Accueil > Articles > Lapidation : L’horreur comme outil politique



Lapidation : L’horreur comme outil politique
10.07.2010

Il y a une semaine, l’information iranienne la plus lue sur Google News a été la nouvelle de l’amputation d’un voleur récidiviste. Cette nouvelle horrible a été oubliée par l’annonce de la pendaison imminente d’un meurtrier mineur au moment des faits, puis celle de lapidation imminente d’une femme accusée du délit d’adultère en 2006. C’est une autre réalité de l’Iran, une réalité d’autant plus choquante que les soi-disant modérés du régime ne les ont nullement condamnées. Shirin Ebadi que nous dénonçons comme une fausse dissidente a également brillé par son silence. Ces infos qui donnent la chair de poule et une bien mauvaise image du régime et de ses faux opposants ne vous sont pas parvenues grâce à l’investigation de quelques journalistes intrépides, elles ont été délibérément diffusées par les mollahs eux-mêmes. Il s’agit de diversions médiatiques, un écran de fumée pour faire oublier une suite inédite du soulèvement populaire de juin 2009.



Il y a un an, pour donner une couleur de plébiscite populaire à son refus de dialogue avec l’Occident, le régime a mis en place une fausse opposition interne, le Mouvement Vert dont les partisans soutenaient de manière démocratique Moussavi un partisan du refus de tout compromis et d’un retour à un régime très strictement islamique. Pour la réussite de cette tricherie, le régime avait besoin d’une forte présence populaire, il a laissé la porte ouverte aux rassemblements. Le 15 juin, les Iraniens ont profité de l’occasion pour descendre massivement dans les rues en scandant des slogans hostiles à tous les dirigeants ou en scandant l’hymne d’avant la révolution, hymne interdit dont la récitation faisait état d’un rejet de la révolution islamique, l’acte fondateur du régime.

Ce mouvement social a bousculé les idées reçues diffusées par les faux dissidents qui comme Satrapi affirment que le peuple et surtout la jeunesse ne veulent plus de révolution. Ces faux prophètes et vrais agents du régime ont alors déserté le terrain. Dans le même temps, Moussavi et les autres représentants de la fausse opposition interne ont appelé le Guide à casser les contre-révolutionnaires. La répression a commencé et s’est déroulée sans peine car les Occidentaux ont aussi détourné les yeux notamment parce que grâce à des montages financiers particuliers, les mollahs leur vendent le pétrole à un sixième de son prix. Le soulèvement a été stoppé le 25 juin.

A ce moment, chacun espérait que le mouvement social puisse reprendre pour déboucher sur des manifestations sans fin qui provoqueraient un arrêt de la machine économique provoquant des désistements dans le corps très imposant des fonctionnaires, mais cela c’est avéré impossible car le régime avait focalisé les médias sur le Mouvement Vert et les Occidentaux aidaient en ce sens. Au sein de l’opposition, avec quelques autres sur la radio Toloo, nous avons été les seuls à appeler les Iraniens à boycotter les manifestations facilement récupérables par le régime afin de privilégier directement une grève générale notamment par de l’absentéisme.

Depuis quelques semaines, nos sources en Iran (des gens normaux) ont évoqué un certain absentéisme. Nous n’avions que la parole de ces amis, la confirmation est venue du régime lui-même en adoptant il y a une dizaine de jours un décret qui encourage les fonctionnaires à travailler à domicile !

La demande est une excuse car le travail à domicile est techniquement impossible en Iran : la vitesse de connexion est très lente, il y a d’interminables coupures d’électricité dans le secteur privé et d’une manière générale les fonctionnaires sont trop mal payés pour pouvoir acheter un ordinateur ou encore pour payer un abonnement Internet. Le décret évoque l’existence d’un mouvement absentéiste important. La date de son adoption correspond au triste anniversaire de la fin du soulèvement du juin dernier.

Au début de cette semaine quand les Bazaris ont menacé de faire grève au niveau national, le régime a cru possible la grève générale qui peut le renverser. Il a alors pris deux mesures : limiter les infos sur les revendications et les menaces de grève générale au Bazar pour limiter les risques de la contagion d’une envie nationale de débrayage, mais aussi occuper les médias occidentaux avec un sujet grave. Ce sujet grave a été l’annonce d’une lapidation imminente qui a suscité une mobilisation générale. La veille de l’annonce, Téhéran a diffusé la nouvelle d’une amputation pour donner une solide réalité à la menace de la lapidation.

Il ne s’agit pas de nier la réalité des lapidations que nous dénonçons depuis longtemps en diffusant sur ce site toutes les images de cette peine barbare, mais de dénoncer une méthode de diversion.

Au troisième jour de cette grève qui le terrorise, le régime a fait intervenir le Mouvement Vert qui a appelé les Iraniens à manifester sous sa bannière Verte de l’Islam pur en guise de solidarité avec le Bazar. Cet appel censé casser le boycott des manifestations du Mouvement Vert a échoué et dans le même temps, cette grève dont on parle enfin un peu en Occident est entrée dans sa quatrième journée. Pour éviter que l’on ne s’intéresse à cette grève, le régime a annoncé une possible remise de peine pour la femme condamnée à la lapidation, mais son avocat a déclaré qu’il n’avait pas été informé de cette décision. Téhéran redonne ainsi un second souffle à sa diversion. C’est un soap : un spectacle à rebondissements qui continue car la grève continue au Bazar.

Cette opération de diversion vit grâce aux mollahs, mais ils ne sont pas les seuls animateurs du show. Les Occidentaux qui avaient détourné leur regard pour ne pas soutenir le soulèvement du peuple iranien sont de la partie. Ils ne parlent pas de la grève au Bazar et se sont organisés de condamner en choeur la peine de lapidation qu’ils avaient oubliée de condamner, depuis 30 ans, dans l’intérêt de leurs affaires pétrolières. C’est bien drôle car dans le même temps, les faux dissidents comme Ebadi ou Shadi Sadr sont absents du concert des critiques pour ne pas couler des faux opposants comme Moussavi ou Karroubi, adeptes d’une république strictement islamique régie par la charia !

Si la grève devient contagieuse, Téhéran devra relancer ses diversions. Il pourrait même revenir sur sa parole pour tuer la pauvre femme condamnée à la lapidation ou alors annoncer des pendaisons de mineurs ou d’homosexuels pour occuper les Occidentaux. Que feront alors ces derniers et les faux opposants du régime ?

En lançant l’idée d’une grève générale nous pensions briser les reins du régime, mais la réalité dépasse nos prévisions car en cherchant à dissimuler sa peur de cette grève, le régime a commencé un jeu de massacre dont personne ne sortira indemne surtout ses partisans et ses partenaires.


© WWW.IRAN-RESIST.ORG
Pour en savoir + sur les "méthodes" du régime :
-  Iran : 5 pendaisons pragmatiques
- (11 mai 2010)

| Mots Clefs | Fléaux : Amputations, Lapidation, etc. |

| Mots Clefs | Résistance : Grèves |
| Mots Clefs | Resistance : Boycott (du régime ou du Mouvement Vert) |
| Mots Clefs | Résistance : Menace contre le régime |

| Mots Clefs | Institutions : Désinformation et fausses rumeurs |
| Mots Clefs | Réformateurs & faux dissidents : Le Mouvement Vert |
| Mots Clefs | Resistance : FAUSSE(s) OPPOSITION(s) |
| Mots Clefs | Resistance : Lobby Cinématographique des mollahs |

| Mots Clefs | Enjeux : Intérêts Européens en Iran |