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Iran : Pourquoi Kordan a été destitué à la veille de l’élection US
05.11.2008

Les parlementaires du régime des mollahs ont voté à une très large majorité la censure contre le ministre de l’Intérieur Ali Kordan, l’homme de confiance de Larijani, l’actuel président du Parlement. C’est pourtant lui qui s’est montré le plus acharné à l’encontre Kordan. Les photos (ci-dessous) le montrent aussi très déprimé pendant cette opération qu’il a menée contre son meilleur ami. Décodage d’une destitution complexe dont la forme et la date (pendant l’élection américaine) sont riches en enseignements sur la santé du régime.



© WWW.IRAN-RESIST.ORG

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Ali Kordan (ci-dessus en blanc) a eu une carrière exemplaire au sein du régime : ce milicien des Pasdaran avait même été enseignant universitaire sans que l’on remette en cause l’état de ses diplômes. C’est l’arrivée de ce très très proche collaborateur de Larijani au ministère clef de l’intérieur qui a changé la donne : Rafsandjani, l’actuel patron occulte du régime, a ressenti cette nomination comme une menace pour son pouvoir personnel dans la guerre interne pour le partage du pouvoir (à ne pas confondre avec la soi-disant lutte interne entre les réformateurs et les conservateurs).

Ce diagnostic était juste car c’est le ministère de l’intérieur qui est chargé de compter les bulletins de vote, celui qui contrôle ce ministère peut contrôler l’issue des élections. Or, le patron occulte du régime et autres mollahs qui siègent à l’Assemblée des Experts choisissent « le futur président » sur deux critères de base :
Incarner la politique étrangère du régime
(refus de la suspension nucléaire, refus du désarmement du Hezbollah),
Préserver leurs intérêts personnels,
et pour cela ils préfèrent avoir le contrôle sur lui !

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Cette année, pour l’élection de juin 2009, ils avaient, il est vrai, retenu la candidature de Larijani (qui jouissait d’une bonne image en Europe), mais quand ce dernier a commencé à placer ses amis aux postes clefs du régime et son meilleur ami au poste clef de comptable des élections, les mollahs fondateurs du régime ont craint une tentative de Coup d’Etat rampant et différé. Dès lors, ils ont immédiatement boycotté Larijani et réuni leurs efforts pour éliminer la pièce maîtresse de son plan : Kordan.

Ce dernier a été accusé de divers crimes dont le premier était avoir prétendu à tort de posséder un doctorat honorifique d’Oxford. Pour être certain de le couler, on lui prête aussi une affaire de détournement d’argent dans un contrat gazier. Au cours de la campagne médiatique hostile à Kordan, le nom de Larijani a été cité à maintes reprises : ce dernier a alors rejoint la meute pour éviter de couler avec son ami, il a parallèlement endossé volontairement un rôle d’ultra-conservateur pour sauver sa carrière.

Mais Larijani reste suspect car Poor-mohammadi, le prédécesseur de Kordan, fait aussi parti de son réseau. Quand Larijani avait demandé (ou ordonné) à Ahmadinejad de nommer Kordan, Poor-mohammadi avait été nommé inspecteur général du régime, un autre poste clef d’où l’on peut accuser les autres de détournement de fonds. Ce Poor-mohammadi est aussi dans la ligne de mire des mollahs fondateurs du régime et depuis qu’ils l’ont à l’œil il est devenu très coopératif. Il n’est pas impossible que le cas du milicien Palizdar qui a dénoncé des détournements de fonds par les mollahs fondateurs du régime ne soit lié à la tentative de Larijani de s’émanciper, lancer une épuration interne afin d’instaurer un ordre nouveau au sein du régime.

Si l’aspect réel de la destitution est un coup très dur pour Larijani et l’ensemble de son réseau –qui sont voués à des fins difficiles comme Kordan-, il y a aussi un aspect théâtral utile pour le fonctionnement de cette pseudo-république.

Les mollahs fondateurs du régime avaient sélectionné Ahmadinejad pour incarner (volontairement) le refus de la suspension et ce afin d’obtenir en échange d’une entente qui passe par des « garanties de sécurité » pour le régime et ses alliés, le Hamas et le Hezbollah. Cette entente pourrait être possible, c’est pourquoi Téhéran a besoin d’avoir un motif pour remplacer ou destituer Ahmadinejad (il n’a pas son mot à dire et il joue le jeu). Dans un premier temps, le régime pensait l’écarter par une défaite électorale pour avoir vidé les réserves en devises. Son remplaçant choisi était Larijani et le régime prévoyait même la possibilité d’élections anticipées en cas d’entente rapide avec les républicains.

Les élections anticipées ont été abandonnées car l’entente n’a pu être finalisée, Larijani est tombé en disgrâce suite à ses manoeuvres suspectes et le prétexte de la mauvaise gestion financière a également été oublié car il supposait la faillite économique du régime. C’est presque sans illusion que le régime s’est reporté sur un motif de destitution lié au soutien apporté par Ahmadinejad à Kordan, le mal diplômé. Ce soutien ne s’explique d’ailleurs que par la docilité d’Ahmadinejad qui joue le rôle qu’on lui a donné. La semaine dernière on parlait beaucoup de cette option qui est aujourd’hui en stand bye.

La raison de ce stand bye est encore et toujours l’absence d’entente avec Washington. Téhéran a sans cesse reculé la date du vote contre Kordan pour savoir s’il allait inclure le président solidaire du tricheur dans la charrette des destitués ou pas. Le président a été épargné suite à l’échec des deux dernières tentatives républicaines pour aboutir à une entente (via les missions arabe et indienne). Finalement, Téhéran a organisé le show de la destitution le jour de l’élection américaine, date de la fin de délai pour une entente avec l’administration Bush.

Si par le plus grand des hasards, McCain était élu, l’option d’une entente (avec les républicains et pendant le mandat restant de Bush) redeviendrait d’actualité et l’on reparlera de cette option pour une destitution prématurée d’Ahmadinejad juste avant l’entente (cette dernière profitera alors à Rafsandjani). Nous verrons alors resurgir l’autre affaire Kordan : un détournement de fonds dans un important contrat gazier. Cette affaire pourrait éclabousser Ahmadinejad, mais aussi les autres membres du réseau Larijani.

Si c’est Obama qui passe, toutes les affaires concernant Kordan ressurgiront beaucoup plus tard en juin 2009 à l’occasion des élections présidentielles iraniennes dans le flot des reproches que l’on fait à Ahmadinejad, l’agitateur désormais inutile du régime des mollahs.

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| Mots Clefs | Résistance : Menace contre le régime |

| Mots Clefs | Mollahs & co : Ahmadinejad |

| Mots Clefs | Mollahs & co : Larijani & Jalili |

| Mots Clefs | Institutions : Démocratie Islamique |

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