentables et ruinés comme le Biélorussie, le Zimbabwe et nombreux autres états africains afin de s’attirer les voix de ces pays membres de l’ONU. Ce régime gaspilleur doit aussi faire face aux besoins grandissants du programme nucléaire clandestin qui nécessite des composants prohibés qui sont achetés à prix d’or.

Il y a donc plusieurs handicaps qui minent l’économie iranienne : une industrie vétuste et en faillite, des dépenses (internationales) très élevées et toujours en expansion (500 millions de dollars pour le Hezbollah, 250 millions de dollars pour le Hamas…), des revenus pétroliers diminués pour obtenir une protection diplomatique et des contrats accordés à des puissances étrangères pour le même motif.

Ainsi l’industrie textile iranienne a été sacrifiée et ce marché confié aux Chinois. Ainsi l’industrie automobile iranienne a été sacrifiée au profit des Français. L’Iran est un pays à vendre.

Ce pays ne produit rien, mais vend tout. Comme nous l’avons précisé, une petite partie de la production pétrolière iranienne se vend au prix du marché, mais cette part (sans doute insuffisante) n’a pas permis aux mollahs de se reconstituer des réserves et de rembourser leur dette même quand les prix étaient au plus haut : La Russie et l’Algérie y sont parvenus dans le même délai.

L’économie iranienne est basée sur la braderie géante des différents secteurs industriels, héritages d’avant la révolution. Elle est également basée sur l’exportation du pétrole (dont une grande partie se fait à un prix dérisoire et une petite à prix normal). Aujourd’hui les prix du pétrole sont en baisse et cette dernière marge disparaîtra sous peu : la situation des mollahs s’aggrave. Ils n’ont plus de choix ! A moins de supprimer certaines dépenses (nucléaire ou terroriste), ils sont condamnés à la banqueroute. Les investissements étrangers se font rares : La fuite en avant est condamnée également.

Ils sont devant des réalités qu’ils ont du mal à expliquer aux Iraniens : les caisses sont vides et la tendance est pire. Ainsi l’aveu de la perte des réserves est un premier pas et le chiffre annoncé de 75 milliards ne correspond sans doute pas à des capitaux « donnés aux Russes », mais à l’ensemble des capitaux qui ont disparu dans le flot des dépenses inavouables du régime :
- détournements divers,
- corruption,
- mauvais investissements,
- fuite des capitaux
- Et là encore, il s’agit d’incriminer des ennemis... des étrangers !

Car il ne reste désormais que deux possibilités pour les mollahs : chercher la guerre ou prendre la fuite. Il est probable que tous ne feront pas les mêmes choix, mais il est aussi vrai que tous n’ont pas vraiment le choix. Ainsi Rafsandjani, avec un casier plus lourd que celui de Saddam Hussein, n’a que le choix de l’affrontement et il entraînera avec lui ses amis et ses alliés.

| Mots Clefs | Instituions : Politique Economique des mollahs |

| Mots Clefs | Mollahs & co : Rafsandjani |

| Mots Clefs | Auteur : Textes essentiels |

| Mots Clefs | Instituions : Economies Parallèles |