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L’Iran : la meilleure réponse possible
13.11.2006

Dernièrement, le régime des mollahs se félicitait de la victoire des démocrates dont il avait reçu l’émissaire à Téhéran quelques jours plutôt. Chacun voyait alors un possible arrangement avec ce régime, d’autant plus que même l’administration Bush avait entamé un lent et timide processus de rapprochement.



Après la victoire Démocrate à la chambre et au Sénat, Bush avait nommé Robert Gates, un homme proche de Brzezinski, le gourou du parti démocrate en matière de la politique internationale. Ce processus a été perturbé par l’annonce d’un mandat d’arrêt international contre l’homme fort du régime, Rafsandjani qui détient l’ensemble des centres de décision du régime en vertu de la constitution de la république Islamique.

Dans notre précédente analyse, nous avions souligné le malaise créé par cet événement. La réponse du régime des mollahs est surprenante. Cette réponse est donnée au lendemain d’une visite iranienne à Moscou, visite parsemée de rencontres marathon entre un haut responsable iranien, protégé du Guide Suprême, et les 3 plus hauts dirigeants Russes. La réponse de Russes est ambiguë et neutre : poursuite des négociations, et ne pas prendre immédiatement parti. C’est sans doute ce que veulent les Russes : attendre.

Poutine et Bush doivent se rencontrer dans 2 jours (le 15 novembre) et les Russes aimeraient rester ouverts aux offres que pourrait leur faire Bush (adhésion à l’OMC en échange des sanctions contre l’Iran). Une offre qui a gagné en intérêts après la victoire des démocrates et le retour aux affaires de leur stratège anti-russe. La réponse iranienne dénote avec l’attentisme des Russes : les uns et les autres ont des priorités différentes.

La priorité des mollahs est de répondre à l’attaque lancée contre le chef politique et diplomatique du Régime, le président du Conseil de Discernement de l’intérêt de l’Etat, c’est-à-dire celui qui détermine ce qu’est la raison d’état pour l’Iran, autrement dit Rafsandjani.

La priorité des mollahs est de répondre à l’attaque lancée contre le chef et la réponse se devait d’être explicite, explosive et multiple (répondant à toutes les questions en suspend : Israël [1], nucléaire [2], ONU [3]). La réponse iranienne, en forme d’un concert de déclarations, est riche d’enseignements et l’on peut dans une certaine mesure la qualifier de la meilleure réponse possible.

Il fallait une réponse, et nous avons eu droit à une riposte en règle, forte et clairement dans la grande lignée des provocations verbales du régime. Une série de ripostes qui ont pour objectif de démontrer la solidité de Rafsandjani, des institutions qu’il incarne et la solidarité inter clans face aux menaces sur la nature du régime, mais aussi la détermination collective à suivre le chef du Conseil de Discernement. Tous les clans ont conscience qu’une menace contre le clan dominant est synonyme de menaces contre l’ensemble du régime, synonyme d’une Tabula Rasa. En cela, c’est leur réponse est la meilleure et la seule possible. En plus, elle replace le régime dans son registre favori : l’amplification de la crise avec des provocations en chaîne.

Cette réponse devrait pousser les partisans d’un dialogue avec les mollahs à accepter le régime tel qu’il est : avec Rafsandjani comme principal interlocuteur (mais aussi avec le Hezbollah au Liban…). Par ailleurs, l’annonce de la mise en place de 3000 centrifugeuses [4] est aussi un test supplémentaire pour jauger l’unité de la communauté internationale qui donne un piteux spectacle au Conseil de Sécurité. On peut réellement qualifier cette riposte de la meilleure réponse possible dans tous les domaines dans la situation actuelle. Qui est une situation de transition et d’attente pour les principaux acteurs de la crise : les mollahs (& le Hezbollah), les Russes et les Américains après leurs élections.

Mais cette réponse est également la meilleure et la plus exploitable, voire même une aubaine pour les opposants iraniens qui dénoncent depuis longtemps l’imposture de la dissidence du régime et la simulation des prétendants de cette dissidence sans contenu. Les journalistes de la presse prétendument réformatrice et les chefs de file de la dissidence ont joué aux abonnés absents et n’ont fait aucun commentaire sur le mandat d’arrêt contre Rafsandjani et encore moins sur le monolithisme du régime à faire bloc autour du chef. Cette absence de réaction est elle-même la preuve de ce monolithisme qui est longtemps resté inaperçu grâce à l’écran de fumée des dissidents très bavards et très actifs. Or, nous sommes dans un cas où la dissidence devrait marquer sa différence mais elle ne fait rien.

