Accueil > News > Iran – Obama : Un double discours tactique



Iran – Obama : Un double discours tactique
11.11.2008

Selon une dépêche parue hier (signée AFP/IRNA), Hassan Ghashghavi, le porte-parole de la diplomatie iranienne, a affirmé lors de son point de presse hebdomadaire qu’il ne fallait pas s’attendre à de « grands changements » dans les relations irano-américaines après l’élection de Barack Obama. Dans sa version iranienne, la dépêche a un contenu radicalement différent bien de la version concoctée pour l’étranger. Décodages d’un double discours tactique.



Différents sujets ont été abordés lors de ce point de presse : la rencontre du quartet à Charm El Cheikh, la réponse officielle à la lettre de Solana, le beau fixe dans la coopération gazière avec le Qatar, et la possibilité de nouvelles sanctions de la part des Six et le dialogue avec Obama.

Alors que la version française de la dépêche donne une ambiance de morosité, le point commun de toutes les réponses aux questions posées a été une analyse cynique très juste suivie d’une sérénité à toute épreuve.

A titre d’exemple, pour Téhéran, la rencontre de Charm El Cheikh signe la fin des efforts infructueux de Condoleezza Rice. Téhéran se félicite de l’échec final de la Conférence d’Annapolis qui s’était évertuée à résoudre la crise du Moyen–Orient sans consulter l’Iran.

Le porte-parole de la diplomatie iranienne a également affirmé qu’il ne croyait pas à la possibilité de nouvelles sanctions car les Six étaient divisés, notamment parce que les Américains ont sanctionné les Russes suite à la crise géorgienne.

Selon le porte-parole de la diplomatie iranienne, une réponse officielle à la lettre de Solana serait également à l’étude : c’est une attitude plus modérée que la réponse abrupte formulée en début de semaine par le chef de la commission parlementaire du régime. L’Europe a beaucoup d’intérêts en Iran et elle reste le meilleur atout de Téhéran pour bloquer l’adoption de nouvelles sanctions contre l’Iran (et ses propres intérêts dans ce pays). Comme à son habitude, le régime revient à une posture plus conciliante après avoir montré les dents.

Nous avons remarqué cette même modération à propos d’Obama : le porte-parole de la diplomatie iranienne a cherché à désamorcer les polémiques lancées contre le futur président américain par les médias ou certains francs-tireurs du régime (comme actuellement Larijani,).

Le porte-parole du ministère des affaires étrangères des mollahs s’est dit très optimiste quant à une possibilité de changement dans la politique américaine surtout de la part d’un homme dont le slogan a été « Nous le pouvons ».

« Nous le pouvons ! » Ce slogan a également été celui de la campagne électorale d’Ahmadinejad, c’est pourquoi le porte-parole du ministère des affaires étrangères des mollahs a précisé qu’en mettant ce volontarisme (commun) au service du changement, on pouvait y arriver pour transformer un slogan (le changement) en réalité. Il a invité les journalistes présents à faire preuve de patience et à ne pas s’embarquer dans des jugements hâtifs tant qu’Obama n’aurait pas été investi.

Il a également rappelé que Téhéran se tenait prêt pour aider le nouveau président américain dans cette tâche conformément à l’esprit de souplesse qui caractérise la politique de la république islamique et dont on a vu un exemple dans les promesses formulées par le président Ahmadinejad dans sa lettre de félicitations à Obama.

La déclaration citée par la dépêche AFP (initialement rédigée par l’IRNA) vient en fait en clôture du point de presse, en réponse à une question bien précise sur le timing du dialogue avec Washington (dialogue qui semble acquis pour Téhéran).

Q | De votre point du vue, est-ce qu’Obama discutera immédiatement avec l’actuel gouvernement iranien (celui d’Ahmadinejad) ou attendra-t-il les résultats des élections présidentielles de juin 2009 pour discuter avec le nouveau président iranien ?

R | Selon le porte-parole de la diplomatie iranienne, les changements d’homme n’influencent pas sur les objectifs fondamentaux de chaque pays : il ne faut pas s’attendre à de « grands changements » dans les politiques iraniennes ou américaines.

En isolant cette réponse dans la dépêche destinée aux médias occidentaux, Téhéran affiche une désillusion victimaire qui ne colle pas à ses diagnostics plutôt réalistes concernant le Moyen-Orient, l’état des Six ou encore la volonté de l’Europe de jouer un rôle indépendant dans la crise nucléaire iranienne.

En fait, c’est de la stratégie pur mollah !  [1]

Les mollahs espèrent en effet se retrouver attablés avec l’équipe d’Obama, mais en l’absence d’une demande franche de sa part pour des négociations en direct, ils accusent Obama de manquer de souplesse afin de provoquer cette invitation au dialogue.


© WWW.IRAN-RESIST.ORG
Pour en savoir plus :
-  Obama : Les réactions des analystes politiques en Iran
- ( 6 NOVEMBRE 2008 )

| Mots Clefs | Décideurs : OBAMA |

| Mots Clefs | Enjeux : Rétablir les rel. avec les USA & Négociations directes |

| Mots Clefs | Enjeux : Garanties Régionales de Sécurité : le DEAL US |

| Mots Clefs | Institutions : Diplomatie (selon les mollahs) |

| Mots Clefs | Auteurs & Textes : Selon l’AFP |

| Mots Clefs | Institutions (du régime) : Presse & Media officiels |

[1Pour aller d’un point A à un point B, le régime des mollahs ne choisit jamais la ligne droite ou même un zigzag mais plutôt un chemin qui ressemble au gribouillis d’un enfant qui a découvert le stylo bic. C’est une méthode très utile sur plan diplomatique, mais aussi sur le plan intérieur car on ne sait jamais où se trouve le point B. Actuellement on atteint des sommets de gribouillis à propos de l’approvisionnement de combustible pour l’hiver prochain. (lire la suite...)