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Iran : La dernière manip de la Banque Centrale
23.08.2008

La Banque centrale iranienne vient d’annoncer le nombre des coupures de sa nouvelle mouture de chèques-billets déjà distribués : 4 millions ! Et ce n’est qu’un début. La BCI assure pourtant que cette nouvelle injection de billets dans le circuit économique ne sera en aucun cas inflationniste. C’est à la fois vrai et faux. | Décodages |



En mars 2007, le régime des mollahs a libéré le droit d’émission de billets par les banques (semi-privées) en initiant le projet appelé chèque-billet. De mars à décembre 2007, les banques iraniennes ont émis 12 milliards de dollars de chèques-billets soit le double du volume des billets et pièces en circulation. De facto 66% des échanges du pays -270 milliards de dollars en décembre 2007- se faisaient avec une monnaie de singe émise illégalement sans aucun fonds de garantie ! Aujourd’hui on peut estimer ce volume à une vingtaine de milliards de dollars !

Ces billets de monopoly étaient émis pour satisfaire les iraniens les plus riches à savoir la fratrie de mollahs et Pasdaran au pouvoir et leurs collaborateurs. Le régime des mollahs fonctionne encore car il satisfait les intérêts économiques de grandes puissances en Iran, en contrepartie, ces dernières se disent en faveur d’un dialogue constructif avec les mollahs. Téhéran satisfait ses partenaires sur deux plans : il leur achète des produits manufacturés (ordinateurs, mp3, piscine, système d’alarmes, motos, autos…), et il leur vend des produits bruts (pétrole, gaz, cuivre) à bas prix. Ces échanges se font avec des dollars dont la quantité reste limitée.

Explications. L’article du principal quotidien du régime qui nous a servi de source pour le lancement secret des chèques banques en mars 2007 contenait également deux autres chiffres clefs : le « vrai revenu pétrolier (et gazier) » et les frais de paiements des salaires des employés des secteurs nationalisés (qui sont environ 9 millions sur une population active de 23 millions de personnes).

Selon cet article incroyable de Keyhan, les vrais revenus issus des hydrocarbures se résument à 31 milliards de dollars (le chiffre est très plausible, même avec le Buy-back) et les dépenses fixes des salaires s’élèvent à 15 milliards de dollars annuels (soit une moyenne de 138 dollars mensuels par personne).

Les revenus pétroliers constituent 60 à 80% de l’ensemble des revenus du régime en devises. On peut donc estimer qu’il y a au maximum 50 milliards de devises qui entrent. Sur ces 50 milliards de dollars, 11 milliards de dollars au moins vont à l’achat de l’essence, près de 4 milliards de dollars à l’achat de gaz turkmène, quelques milliards pour des achats d’avions de lignes, d’armes et équipements de sécurité, et une autre partie non négligeable va aux remboursements des dettes contractées par des précédents achats destinés à approvisionner le marché iranien. A titre d’exemple, actuellement Téhéran doit 28 milliards de dollars aux trois Etats européens : la France, l’Allemagne et l’Italie !

Parallèlement, le marché doit sans cesse être approvisionné à la fois pour satisfaire les riches consommateurs, mais aussi les partenaires européens dont l’amitié est fonction de leurs exportations. Il en résulte que l’Iran est de plus en plus endetté et vit sur des créances : la situation convient à ses créanciers qui en retour obtiennent des contrats pétroliers toujours moins coûteux.

Ses dépenses étant supérieures à ses revenus, le régime estime qu’il ne doit pas dilapider son excédent de dollars pour son marché intérieur, d’où sa politique permanente de planche à billets sans contrepartie, politique qui s’est relâchée avec le projet des chèques-billets pour créer un pouvoir d’achat factice et écouler les marchandises qui selon les lobbyistes comme Delphine Minoui n’ont jamais été aussi nombreuses et variées.