Dans le cas des superstars de la dissidence, ce silence est encore plus révélateur. Ainsi Akbar Ganji, qui avait bâti sa notoriété de journaliste d’investigation sur des révélations concernant la responsabilité de Rafsandjani dans les meurtres politiques, ne s’est pas manifesté et n’a fait aucun commentaire sur son ancien présumé ennemi pour cet attentat raciste et mortel en Argentine. Ce silence ne nous surprend pas car nous avons toujours affirmé que les révélations de Ganji avaient pour objectif d’asseoir sa notoriété et de lancer sa carrière « d’opposant de l’intérieur ». Aujourd’hui, couronné du succès, Ganji fait des kilomètres en Europe et en Amérique pour promouvoir une version mutante du régime des mollahs. Autre cas de surprise : Shirin Ebadi qui avait protesté contre la participation de Rafsandjani aux dernières élections présidentielles, on ne l’entend guère non plus.

Idem pour la multitude de jeunes journalistes très intrépides qui pullulent dans les médias réformateurs : aucun n’a commenté ce mandat d’arrêt. Ces journalistes supposés différents ont en réalité épousé la carrière journalistique après un passage au syndicat universitaire islamiste du BCU, certains ont été des députés du régime ou même des bassidjis : ils sont la relève du régime et appartiennent à un des différentes factions (ou clans) du régime. Leur silence est éloquent et prouve qu’il existe de nombreuses connexions entre ces clans, et du plus puissant au plus modeste membre de chaque clan, chacun a conscience que son clan ne peut survivre sans ce système. Il n’a fallu que peu de temps aux dignitaires du régime et à ses plus modestes composants (les alibis réformateurs du régime) pour comprendre que ce tourbillon s’il en emportait un ferait tomber les autres à la manière d’un jeu de domino. Ce silence à l’unisson prouve aussi que la question d’un effondrement se pose depuis longtemps à chacun.

C’est la meilleure réponse à ceux qui se posent encore des questions au sujet de ce régime et entendent le faire évoluer de l’intérieur. Sur les questions essentielles, les dissidents (alibi) se refusent d’engager le débat.

« La querelle entre les clans (bien qu’elle existe) est un faux problème car la viabilité du régime est liée à cette dispersion apparente des centres de pouvoir. Cette dispersion n’est qu’apparente : le pouvoir présidentiel est inexistant pourtant Ahmadinejad occupe le devant de la scène comme autrefois le souriant Khatami… » (Extrait de : Iran, la guerre des clans n’aurait pas lieu | IRAN-RESIST | 02.07.06)

La riposte des mollahs est sans doute la seule et possible réponse qu’ils auraient pu faire pour contrer une attaque contre Rafsandjani tout en attendant la fin de cette période de transition du pouvoir américain. Mais cette réponse, la meilleure du régime, se révèle être sa pire réponse quant à sa capacité à évoluer de l’intérieur.

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[1Une réponse explicite, explosive et multiple. A propos d’Israël : « Israël n’a pas les moyens et la capacité pour oser menacer l’Iran car sa situation intérieure et sécuritaire est fragile », a déclaré dimanche le porte-parole du ministère des affaires étrangères, Mohammad Ali Hosseini. « S’il fait une telle bêtise, la République islamique et ses défenseurs donneront une réponse destructrice et cela ne prendra pas une seconde », a-t-il ajouté.

[2Une réponse explicite, explosive et multiple. A propos de l’enrichissement : L’Iran, toujours déterminé à développer son programme d’enrichissement d’uranium en installant 3.000 centrifugeuses d’ici mars 2007. « La position de principe de l’Iran est qu’il faut faire de l’enrichissment sur notre propre sol, même si d’autres propositions peuvent être examinées », a déclaré dimanche le porte-parole du ministère des affaires étrangères à propos de la Proposition Russe de faire de l’enrichissement délocalisé en Russie pour le compte de l’Iran.

[3Une réponse explicite, explosive et multiple. A propos du Conseil de Sécurité : Ahmadinejad a estimé que les ennemis de l’Iran étaient totalement impuissants à arrêter le programme nucléaire de son pays.

[4Mise en place de 3000 centrifugeuses est, selon les mollahs, nécessaires pour passer d’un stade de recherche à un stade de production industrielle du combustible nucléaire !