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Iran : Le rapport américain a rehaussé le rôle de la Russie
08.12.2007

Le rapport des services secrets américains a changé la donne et comme nous l’écrivions dans notre première et seconde analyses consacrées à son sujet, le rapport a remis en cause la possibilité d’adoption d’une nouvelle résolution par le Conseil de Sécurité. C’était l’objectif de cette publication : il profite pleinement à la Russie.



L’intention se précise d’heure en heure, puisque pour enfoncer le clou Washington a même révélé que le président avait eu connaissance du rapport en août 2007, c’est-à-dire au moment où il décidait de proposer des sanctions américaines unilatérales contre les entités qu’il présentait comme trésorières de l’effort nucléaire militaire des mollahs. Quel besoin avait Washington de reconnaître ce détail, sinon de créer la confusion afin de remettre en cause le choix de viser ces institutions ? On fait porter le chapeau au président sortant et on laisse au futur Président le choix de négocier avec les mollahs. L’Amérique se prépare à faire son mea culpa et tendre la main aux mollahs. Mais s’il s’agit de tendre la main pour proposer le même deal, Téhéran dira non et refusera.

Quel est ce deal ? Que Téhéran prouve sa capacité de réformer le régime et devenir plus démocratique. si l’offre est séduisante, Téhéran s’en méfie car les américains entendent demander confirmation en proposant que Téhéran ouvre son système d’élections à des « iraniens démocrates », ces new chalabis. Pour les mollahs c’est évidement inconcevable car pour eux, la démocratisation doit être un packaging nouveau pour consolider leur propre pouvoir et non le contraire. Le deal est un objectif commun, mais il y a divergence sur son contenu. Pour aboutir à un accord sur ce contenu, les américains imposent des sanctions aux mollahs pour les affaiblir et les mollahs créent des problèmes aux américains en Irak, en Palestine ou en Afghanistan. Chacun consent à des pertes dans ces deux guerres larvées sans renoncer au dialogue, un dialogue qui doit impérativement être bilatéral.

C’est une option inacceptable pour la Russie car dans le cas d’un dialogue bilatéral Iran Amérique, elle sera exclue du jeu. C’est pourquoi le chef de la diplomatie russe Sergueï Lavrov a exprimé l’espoir vendredi que les négociations des 5+1 continueraient avec les mollahs. Mais non seulement la Russie veut être présente dans toutes les négociations, mais aussi elle veut créer les conditions pour qu’aucune négociation bilatérale ne soit envisageable.

C’est la raison pour laquelle la Russie demande également une démultiplication des négociations multilatérales avec un maximum d’intervenants. C’est pourquoi, elle insiste également sur la nécessité du retour du dossier du Conseil de Sécurité vers l’AIEA où le Conseil des gouverneurs est composé d’une majorité de non alignés, traditionnellement alliés de la Russie Soviétique. C’est ce que Lavrov a précisé après sa rencontre avec Condi Rice en marge d’un Conseil Otan-Russie. Selon le chef de la diplomatie russe, il y a deux volets à ce dossier : « les pourparlers de l’Iran avec l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) et le travail du groupe des Six ».

Moscou place le retour du dossier au sein de l’AIEA en première de ses priorités. En agissant de la sorte, les russes mettent un point d’honneur à soutenir une demande permanente des mollahs mais en réussissant à éloigner les mollahs des américains. C’est le mieux qu’ils puissent faire avec ces mollahs qui se montrent peu sensibles à leur offre d’alliance privilégiée et ne renoncent pas à dialoguer directement avec les américains. Mais en retardant la date fatidique de cette rencontre, les russes espèrent que la double guerre larvée entre les mollahs et les Yankees tournera aux désavantages des Yankees... A défaut d’un axe Téhéran-Moscou, un déclin régional des américains leur suffira largement.

En insistant sur les deux volets qui importent à la Russie, ce pays entend montrer sa capacité à narguer son adversaire américain et lui dicter la démarche à suivre dans la crise iranienne. Il s’agit de contester le rôle régional des américains au Moyen-Orient et se hisser à leur niveau. La durée de la crise iranienne et la participation de la Russie, comme alliée des mollahs, de la Syrie, du Hezbollah et du Hamas, pourrait selon Moscou lui permettre de réussir cet exploit. En réponse à cette offensive, Rice a réagi en réaffirmant la nécessité de nouvelles sanctions afin de maintenir la pression sur Téhéran, non pas pour obtenir une suspension des activités nucléaires mais pour le pousser à « reprendre les négociations » !

L’Amérique a besoin de ces négociations et d’un deal avec les mollahs. Les pétromonarchies arabes qui ne comprennent pas la nouvelle politique iranienne des Etats-Unis seront également sensibles à ce retour de la Russie.

Les russes entendent profiter pleinement de la guerre larvée entre l’Iran et les Etats-Unis mais aussi des mécontentements suscités par les américains pour améliorer leur propre positionnement au Moyen-Orient. Avant la publication du rapport américain, la Russie était prise au piège dans son engagement injustifiable aux côtés des mollahs : en publiant ce rapport, effaçant l’ardoise des mollahs et repoussant le délai accordé jusqu’en 2015, l’Amérique a surtout relancé la marche en avant du rouleau compresseur russe au Moyen-Orient.

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