Cependant, le procédé a fait exploser le taux de l’inflation, les nombreux cas de contrefaçon ou de reventes des liasses sur le marché noir ont décrédibilisé ces billets de monopoly émis sans contrepartie. La BCI est intervenue pour relancer la machine, ie redonner du crédit à cette masse énorme de 20 milliards de dollars de billets auxquels personne ne croyait plus.

C’est dans ce sens qu’il convient d’interpréter l’intervention de la Banque Centrale iranienne. Ahmad Hatami-Yazd, l’ancien directeur général de la Banque Saderat a d’ailleurs confirmé cette hypothèse aujourd’hui dans un entretien accordé à l’agence Fars. Pour lui, il s’agirait d’une pure opération psychologique car les nouveaux chèques-banques sont infalsifiables.

Il y a tout de même une vérité économique plus cynique derrière cette soi-disant opération de confiance pour un soutien psychologique aux consommateurs. La BCI a interdit l’émission de chèques-billets et annoncé la mise en circulation de sa propre version : l’Iran-chèque. Elle a affirmé que ce nouveau « billet » ne créerait plus créer d’inflation car les banques ou les particuliers devraient l’acheter à la BCI. Cependant, elle a également indiqué que les anciens chèques-billets émis sans contrepartie restaient valides pendant 6 à 12 mois.

Il est évident que les banques et les particuliers vont échanger leurs chèques-billets émis sans contrepartie contre les Iran-chèques censées avoir été émis avec une contrepartie !

© WWW.IRAN-RESIST.ORG

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Le reste devient clair et l’on comprend mieux les déclarations faites hier par le directeur de la Banque Centrale où il se veut rassurant sur la fourniture du marché en nombre suffisant d’Iran-chèque. Le directeur de la BCI a annoncé la bonne nouvelle rassurante : la BCI a imprimé 4 millions d’exemplaires d’Iran-chèque 50 pour la première phase !

La BCI imprime à toute allure ! La fourniture massive d’Iran-chèques 50 sera suivie de celle des Iran-chèques 100 (dollars) qui sont, selon le directeur de la BCI, en cours d’impression et disponibles d’ici 10 jours. Ce pompier pyromane a également évoqué joyeusement l’arrivée prochaine des Iran-chèque 200 qui sont à l’étude dans la phase de design graphique (peut-être à l’effigie d’une centrale nucléaire).

Il ne faut pas rigoler car le design graphique est un point important de cette fuite en avant !

En effet, on peut le voir sur l’Iran-chèque 50 dont nous avons publié la photo dans notre précédent article. Si le chiffre 500,000 rials (équivalent à 50 dollars) figure en caractères latins et arabes sur le billet, sur la face recto (la face principale avec des écritures iraniennes) on voit distinctement le chiffre 50 en caractères en latin dans le coin droit de ce nouveau billet de monopoly émis sans contrepartie puisque les réserves sont négatives. Il s’agit d’une étape intermédiaire pour la suppression de 4 zéros que les mollahs jugent inutiles. On dévalue sans en avoir l’air… pour éviter tout choc psychologique !

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Sur un plan des symboles, le chèque-billet se disait Tchek-pool en persan, ie chèque-argent. La nouvelle version du chèque-argent est chèque-Iran. Pour les mollahs, l’Iran est une tirelire d’argent où l’on puise pour dépenser sans se soucier des dettes ! Dans ce pays, les dépenses sont privées, mais les dettes sont publiques. Ceux qui en souffrent le plus sont les fonctionnaires iraniens. Bientôt, ils seront payés pour leur salaire de 138 dollars par un Iran-chèque 200 sans avoir la possibilité de rendre la monnaie avec leurs vieux billets !

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La situation actuelle :
- Iran : Risques très élevés pour les investisseurs, selon la Coface
- (19 AOÛT 2008)

A la recherche de vrais dollars !
- Comment l’Iran compte doper les investissements étrangers
- (1ER JUILLET 2008 )

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