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Iran : Khatami n’est pas un modéré, mais un modérateur !
14.10.2008

Khatami, l’ex-président du régime des mollahs, a présidé hier à Téhéran une conférence sur la religion dans le monde moderne en présence d’ex-dirigeants européens dont Romano Prodi et Lionel Jospin. Les membres de la délégation et certains journalistes voient dans la conférence un retour aux affaires pour Khatami, un prélude à sa candidature à la succession d’Ahmadinejad et la promesse d’un compromis modéré. C’est un jugement erroné qui résulte d’une méconnaissance du régime et de son fonctionnement.



Le régime des mollahs a deux tactiques de base qu’il applique dans tous les domaines : l’opacité et le mystère. Le système est conçu de manière à ce que l’on ne sache jamais qui décide et aussi de manière à ce que le régime puisse en faisant référence à l’une de ses institutions casser une décision du gouvernement et remettre en cause d’une manière floue et provisoire un engagement. Tout est mystérieusement provisoire.

Ce système déroutant pour les étrangers, propre à diviser toutes les coalitions entre les différents partenaires du régime (c’est le cas avec les Six) a besoin pour fonctionner de joueurs mystérieux, d’inconnus, de nouvelles têtes dont on ignore les desseins. C’est pourquoi le régime a toujours, depuis le début de son existence, et bien que le président n’ait pas tous les pouvoirs, remplacé un président auquel on s’est habitué par un nouvel interlocuteur avec un nouveau discours. Chacun a droit à 8 ans de présidence et laisse sa place à un autre inconnu. Le rôle de l’inconnu est de remettre en cause les engagements et les concessions précédentes afin d’aider le régime à maintenir un cap rigide sur les sujets de fond : la charia, le Liban et le Hezbollah, le nucléaire…

C’est le fonctionnement du régime. Cela permet aussi de faire valoir l’existence de courants politiques soi-disant discordants plus ou moins fréquentables, même si dans les faits, il ne s’agit pas d’une alternance démocratique, mais d’un jeu pour brouiller les cartes. Il s’agit de perturber les interlocuteurs étrangers afin qu’ils ne sachent à qui parler et qu’ils espèrent sans cesse le retour d’un modéré qui en fait ne reviendra plus et dont le rôle était uniquement de « modérer le débat avec l’Occident ».

Khatami, qui a été le premier modérateur par excellence pendant sa présidence, reste aujourd’hui dans ce rôle de modérateur, d’autant plus indispensable au régime que ce dernier a choisi l’affrontement avec Washington sur son dossier nucléaire.

Ce rôle de modérateur sur le plan international, Khatami l’a d’ailleurs endossé très rapidement après l’élection d’Ahmadinejad. Cette conférence sur la religion n’est pas sa première mission de modération : le régime a sorti ce lapin de son chapeau à plusieurs reprises au cours de ces quatre dernières années : il a été expédié à Davos pour plaider en faveur d’une négociation sans condition préalable, puis à Londres … il a été dépêché à Rome pour représenter le régime aux obsèques du Pape avec une mission de serrage de main de Moshe Katsav pour modérer l’image anti-sémite du régime… et surtout, il a été expédié à Washington où il a essayé de négocier une entente avec les Américains, mission avortée suite à une très grosse colère de Moscou.

Malheureusement, le problème vient du fait que les partenaires économiques du régime (qui souhaitent la fin des sanctions) ont surtout besoin d’un modéré et non juste d’un modérateur, et ils font tout pour obtenir ce modéré. La composition du groupe qui s’est rendu en Iran témoigne de ce forcing.

Il y avait là des représentants d’Italie, 1er partenaire pétrolier et gazier de l’Iran, de la France, 2nd partenaire pétrolier et gazier de l’Iran et de la Norvège, 3ième partenaire pétrolier et gazier de l’Iran ! Il y avait aussi deux personnalités du monde des droits de l’homme (Kofi Annan et Mary Robinson) qui avec les autres intervenants ont condamné l’intégrisme et encensé la religion, pour montrer qu’ils pouvaient ensemble faire semblant que le régime des mollahs n’est pas un régime intégriste mais un partenaire respectable pour promouvoir la tolérance.

Par leur présence, ces dirigeants et responsables ont donné aux mollahs un échantillon de leurs possibilités médiatiques et ainsi affirmé leur engagement à jouer le jeu des négociations avec Téhéran au prétexte d’aider les modérés.

D’ores et déjà, on peut constater que cette tentative d’ignorer la nuance entre modéré et modérateur est un échec. Aussitôt confirmé dans son rôle d’interlocuteur par ses pairs européens, Khatami le modérateur a déroulé le discours officiel du régime : le droit à l’enrichissement était un point de consensus national et l’Iran n’accepterait que des négociations sans condition de suspension.

C’est la seule réponse du régime des mollahs aux délégations européennes, mais quand il s’agit de parler aux Américains, le modérateur peut se déplacer et même négocier.

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Pour en savoir + :
- Iran-nucléaire : Derrière les portes fermées !
- (17 SEPTEMBRE 2008 )

| Mots Clefs | Institutions : Diplomatie (des mollahs) |

| Mots Clefs | Mollahs & co : Khatami |

| Mots Clefs | Institutions : Dialogue des Civilisations |

| Mots Clefs | Pays : Europe (UE, UE3, union européenne) |

| Mots Clefs | Enjeux : Intérêts Européens en Iran |

| Mots Clefs | Violence : Violations des Droits de l’Homme |

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